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FESTIVAL DU CINÉMA EUROPÉEN - Clôture avec la projection de « La Ceinture de feu » de Bahij Hojeij «Zennar el-nar», un combat contre l’amnésie(photo)

C’est en présence d’une salle comble et enthousiaste, ainsi que de nombreuses personnalités, telles que l’ambassadeur et chef de la délégation de la Commission européenne Patrick Renauld et le réalisateur Bahij Hojeij, qu’a eu lieu, dimanche 7 décembre à l’Empire Sofil, la première mondiale du film «Zennar el-nar», une adaptation libre du roman «L’Obstiné» de Rachid el-Daïf.

Nullement étranger au monde du cinéma, le réalisateur Bahij Hojeij s’est vu, dès son plus jeune âge, imprégné et marqué par le 7e art. Avec en main une palette importante de diplômes et de maîtrises acquis sur le territoire libanais et français, et un grand nombre de documentaires, de magazines culturels et de films télévisés à son actif, il est loin d’être novice. Son premier long métrage le prouve haut et fort.
Si, comme il l’affirme, « le cinéma libanais se cherche actuellement » et que « les dernières années ont vu une poussée très importante au niveau de la production et du langage filmique », Zennar el-nar fait partie de ces films qui placent le cinéma libanais à un niveau plus que respectable.
L’histoire : Beyrouth, octobre 1985. La guerre bat son plein depuis 10 ans, la violence a pris une tournure chaotique. Face à cet enfer, les personnages gèrent, chacun à sa manière, ce drame. Le film est essentiellement centré sur Chafic (Nida Wakim), personnage en décalage par rapport à ce qui se passe autour de lui et qui n’arrive pas à distinguer le rêve de la réalité. «Ses appels désespérés à sa mémoire, ajoute Hojeij, ses visions fugitives où se mélangent et se mixent passé et présent, ses peurs à chaque blocage de circulation où se matérialisent culpabilité et interrogatoires le portent petit à petit au délire (…). Il représente la majorité silencieuse. Ceux qui ont vécu la guerre en refusant d’y entrer ».
Là se tient le fond même du film et le danger qui guette les personnes concernées par les conséquences de la guerre ; à savoir le refoulement, l’amnésie générale, le besoin de se cacher la vérité : « On nous oblige, dit-il, on nous impose une amnésie, laquelle est visible dans nos comportements (que ce soit notre nervosité, notre désespoir, notre manque de communication) ou dans la défaillance culturelle catastrophique dans laquelle nous vivons ». Oublier, c’est tomber petit à petit dans le cercle perfide du mensonge, c’est se créer sa propre « ceinture de feu ». Le réalisateur compare Beyrouth et sa population à La Peste de Camus : « Ils ont les mêmes ennemis invisibles, terrés, prêts à bondir et à tuer. À la manière des rats, porteurs de peste, le mal inexorable ronge petit à petit, une à une, la vie, la mémoire, l’humanisme, la compassion, l’entendement de tous les citoyens », ajoute le réalisateur.
Le film de Bahij Hojeij est une prise de conscience, une sonnette d’alarme contre cet oubli et ce refoulement. « Je ne voulais pas faire un film sur la guerre pour parler de la guerre uniquement. Je voulais parler de la guerre à partir d’aujourd’hui, c’est-à-dire après 12-13 ans de paix (…) car nous vivons le prolongement de cette guerre- là, de ses séquelles, et dans le film tout cela est clair. »
Zennar el-nar agit violemment sur le spectateur et produit un effet boomerang ; s’il est le reflet, personnel certes mais honnête, du réalisateur vis-à-vis de la société libanaise actuelle, de ses maux psychiques, il offre également une solution : parler. « C’est un film sur la mémoire, souligne-t-il, mais dans le sens positif. Il ne s’agit pas de la nostalgie de la guerre. L’idée est que les gens se voient et se reflètent dans ce miroir (…). La jeune génération a besoin de comprendre ce qui s’est passé ». Le film est une découverte, un moyen d’entrer en contact avec la guerre dans le sens humain et émotionnel du terme.
Témoignage touchant et profond sur la complexité ainsi que la faiblesse de l’âme humaine durant la guerre, Zennar el-nar atteint dignement son objectif : il parle au spectateur et dégage clairement son message. Les thèmes forts et importants sont transmis et défendus avec brio par des acteurs dont l’excellent jeu participe largement à maintenir le niveau élevé du film et à donner une crédibilité à l’histoire. Chacun vit pleinement son rôle, que ce soit le professeur Chafic (Nida Wakim), le concierge (Hassan Farhat), la femme en deuil (Liliane Younès) ou la femme atteinte de zona (Julia Kassar).
La qualité de la lumière ainsi que de l’image permet au spectateur de s’imprégner facilement de l’esprit de l’époque. Tout cela est accompagné d’une musique envoûtante qui colle parfaitement au ton général puisqu’elle reflète tous les sentiments vécus par les personnages : la peur, l’espoir, le désespoir, la tristesse, etc.
(Sortie prévue le 15 janvier 2004)

Dyma DEMIRDJIAN

Fiche technique

Réalisateur et scénariste : Bahij Hojeij.
Image : Maxime Héraud.
Montage : Gladys Joujou.
Musique : Vatche Kalenderian.
Décor : Nabil Salamé.
Son : Mouhab Chanesaz.
Coproduction : On Line Film-Beyrouth, Dark Side Production, CKP Management, Portrait et Cie (France).
Producteur exécutif : Marwan Tarraf.
Acteurs : Nida Wakim, Hassan Farhat, Bernadette Hodeib, Julia Kassar, Abdalla Homsi, Lilian Younès, Fouad Hojeij, Leila Hakim, Élias Élias, Hosni Moussa, Raymond Hosni.
C’est en présence d’une salle comble et enthousiaste, ainsi que de nombreuses personnalités, telles que l’ambassadeur et chef de la délégation de la Commission européenne Patrick Renauld et le réalisateur Bahij Hojeij, qu’a eu lieu, dimanche 7 décembre à l’Empire Sofil, la première mondiale du film «Zennar el-nar», une adaptation libre du roman «L’Obstiné» de Rachid...