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Femmes - Chantal Farra Awwad et l’infiniment petit(photo)

C’est « l’infiniment petit, juste après le néant » qui a passionné Chantal Farra Awwad et qui l’a précipitée, études et recherches, dans le monde infiniment grand de la génétique. Plus on avance dans les recherches, plus on se sent petit et plus on sent la grandeur de quelque chose qui peut être Dieu. » La personne qui s’exprime en ces termes n’est pas une philosophe mais une scientifique à qui la recherche médicale a imposé des réflexions ; une jeune femme réservée et silencieuse, que l’on a arrachée un moment au monde dans lequel elle évolue comme un poisson dans l’eau pour mieux comprendre son parcours. Chantal Farra Awwad a pourtant la tête bien ancrée sur les épaules fines. C’est à travers un microscope de laboratoire qu’elle voit le monde, qu’elle fouille les êtres humains, leur histoire ; qu’elle cherche des solutions, qu’elle trouve, longtemps après, quelques réponses qui posent à leur tour de nouvelles questions mais aussi de nouvelles perspectives. La médecine et la recherche sont les univers dans lesquels elle s’épanouit et réussit depuis quelques années. Mais pourquoi avoir choisi la médecine, elle qui semble légèrement pâle, presque fragile ? « C’est un peu par défi. J’étais la quatrième fille, celle qui n’est pas très désirée. Il y avait la guerre et j’étais une mauvaise élève, plongée dans ses livres. Je voulais prouver à ma mère que la “brebis galeuse” pouvait réussir. » Détrompons-nous donc, et suivons la brebis, qui n’a que l’air de fragile, dans ses pérégrinations. Curieuse de tout Suivons-la dans ses études de médecine à l’USJ, puis à l’Université d’Aix-Marseille, à l’Institut Gustave Roux, Villejuif et enfin à l’Université René Descartes, Hôpital Necker, à Paris où elle choisit de se spécialiser en génétique médicale. Au cours de ces cinq années, elle y rencontrera le professeur Lejeune, qui a découvert la trisomie 21, et le professeur Mattei, qui fut un des précurseurs de la spécialité de génétique médicale. « J’ai toujours été fascinée par la création. Très jeune, déjà, je me demandais comment l’être humain était créé. À partir de rien, mais c’est quoi, ce rien ? J’avais une curiosité de tout, je voulais imaginer ce rien et je pensais que la génétique pouvait m’offrir des réponses. » En décembre 2000, alors qu’elle est acceptée en tant que chercheuse à l’Université de Harvard, à Boston, « c’était très compétitif, nous étions quatre chercheurs sur ce projet et j’étais la seule étrangère », Chantal remporte le « Women in Science Prize » décerné chaque année par l’Unesco et L’Oréal à dix femmes scientifiques choisies de cent pays différents. Sa bourse sous le bras et une intime fierté dans le cœur, elle vivra cette année de recherche comme une étape essentielle dans son évolution personnelle et professionnelle. « Notre travail a contribué à compléter et comprendre la carte du génome. Il s’est axé sur les gènes de développement et notamment ceux qui concernent les anomalies de naissance. » Chantal a pu localiser deux régions responsables de certaines anomalies, « la dysgénésie gonadique et l’anomalie du tractus urinaire. » Les événements de septembre 2001 viendront un moment semer le trouble chez elle, seule étrangère, « et Libanaise de surcroît », à travailler et, plus encore, vivre dans ce laboratoire. « C’est un peu comme si je les avais moi-même agressés. » Au bout d’une année passionnante et depuis quelques mois, Chantal Farra, devenue Awwad, est rentrée au pays retrouver son époux et le milieu hospitalier qui lui manquait. « J’ai eu besoin de retourner au diagnostic clinique qui peut apporter des réponses immédiates. » Elle ajoute : « Actuellement, le projet qui m’intéresse concerne le diagnostic pré-implantatoire, fait sur les embryons de quatre à six semaines et qui permet de déceler des maladies génétiques. » Ce projet, qu’elle espère installer dans un hôpital libanais, devrait se faire en collaboration avec l’hôpital Necker, qui propose d’offrir matériel et support intellectuel. Dans l’attente d’une décision finale qui ne devrait pas tarder, Chantal donne des conférences, prépare diverses publications et se pose encore plus de questions qui, loin de l’angoisser, la comblent de bonheur. « La génétique pourrait être une réponse à beaucoup de choses », conclut-elle, comme pour se rassurer ou nous rassurer. Carla HENOUD
C’est « l’infiniment petit, juste après le néant » qui a passionné Chantal Farra Awwad et qui l’a précipitée, études et recherches, dans le monde infiniment grand de la génétique. Plus on avance dans les recherches, plus on se sent petit et plus on sent la grandeur de quelque chose qui peut être Dieu. » La personne qui s’exprime en ces termes n’est pas une philosophe mais...