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Actualités - REPORTAGES

Parcours - Je ne peux aller contre ma conscience. Jamais Toute une circonscription, et son homme : Pierre Hélou (photo)

«Je ne peux pas aller contre ma conscience. Jamais». Tous ceux qui le connaissent le savent. Et le plus neutre des exégètes de la vie politique libanaise aussi. Pierre Hélou est un homme désintéressé. Fidèle, constant, incontournable et rassembleur. Et libre, libre surtout. Libre parce qu’il a toujours refusé les propositions – toutes les propositions, lorsqu’elles allaient à l’encontre de sa conscience, du but qu’il s’est fixé, de la ligne directrice qu’il s’est constamment efforcé de suivre, dans un pays où l’inconstance et les retournements de veste sont presque génétiques. Pierre Hélou a été le poulain de Kamal Joumblatt qui l’a lancé en politique, au début des années 70, un des premiers collaborateurs et ami, de l’imam Moussa Sadr, avec lequel il a fondé le Mouvement des déshérités. Il a surtout été, il est et il restera l’ardent défenseur, le protecteur constant de tous les chrétiens, ceux de la Montagne notamment. Le fait est qu’il a de tout temps été celui des musulmans. Aussi. Et dès 1975, lorsque tout le monde commençait à devenir fou, lorsque le Liban n’était plus que tourments et excès, lorsqu’au Liban la règle de vie ne se résumait que par le «tue ou sois tué», Pierre Hélou restait le même : l’homme de toutes les modérations. L’indéfectible soutien des uns et des autres. «Je ne peux pas aller contre ma conscience. Jamais». Pierre Hélou a été élu député de Aley, pour la première fois, en 1972. La même année, il créait, sous l’égide du président Saëb Salam, le premier ministère de l’Industrie et du Pétrole. L’industrie a toujours été son domaine de prédilection, à Pierre Hélou… En 1988, le président Amine Gemayel lui a demandé de former le gouvernement transitoire qui était appelé à élire le futur président de la République. C’est ce que le général Fouad Chéhab avait fait, en 1952, pendant 4 jours. Il est ainsi désigné, malgré lui, comme l’un des quatre candidats possibles à la plus haute magistrature de l’État. Pierre Hélou a été le premier choix du président Gemayel, il fallait que ce gouvernement de transition soit particulièrement équilibré, et déjà, «l’artisan rassembleur»* était appelé par et pour la chose publique. Sauf que personne ne l’a aidé, il s’est ainsi récusé. Pierre Hélou n’a jamais été l’homme des compromissions. «Je ne peux pas aller contre ma conscience. Jamais». En 1989, à la suite de l’assassinat du président René Moawad, à l’élection de qui il avait participé activement, Pierre Hélou est sollicité de toutes parts pour prendre le relais. Hussein Husseini, Sélim Hoss, Abdel Latif el-Zein, sans compter Abdel Halim Khaddam, entre autres, l’ont exhorté à accepter le plus haut poste de l’État. «Tu dois accepter», lui avait répété le président Hoss. «Sauf que Pierre Hélou, explique l’un de ses proches, avait compris l’affrontement qui allait inéluctablement se produire avec Michel Aoun, et il a dit non. Je n’ai jamais tiré sur un oiseau», avait-il répondu à Sélim Hoss, lequel lui avait alors rétorqué : «Tu sais Pierre, moi je n’en ai même pas mangé, d’oiseaux…» Le désintéressement de Pierre Hélou à son paroxysme… En 1992, et alors que l’Est politique refuse, dans sa très grande majorité, la participation aux élections législatives, Pierre Hélou comprend que le boycottage était suicidaire pour les chrétiens, il se porte candidat et il est élu. Il s’est présenté au nom de son leitmotiv, de son credo de toujours, son cheval de bataille : le retour des déplacés de la montagne. Et à l’époque, Pierre Hélou était en excellents termes autant avec Walid Joumblatt qu’avec Talal Arslane. Il a été, du temps où le seigneur de Moukhtara détenait le portefeuille des Déplacés, le président de la commission parlementaire pour ces mêmes déplacés. Et c’est à partir de là que ses relations avec Walid Joumblatt vont aller en se détériorant. Interviewé par L’Orient-Le Jour il y a de cela une vingtaine de jours, Pierre Hélou n’a pas été par quatre chemins. «On a dilapidé l’argent de la Caisse des déplacés et politisé leur retour, et ça c’est la faute de Walid Joumblatt». Pierre Hélou s’est toujours senti responsable, et l’a constamment été, de tous les gens de la Montagne, quelle que soit leur confession. Sauf qu’en 1996, il n’était plus question d’alliance avec le chef du PSP. Et Pierre Hélou s’est présenté seul avec Fouad el-Saad et Marwan Abou-Fadel aux élections législatives. Contrés par une coalition d’intérêts, puissamment soutenue par le gouvernement de l’époque, celui de Rafic Hariri, le trio est battu. L’iniquité est flagrante et Pierre Hélou, comme la grande majorité de la circonscription de Baabda-Aley, aura une revanche à prendre. «Je ne peux pas aller contre ma conscience. Jamais». Pour les élections d’août 2000, Pierre Hélou démissionne de la présidence de la Ligue maronite qu’il avait réformée. Cette fois-là, les cazas de Baabda et de Aley sont réunis en une seule et même circonscription. Pierre Hélou, de son fief de Baabda – il est député de Aley pendant 24 ans – a réussi haut la main la gageure de rassembler autour de lui, aux côtés de l’émir Talal, le courant arslaniste (Ghaleb el-Awar), le PSNS (Mahmoud Abdel Khalek et Antoine Khalil), le mouvement Amal (Salah Haraké), le courant hobeïkiste (Jean Ghanem), le Hezbollah (hajj Ali Ammar) et Pierre Daccache, ainsi que son ancien colistier, Marwan Abou-Fadel. Et c’est cette liste qui croisera le fer dans quatre jours avec celle, parrainée par Walid Joumblatt et appuyée par Rafic Hariri, le Bloc national et les Kataëb. «Je ne peux pas aller contre ma conscience. Jamais». Pierre Hélou est sans aucun doute l’homme de toute une circonscription, et l’an 2000 celui de la consécration de ces idées ?
«Je ne peux pas aller contre ma conscience. Jamais». Tous ceux qui le connaissent le savent. Et le plus neutre des exégètes de la vie politique libanaise aussi. Pierre Hélou est un homme désintéressé. Fidèle, constant, incontournable et rassembleur. Et libre, libre surtout. Libre parce qu’il a toujours refusé les propositions – toutes les propositions, lorsqu’elles...