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Actualités - OPINION

Un article de Ghassan Tuéni dans le Figaro du 1er mars Lionel Jospin a oublié le Liban

Faut-il penser que l’investissement israélien de M. Lionel Jospin a rapporté une journée de calme relatif aux Libanais ? Hier, l’aviation israélienne a repris ses raids quotidiens sur les villages paisibles de l’Iqlim el-Touffah (lire : Le pays des pommiers) sans arriver à faire de victimes. Juste quelques maisons détruites et des vergers brûlés. Et pourtant, le vociférant ministre des Affaires étrangères, M. David Lévy, continuait sa harangue : il faut «brûler la terre du Liban», il faut rendre «sang pour sang, enfant pour enfant»! Mais où sont les enfants d’Israël tués par la Résistance libanaise que M. Lévy veut venger ? Il a mauvaise mémoire, M. Lévy, et de surcroît, il est mauvais comptable, dangereusement mauvais. Car les derniers enfants qu’il eût fallu venger sont ceux que ne cesse d’assassiner Israël, déterminé à semer en terre libanaise ses Raisins de la colère jour après jour, depuis l’holocauste de Cana, le 18 avril 1996. Fallait-il, pour les venger, que les étudiants de Bir-Zeit aillent à l’école de terrorisme d’Yitzhak Shamir (voir ses Mémoires), pour apprendre comment l’on pend des soldats aux oliviers de Gethsémani jusqu’à ce que mort s’ensuive? Ou encore leur faire lire les récits israéliens de l’extermination de la population de Deir Yassin, ou ceux de la tuerie de Sabra-Chatila ? Or, depuis avril 1996, c’est au droit des gens, à la légalité internationale, et non à la loi du talion, que le Liban, Résistance comprise, a fait confiance. Le comité international de surveillance qui fut alors constitué, c’est à la perspicacité et à la persévérance de la diplomatie française que nous le devons. La participation de la France que le Liban a exigée était plus qu’une marque de confiance : une garantie, une assurance de justice. Ce comité du recours, une étape vers la paix, est aujourd’hui menacé par le refus d’Israël d’y participer. Un refus auquel – et c’est là le plus grave – le Premier ministre français semblait donner son aval, avec une ignorance totale des faits et des règles qui régissent un statu quo relativement paisible ; règles que la Résistance libanaise – dite «terroriste» – avait strictement observées. «Et toi aussi Brutus ?», étions-nous tentés de crier. L’heure n’est plus aux récriminations. Rien ne sert de continuer à rappeler à M. Jospin le souvenir de Jean Moulin et son exemple, moins encore de lui rappeler le geste historique du général de Gaulle à la suite des bombardements de l’aéroport de Beyrouth en 1968. Ni même que François Mitterrand avait reconnu à la Résistance sa signification historique, en recevant Yasser Arafat à l’Élysée bien avant qu’il n’ait signé des accords de paix. Aujourd’hui, c’est au président Jacques Chirac que le Liban tout entier s’adresse pour que la France demeure fidèle à elle-même et à la mission historique qu’elle s’est assignée au Moyen-Orient. Une mission – les Libanais ne l’oublieront jamais – que le président avait d’ailleurs déjà définie avec fermeté et rigueur, dans le discours prononcé à Beyrouth. De plus, sa conférence magistrale à l’Université du Caire a pour nous valeur de charte. Au moment où se dessine une paix dont dépendra l’indépendance du Liban, voire son existence, la France se doit d’être présente, nous l’espérons aujourd’hui plus efficace que jamais, forte par une détermination que ne sauraient ébranler des états d’âme obscurs ou les vicissitudes de la politique politicienne. Les Libanais demeurent à l’écoute de la France, car il ne sert plus de sauver le comité d’avril 1996. Il faut aller au-delà. Au-delà de la comptabilisation des victimes et de leurs vengeances, vers un régime de droit : il faut, une fois pour toutes, empêcher Israël de prétendre défendre ses frontières en détruisant celles du Liban, en occupant sa terre que l’on ne cesse de vouloir brûler. Y a-t-il plus grande hérésie que de s’arroger ce droit et de combattre jusqu’à les exterminer tous ceux qui osent y résister ? La Résistance du Liban n’est-elle pas rendue ainsi légitime et naturelle ? Elle ne cessera que quand cessera l’agression. Tant que ne sera pas rétablie la souveraineté du Liban, du Liban seul, jusqu’à ses frontières internationalement reconnues et garanties, la violence – faut-il vous l’apprendre M. Jospin – ne servira qu’à perpétuer la violence. Une violence rendue ainsi légitime et qu’aucune frontière, nulle part, ne saurait contenir. Hier, Bir-Zeit, demain ... qui sait ?
Faut-il penser que l’investissement israélien de M. Lionel Jospin a rapporté une journée de calme relatif aux Libanais ? Hier, l’aviation israélienne a repris ses raids quotidiens sur les villages paisibles de l’Iqlim el-Touffah (lire : Le pays des pommiers) sans arriver à faire de victimes. Juste quelques maisons détruites et des vergers brûlés. Et pourtant, le...