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Perdu de vue...Le brigadier François Genadry : « La vérité, rien que la vérité ! »(photo)

Il n’a même pas besoin de le jurer ; avec le général brigadier François Genadry, il s’agit et il s’agira toujours de dire la vérité, rien que la vérité, et encore la vérité. C’est un examen ou une interview ? » demande-t-il, à peine assis, la porte bien sûr refermée, certains gestes ne s’oublient pas. « Vous êtes sûre de réussir avec nous ? Vous n’avez pas l’habitude des militaires ! » poursuit-il, semant un moment le doute, avant de lâcher : « Quel âge me donnez-vous ? » Et l’on se détend enfin un peu. Car le brigadier François Genadry, 81 ans et fier de les porter si bien, est un drôle de petit bonhomme qui est, nous avait-on dit, très drôle, même lorsqu’il parle de choses sérieuses. Pour le reste, les sujets graves, il les abordera avec son légendaire franc-parler et un zeste d’amertume. « « Pour vivre heureux, vivons caché. Telle a toujours été ma devise, c’est un peu mon tempérament. J’évite depuis ma retraite, il y a vingt-sept ans, de m’exposer. » Pourtant, ce monsieur fort bavard a, semble-t-il, beaucoup de choses à dire encore, et il le fait rarement. La discussion avec lui ressemble à une leçon d’histoire, à une dictée dont il ne faut pas oublier une virgule. La vérité, toujours la vérité. Une carrière exemplaire « J’ai entamé mes études scolaires chez les jésuites, avant d’être renvoyé de chez eux. Ils disent que c’est par indiscipline ; il y a un peu de vrai, à 13 ans, on a le cerveau dans les pieds ! Je venais de décrocher mon baccalauréat deuxième partie de Antoura lorsque j’ai démarré au quotidien Le Jour en tant que correcteur. » Un peu d’argent de poche, un peu d’expérience, mais pas d’avenir. Le jeune François apprend la sténo-dactylo, tente de se présenter à un examen d’entrée à la faculté de médecine, annulé en dernière minute pour cause de guerre, et le voilà qui tombe sur une annonce, «un avis aux candidats à l’école militaire de Homs. Je répondais aux conditions requises, être Libanais et bachelier, être francophone et quelque peu francophile.» « Écrivez, écrivez », lance-t-il. « Le choix de ma carrière militaire, je l’attribue spécialement à mon amour pour le scoutisme, qui nécessitait une résistance physique énorme, de la volonté, de la ténacité, à ne pas confondre, écrivez, avec de l’entêtement. » À sa sortie de l’école militaire, il est affecté au troisième bataillon de chasses libanais, « considéré déjà par les Français comme un bataillon d’élite. » C’est en 1948, « un passage obligé dans ma carrière » et lors de la bataille du plateau de Melkieh, que le jeune militaire se distingue par ses qualités et son courage. « Quinze jours après, j’ai été nommé aide de camp du général Chéhab, c’est-à-dire chef de cabinet du commandant de l’armée. » Le reste, l’histoire et le général les retiendront. Un brevet d’officier d’état-major, obtenu en France, et des titres, chef du deuxième bureau, provisoirement, puis chef du troisième bureau et, enfin, en 1958, durant le mandat du président Chéhab, commandant de l’école militaire et directeur des études. « Je devinais la moindre de ses pensées, il n’était pas difficile à comprendre, il était simple, ferme et bienveillant, des qualités de chef. » À la création du pacte de défense commune par la Ligue arabe, il fut désigné, comme membre du second bureau, pour appartenir à l’état-major de la défense commune au Caire. « En même temps, j’ai rejoint la faculté de droit. J’ai obtenu une licence en droit public au bout de quatre ans et à … 46 ans ! » En 1966, le colonel Genadry, commandant de l’école militaire, prend en charge la création d’une école militaire pour sous-officiers, à Baalbeck, dont il prendra le commandement. Suite du palmarès, deux années de formation en France dont le lieutenant-colonel ramène un brevet de l’école supérieure de guerre, le commandement du secteur sud et enfin le commandement de l’école militaire des officiers pour la troisième fois, et cela jusqu’aux évènements de 1975. « Écrivez, insiste-t-il encore, en majuscule et soulignez, j’ai quitté ma carrière la tête haute, en 1977, malgré l’ingratitude de l’État qui nous a obligés à démissionner, à l’époque où nous étions en pleine vigueur physique et ardeur morale. » Une vigueur qui demeure, puisque « tous les matins, je cours 50 minutes. » Plus encore : depuis 1978, ce champion de l’armée du 1 500 mètres et champion de boxe poids coq en 1946 participe chaque année à la course internationale des vétérans qui a lieu quelque part dans le monde. « C’est moi qui ai fait entrer le Liban dans l’association, en tant que membre fondateur. Dans cette course, il ne s’agit pas de gagner mais de terminer la course, même en marchant. Cette année, nous partons pour Porto Rico.» Alors, comme pour confirmer tout ce qu’il a dit durant ces deux heures d’entretien, il nous tend un papier : « Je l’ai distribué à tous mes officiers », sur lequel il reprend la phrase de Foch : « Commander est l’art de faire de son but personnel un idéal pour les autres. » En rajoutant ses trois principes de vie : « la prière, le livre et le sport » avant de conclure : « À cœur vaillant rien d’impossible… » Carla HENOUD
Il n’a même pas besoin de le jurer ; avec le général brigadier François Genadry, il s’agit et il s’agira toujours de dire la vérité, rien que la vérité, et encore la vérité. C’est un examen ou une interview ? » demande-t-il, à peine assis, la porte bien sûr refermée, certains gestes ne s’oublient pas. « Vous êtes sûre de réussir avec nous ? Vous n’avez pas...