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Doutes à Beyrouth sur l’utilité d’un sommet arabe

Qu’ils s’accordent ou non sur la tenue d’un sommet, que peuvent faire les Arabes pour empêcher une guerre contre l’Irak, se demande à Beyrouth un ancien ministre des Affaires étrangères. La même question, précise-t-il, se pose pour l’Union européenne. D’autant que les USA proclament qu’ils ont le soutien de 12 pays arabes et que l’Europe est derrière eux, à l’exception du trio France-Allemagne-Belgique. Les régimes arabes n’étant pas d’accord, un sommet n’aurait pas de sens. Encore qu’il soit sans doute possible de parvenir à une déclaration minimale. Qui, par exemple, soulignerait un engagement commun de préserver l’unité territoriale de l’Irak mais aussi la sécurité du Koweït, en rejetant l’idée d’une guerre et en invitant Bagdad à coopérer pleinement avec les inspecteurs dans le strict respect de la 1441. Les Arabes pourraient également répéter qu’il faut vider la région tout entière des armes de destruction massive, en insistant sur l’arsenal israélien. Et en réclamant un arrêt des agressions israéliennes contre le peuple palestinien. Mais cette plate-forme de pure forme n’influerait évidemment en rien sur la décision de Washington de lancer ses armées contre Saddam Hussein. D’autant que le point principal de friction entre les Arabes reste que certains d’entre eux offrent des facilités militaires ou logistiques aux Américains, et ne sont pas prêts à y renoncer pour les beaux yeux d’un Irak qu’ils considèrent comme étant une menace pour eux-mêmes. Ces mêmes pays n’acceptent aucune résolution qui affirmerait que toute attaque contre l’Irak serait considérée comme dirigée contre l’ensemble du monde arabe. Dès lors, pour cet ancien ministre des Affaires étrangères, les Arabes ne peuvent marquer des points qu’en se focalisant sur la question palestinienne. Ils demanderaient aux USA de faire cesser les agressions israéliennes et d’engager une solution équitable fondée sur la création d’un État palestinien. Quant aux Européens, leur situation est semblable à celle des Arabes, c’est-à-dire qu’ils sont divisés. La France peut certes user de son droit de veto aux Nations unies contre un projet de résolution autorisant la guerre. Mais Washington doute que son alliée aille jusque-là et pense que Paris se contenterait sans doute d’un bulletin blanc, d’une abstention. Car, ajoute l’ancien ministre, il y aurait certainement de sévères rétorsions américaines, économiques et politiques, à l’encontre de tout pays qui se dresserait contre Washington au Conseil de sécurité. Les Américains ne tolèrent pas qu’un État quelconque tente de sauver Saddam Hussein, comme ils disent. Et il est peu probable qu’une capitale déterminée risque ses intérêts pour aider le régime de Bagdad. D’ailleurs, comme le rappelle l’ancien ministre libanais, si l’Amérique paraît tenir à une légitimation internationale de son action par le biais d’une résolution de l’Onu, certains de ses cadres n’hésitent pas à affirmer qu’on pourrait facilement s’en passer. Ils soutiennent en effet que la 1441 est suffisante, puisqu’elle annonce de « graves conséquences » pour Bagdad en cas de violation irakienne. En fait, en optant pour une deuxième résolution, Washington veut tester l’étendue des résistances françaises et autres puissances à ses plans. Le défi est grand. Le président Chirac a indiqué une issue de secours, en évoquant le départ du raïs irakien. Même si cet objectif ne devait pas être atteint, il est clair que Paris a su par ses positions se concilier le monde arabe et promouvoir ses intérêts dans la région. Claude Cheysson, ancien chef de la diplomatie française, soulignait dans un récent article que la France peut s’élever contre les injustices qui découlent parfois de la politique US, mais n’est pas toujours en mesure de contrer cette ligne, de la détourner de ses buts. Il ajoute que les Européens ne partagent pas les mêmes vues géopolitiques ou économiques, mais qu’ils sont mieux placés sur le plan relationnel que les Américains en ce qui concerne le Moyen-Orient. À son avis, la présence militaire US dans cette région ne se justifie plus depuis l’effondrement de l’URSS. Et il prévoit des tensions entre l’Amérique et l’Europe jusqu’à ce que la Maison-Blanche adopte une politique plus raisonnable. Pour Cheysson, en effet, les Européens ont payé un certain prix à cause des options US au Moyen-Orient et leurs intérêts dans cette région s’en sont ressentis. Ils se trouvent de plus exposés à des opérations subversives. Il souhaite que l’Europe ait plus de poids, pour que les États-Unis et Israël cessent de faire la décision dans cette contrée essentielle du monde. L’ancien ministre français voudrait, enfin, que les Arabes et les Européens s’entendent sur l’Irak, sur son rôle, sur son droit de vivre, notant que les Américains ont établi des bases dans le nord de ce pays pour en menacer la souveraineté. Émile KHOURY
Qu’ils s’accordent ou non sur la tenue d’un sommet, que peuvent faire les Arabes pour empêcher une guerre contre l’Irak, se demande à Beyrouth un ancien ministre des Affaires étrangères. La même question, précise-t-il, se pose pour l’Union européenne. D’autant que les USA proclament qu’ils ont le soutien de 12 pays arabes et que l’Europe est derrière eux, à...