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Actualités - ANALYSE

UNIVERSITÉ - L’élimination des sections II, véritable pomme de discorde Le projet de réunification de certaines facultés de l’UL pourrait être mis en veilleuse

L’existence de plus d’une section régionale au sein des principales facultés de l’Université libanaise est-elle incompatible avec l’unité et la cohésion interne de l’université nationale ? Cette question est depuis plusieurs mois au centre d’un vaste débat dans plus d’un milieu universitaire et politique. Le dossier de la décentralisation de l’UL constitue dans le contexte présent l’une des pommes de discorde entre les principales fractions locales. D’aucuns prétendent que ces sections vont à l’encontre de l’unité de l’UL à laquelle toutes les parties se déclarent attachées. D’autres affirment, par contre, qu’il n’existe aucun lien entre l’unité de l’université et l’existence de sections régionales qui constituent une source indéniable de richesse culturelle et pédagogique. Sans compter que le maintien de ces branches correspond parfaitement au principe de décentralisation auquel aspire l’État libanais lui-même, conformément d’ailleurs au document de Taëf. Les différentes sections de l’UL ont été créées dans une première étape dans les régions Est, à la suite des premiers combats de 1975. Elles ont rapidement dépassé le cadre de la zone Est et se sont étendues au fil des ans aux régions périphériques du pays. Elles ont acquis au cours des dernières années une légitimité populaire et ont été reconnues légalement par les gouvernements qui se sont succédé depuis le début de la guerre. Des budgets spéciaux leur ont été ainsi alloués. Récemment, les directeurs des sections II (traditionnellement appelées, dans le jargon populaire, les sections de l’Est, c’est-à-dire des régions chrétiennes), ont été conviés à une réunion extraordinaire pour débattre de la volonté du recteur de l’université, M. Assaad Diab, de procéder à la réunification des facultés d’information, de sciences médicales et de pédagogie. Cette question de la réunification des sections, qui ne concerne en fait que celles de l’Est, est remise sur le tapis périodiquement. Le recteur de l’UL n’a jamais fait paraître le moindre communiqué explicitant son point de vue sur le sujet. Idem de tous les ministres de tutelle qui se sont succédé depuis les années 90 au pouvoir. Sachant combien ce dossier est délicat et sujet à controverse, ils ont préféré s’en remettre à ce propos au recteur. Ce dernier semble manœuvrer sur ce plan au gré des pressions exercées d’un côté comme de l’autre. Tout ce qui se dit ou s’écrit en la matière émane uniquement soit des représentants de partis ou mouvements, soit des représentants des enseignants ou des étudiants. Et dans ce cadre les positions sont claires : à l’Est, la mobilisation parmi les partis chrétiens est permanente pour maintenir un statu quo qui finalement dure depuis près d’un quart de siècle. À l’Ouest, les détracteurs des sections de l’Est multiplient les démarches en direction du rectorat pour l’amener à trancher cette situation, estimant que ces sections sont «incompatibles» avec les statuts centralisateurs de l’université. Amal et les Kataëb Tant que le pays était divisé de facto, le problème de la réunification des sections de l’UL restait en dehors de tout débat politique ou administratif. Les premiers à avoir engagé les «hostilités» ont été les représentants du mouvement «Amal», qui ont fait de ce sujet un de leur cheval de bataille durant de nombreuses campagnes électorales syndicales au niveau des étudiants et au niveau des professeurs. En face d’eux, ils ont toujours trouvé, entre autres, les représentants du parti Kataëb qui continuent à jouer, avec d’autres partis chrétiens, un rôle déterminant à ce niveau malgré les diverses difficultés qu’il connaît. De cette confrontation entamée au début des années 90 est né un dialogue que les deux formations ont engagé sans résultat, car il a achoppé sur cette question de la réunification des sections. Les réunions se sont succédé entre les représentants des deux parties dans les locaux de «La voix du Liban». Certains des hauts responsables des deux formations ont mis la main à la pâte pour essayer de dégager un consensus qui ménagerait la chèvre et le chou. On avait cru à un certain moment qu’un accord allait se dégager et qu’un document écrit allait être signé ralliant les représentants d’Amal au point de vue des Kataëb. Mais les délégués d’Amal, pressés par leur base, ont préféré faire machine arrière à la dernière minute. Depuis lors, les batailles autour de cette question se succèdent : à chaque rumeur qui surgit, les deux camps se mobilisent, le rectorat se replie tactiquement pour tenter, quelque temps après, une nouvelle initiative et ainsi de suite. Nouvelles donnes Les trois dernières années ont révélé que cette question qui divise la base sème aussi la discorde au sommet de la hiérarchie universitaire. Lors d’un des débats houleux au sein du conseil de l’université – instance regroupant les doyens, les représentants des facultés et les représentants du corps professoral – plusieurs doyens se sont déclarés opposés à toute idée de réunification qualifiant cette question de «ligne rouge». La cassure au sein du conseil de l’université est identique à celle, omniprésente, au niveau de la base estudiantine et professorale. L’actuel président de la Ligue des professeurs à plein temps de l’Université libanaise, M. Bahije Rahbane, est un fervent partisan du maintien des sections II. Cette position, il n’a pas manqué de la communiquer au recteur de l’université qui, d’après des sources bien informées, a trouvé bon d’en tenir compte. M. Rahbane entend camper sur sa position tout au long de son mandat, c’est-à-dire pendant deux ans au cours desquels il est fort à parier qu’on ne parlera pas de réunification pour ne pas briser un équilibre déjà fort fragile au sein de l’université. En tout état de cause, une décision d’une telle importance concernant le sort de certaines sections ne peut-être prise à l’ombre d’un conseil de l’université amputé de presque la moitié de ses effectifs, ce qui est le cas actuellement pour le conseil de l’UL. En effet, depuis juillet dernier, nombre de doyens sont arrivés à la fin de leur mandat et le ministre de tutelle d’alors, M. Mohammad Youssef Baydoun, n’a pas présenté au Conseil des ministres un projet pour la nomination de nouveaux doyens. De ce fait, le conseil de l’université n’est plus opérationnel au stade actuel. Reste à savoir comment évoluera la situation sur ce plan. Jusqu’à quand ce dossier du statut de certaines facultés va-t-il continuer à perturber le travail et les esprits ? Plus d’une partie est convaincue du fait que ce problème ne peut être dépassé qu’à travers la tenue d’assises générales qui traceraient les grandes lignes d’une refonte générale de l’Université nationale. Car pour les défenseurs de cette thèse, l’UL fait face à plus d’un problème et il serait souhaitable qu’un grand chantier soit ouvert pour essayer de trouver des solutions qui placent l’université sur les rails d’une profonde réforme, au lieu de la confiner dans le cadre étroit de certaines revendications à fortes consonances politico-confessionnelles. C’est en définitive, en s’engageant sur la voie de larges concertations avec toutes les parties concernées que le recteur pourrait mener à bien l’entreprise de réforme au sein de l’université nationale. Louis HONEÏNÉ
L’existence de plus d’une section régionale au sein des principales facultés de l’Université libanaise est-elle incompatible avec l’unité et la cohésion interne de l’université nationale ? Cette question est depuis plusieurs mois au centre d’un vaste débat dans plus d’un milieu universitaire et politique. Le dossier de la décentralisation de l’UL constitue dans le...