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Actualités - ANALYSE

RÉTROSPECTIVE 2002 ÉCONOMIE - Paris II a permis d’éviter le pire Une année en forme de montagnes russes

Paris II, c’était l’Arlésienne. La conférence a finalement eu lieu grâce à une conjoncture géopolitique favorable au point que sa tenue même, fin novembre, a été considérée comme une entrée en convalescence. Le Premier ministre a obtenu des prêts à des taux subventionnés, destinés à réduire le coût de la dette (actuellement de 12 % en moyenne) ainsi que des fonds pour financer des projets de développement. Le tout représente un peu plus de quatre milliards de dollars. Le choix des « amis du Liban » a clairement été d’empêcher le pays de tomber dans une crise qui aurait été inévitable sans injection rapide de liquidités. Car le Trésor doit faire face à des échéances importantes en 2003 qu’il aurait été très difficilement en mesure d’honorer, les banques, ses principaux créanciers, ayant décidé au cours des derniers mois de lui dispenser des financements au compte-gouttes et la Banque centrale, qui a pris leur relais, étant quasiment arrivée à la limite de ses possibilités en termes de monétisation de la dette. Paris II représente donc une bouffée d’air après une année 2002 pendant laquelle le Liban a bien failli tomber dans le gouffre. Au printemps dernier, tous les voyants étaient au rouge. La balance des paiements était déficitaire de plus d’un milliard de dollars fin avril, la Banque centrale dépensait des millions de dollars sur le marché des changes pour soutenir la livre, tout en augmentant considérablement son portefeuille de bons du Trésor pour financer le déficit budgétaire. Puis, la saison estivale aidant, la situation monétaire s’est progressivement redressée, la balance des paiements redevenant opportunément excédentaire à la veille de la conférence des bailleurs de fonds. Le Liban doit ce retournement inespéré – qui aurait contribué à obtenir la « neutralité » du Fonds monétaire international, se plaît-on à dire dans les milieux proches du Premier ministre – à l’effet combiné de la baisse des taux d’intérêt sur les marchés internationaux, qui ont rendu d’autant plus attractifs les placements au Liban, et des retombées du 11 septembre sur le comportement des investisseurs du Golfe. L’oxygène de Paris II a déjà commencé à produire son effet dans les poumons du système financier. La baisse des taux d’intérêt va très certainement soulager le Trésor en réduisant le poids du service de la dette en 2003. Mais l’accalmie ne sera que provisoire si des réformes en profondeur ne sont pas adoptées d’urgence. Le plan très vague présenté par le gouvernement à Paris II n’offre, pour l’instant, aucune garantie en ce sens. Il se contente d’afficher des objectifs chiffrés qui, dans la meilleure des hypothèses, maintiendront la dette à un niveau très élevé. Or, comme le souligne un rapport du FMI, les mesures spécifiques prévues pour atteindre ces objectifs ne sont pas détaillées. On ne connaît que certaines grandes lignes : privatisation, titrisation et austérité budgétaire sont les trois variables du plan proposé qui n’a toujours pas fait l’objet d’une discussion en Conseil des ministres, le document de Paris II ayant été adopté les yeux fermés. À cet égard, le bilan de l’année écoulée peut laisser présager le meilleur comme le pire. Le meilleur, avec des avancées sur plusieurs fronts : celui de la réforme du système fiscal, avec l’introduction de la TVA qui devrait être suivie par une révision de l’impôt sur le revenu ; l’informatisation de plusieurs procédures administratives, notamment douanières ; la libéralisation du secteur de l’eau ; la signature d’un accord d’association avec l’Union européenne ; l’ouverture des négociations pour l’adhésion à l’Organisation mondiale du commerce, etc. Le pire, avec le psychodrame du téléphone cellulaire, celui des moteurs à mazout, l’amnistie des clients mauvais payeurs de l’Électricité du Liban, sans compter le maintien du statu quo en ce qui concerne l’administration qui est pourtant la clé de voûte de la réforme de la politique publique… L’inventaire n’est certainement pas exhaustif. Il témoigne simplement du désordre qui règne à la tête de l’État, les décisions étant tributaires de l’état des relations personnelles entre les différents pôles du pouvoir. Méfiance, coups bas, réconciliations plus ou moins provisoires… la gestion à la petite semaine n’est pas à la hauteur du défi auquel le pays est confronté. L’ingéniosité financière de la Banque centrale qui maintient le système à bout de bras, même si les «solutions» trouvées sont particulièrement coûteuses, et les relations internationales du Premier ministre suffisent peut-être à rétablir la «confiance». Mais, au risque de contrarier les professionnels de la méthode Coué, il en faut davantage pour relancer la croissance, redonner aux Libanais le goût d’investir dans des projets productifs (et pas uniquement l’immobilier de luxe et les restaurants branchés), réduire la pauvreté, le chômage, enrayer l’émigration. La stabilisation macroéconomique est seulement un premier pas, en attendant la suite. Sibylle RIZK
Paris II, c’était l’Arlésienne. La conférence a finalement eu lieu grâce à une conjoncture géopolitique favorable au point que sa tenue même, fin novembre, a été considérée comme une entrée en convalescence. Le Premier ministre a obtenu des prêts à des taux subventionnés, destinés à réduire le coût de la dette (actuellement de 12 % en moyenne) ainsi que des fonds pour...