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Certaines forces miseraient sur des changements régionaux De sourdes dissensions commencent à saper l’unité des Libanais

Les Libanais sont rassurés quand ils entendent le président Lahoud déclarer qu’« il n’y a pas de crainte à se faire pour le Liban car c’est un pays stable, sans armes de destruction massive, sans fondamentalisme ni extrémisme ». Mais l’unité manifestée avant, puis pendant, la guerre en Irak commence à s’ébrécher. En effet, une certaine minorité locale mise sur des changements profonds consécutifs à la deuxième guerre du Golfe. Des modifications qui affecteraient, ou qui bouleverseraient, les rapports de force traditionnels, régionaux et locaux. Le courant en question espère accéder de la sorte au pouvoir de décision. Ou, à tout le moins, se voir insuffler suffisamment d’influence pour contester la présente suprématie de la majorité. Une division, une césure qui n’irait évidemment pas sans provoquer des secousses sur le plan intérieur. Pour lutter contre cette tendance, les partis et autres composantes de la majorité doivent serrer les rangs. Et en appeler au concours de Bkerké, haut lieu de sagesse toujours empreint du concept de mission historique nationale. Ainsi, c’est grâce au patriarcat que Taëf avait pu voir le jour, mettant fin à la guerre domestique. Sans les positions du cardinal Sfeir, la légalité n’aurait pas pu venir à bout du règne des milices et n’aurait pas pu, non plus, organiser l’élection d’un président de la République. C’est dans la logique de cette attitude constructive que s’inscrit le manifeste historique des évêques maronites sur l’Irak. Document qui a eu tant de retentissement au-dehors comme à l’intérieur, en dissipant toute équivoque. Il faut donc consolider le front libanais, en contrant ceux qui parient sur les USA, à la lumière des menaces croissantes que cette puissance adresse à la Syrie. Les minoritaires espèrent que ces coups de semonce répétés finiront par affaiblir la Syrie. Qu’elle cessera de pouvoir dicter sa ligne au Liban, ou de s’armer du jumelage pour mieux faire face aux défis qu’elle affronte. L’alliance organique entre les deux pays protège le Liban et renforce la Syrie. Il est donc nécessaire de veiller à ce que cette communion de sort, partagée depuis plus de vingt ans, ne soit pas sciée. De même, il est évident que l’union réalisée contre la guerre doit être préservée. Car les divisions (comme jadis sur la présence palestinienne, sur le 17 mai, sur l’accord tripartite ou même sur Taëf) n’ont jamais entraîné que des calamités pour ce pays. Dans l’ère de paix présente, il y a eu des divergences politiques, par exemple sur l’envoi de l’armée au Sud ou sur le repli syrien, mais sans effet sur le terrain. Elles ont d’ailleurs été reléguées au second plan par la guerre contre l’Irak qui a réalisé l’unité des Libanais. Dans la phase qui débute, il y a lieu de craindre que les dissensions ne renaissent. Face aux pressions suivantes : – La mise en demeure potentielle de reconnaître un nouveau régime irakien et d’accréditer de nouveaux diplomates irakiens à la place des actuels. Le Liban devra lier sa décision à celle de la Syrie, comme à celle de la plupart des pays arabes. Les minoritaires pourraient se dresser contre la position officielle. En prônant la reconnaissance d’un nouveau régime irakien, pour que le Liban n’en pâtisse pas diplomatiquement et économiquement. – La réactivation de la revendication relative à la neutralisation du Hezbollah sur le plan militaire, à l’intérieur comme au-dehors, notamment par l’abandon de ses positions frontalières face à Israël. Avec l’exigence corollaire : le déploiement des forces régulières libanaises partout sur le territoire, pour en assumer seules la sécurité. Cette demande risque de diviser les Libanais. La majorité estime en effet que le Liban n’a pas intérêt à se dessaisir de sa Résistance, dont le Hezbollah est la colonne vertébrale, tant qu’une portion du territoire national reste occupée par Israël. – L’exigence d’un désarmement complet des camps palestiniens, pour qu’ils cessent d’être des îlots d’insécurité où se réfugient tous les repris de justice. Cela est rejeté par la même majorité, qui estime que les Palestiniens doivent garder leurs armes tant que leur cause n’a pas été équitablement réglée, le problème du retour compris. – Dans l’éventualité, qui se précise, d’un clivage international mettant aux prises les Anglo-Saxons d’un côté, la France, l’Allemagne et la Russie d’un autre côté, le Liban serait sommé de choisir son camp. C’est là une question qui peut susciter également des divisions intérieures. Car certains peuvent faire valoir que les intérêts économiques, diplomatiques ou sécuritaires du pays lui commandent de se ranger aux côtés de Washington, alors que la Syrie, selon toute probabilité, irait en face. En tout cas, les cercles politiques locaux cités redoutent que le Liban ne paie le prix des tiraillements syro-américains. Pour ces milieux, cependant, la stabilité de ce pays resterait protégée par son alliance avec la Syrie, à condition de savoir préserver de bons rapports avec les USA. Émile KHOURY
Les Libanais sont rassurés quand ils entendent le président Lahoud déclarer qu’« il n’y a pas de crainte à se faire pour le Liban car c’est un pays stable, sans armes de destruction massive, sans fondamentalisme ni extrémisme ». Mais l’unité manifestée avant, puis pendant, la guerre en Irak commence à s’ébrécher. En effet, une certaine minorité locale mise sur...