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Actualités - INTERVIEWS

RENCONTRE - Walid Hourani, ce soir, à l’Assembly Hall-AUB * Le pianiste, les chats et les machines(photo)

Il porte un jogging-suit et des tennis. Walid Hourani arrive au rendez-vous tout essoufflé. Le café est bruyant, surchauffé. Il ouvre son porte-monnaie, en sort un petit carton blanc : « C’est un laissez-passer pour l’AUB, cela vous embêterait d’y trouver un endroit plus calme ? ». Impossible de résister à ce sourire désespéré. Dehors, le pianiste libanais le plus célèbre aux States (à San Diego, le 13 avril, c’est sa journée officielle) respire un grand coup. L’homme est transformé. Il se sent visiblement « at home » à la rue Bliss. Le reconnaissant, les étudiants le saluent avec une admiration mêlée de déférence. Le cireur de chaussures lui adresse un sourire complice. « Je le connais bien. Il est fidèle au poste depuis 30 ans. » Campus de l’Université américaine. Un banc, derrière la Jaffet Library, surplombant la mer. Des chats partout. « Ils sont de plus en plus nombreux ici », remarque Hourani. Il en est tout attendri, tout retourné, le pianiste. Ces félins lui rappellent Nammoura, son petit félin à lui, « back home, à Michigan ». Nammoura vient de « nemr », tigre en arabe. Non, sa fourrure n’est pas mouchetée. Le matou est en fait aussi noir que les touches supérieures d’un clavier de piano. Re-ouverture du porte-monnaie. Nammoura est là, immortalisé sur papier glacé, dans une pose lascive, les yeux jaunes brillant de mille cinq cents feux. À côté, un portrait d’« Imm » Nammoura, jolie brune radieuse. Le prince des touches bicolores Il est ainsi, Walid Hourani. Un homme loin, très loin, du profil de l’artiste entortillé, embarrassé ou torturé. Il cultive la simplicité dans un jardin intitulé « authenticité ». Le qualificatif « virtuose du clavier » ne l’intéresse pas du tout. Or, il ne fait aucun doute que Walid Hourani possède un talent exceptionnel. À chacun de ses passages à Beyrouth (nombreux ces derniers temps, pour le plus grand bonheur de ses aficionados), il le montre, le remontre et le démontre. Son prochain récital ? Ce soir, à l’Assembly Hall de l’AUB, un concert au profit de bourses d’études pour l’association Lebanus, en collaboration avec l’École de musique Ghassan Yammine. Le programme ? Entre une sonate de Beethoven et un Rondo caprioccioso de Mendelssohn, il jouera Seven Songs de Gershwin (Somebody Loves Me, ‘S Wonderful, I’ll Build a Stairway to Paradise, Do It Again, Oh Lady Be Goog, the Man I Love, I Got Rhythm). Et trois autres gros morceaux lui tenant à cœur. Ses variations sur l’Alma Mater de l’AUB. « Une pièce que j’ai jouée en 1999 lors de l’inauguration du Steinway à queue offert par l’Alumni de l’Amérique du Nord, se souvient Hourani. Cet hymne retrouve ses origines dans un air folklorique irlandais appelé Annie Leslie. Plus tard, les universités américaines en ont fait leur hymne, adaptant des paroles différentes sur chaque version. Ma composition est un hommage à Rachmaninoff, dont Les variations sur un thème de Corelli ont inspiré ce morceau. » Mais le musicien-compositeur ne s’est pas arrêté là. La poly-stylistique En précurseur et porte-drapeau de la musique « poly-stylistique », il y a savamment mélangé le ragtime (oui, cette musique endiablée et syncopée qu’il a tant affectionnée au début des années 90), le boogie-woogie, du style oriental sur le mode du hijaz et du saba. Pour finir sur le son des cloches. Au programme également, The Machine Age, pièce composée en 1988 par son professeur William Albright. « La majeure partie de ses mouvements illustrent une invention technologique », indique Hourani. The Ever-Blinking Eye, par exemple, est inspiré des feux de signalisation, du clignotant des appareils électroniques, du curseur sur l’écran des ordinateurs, etc. L’humour de Walid Hourani sous les projecteurs est légendaire. Son gilet noir sur chemise blanche aussi. Hors scène, il porte jeans et vêtements de sport. Mais, rassurez-vous, sa vivacité est la même. Avec lui, inutile de chercher midi à quatorze heures. S’il a l’air de s’amuser en jouant du piano, c’est que la musique, pour lui, est un divertissement autant qu’un plaisir. « La musique, c’est quoi de plus qu’un passe-temps entre la naissance et la mort », dit-il citant Mansour Rahbani. Bon, il est vrai que Walid Hourani sait s’amuser avec brio. Et varier les plaisirs. Et chambouler les sens. Ce n’est sans doute pas un hasard si, il y a quelques années de cela, lui demandant quel genre de programme il nous avait concocté pour sa soirée, il avait répondu, (oh le malicieux) : « Une musique orgasmique ! » Maya GHANDOUR HERT *Rendez-vous à 20h. Billets en vente au « Virgin Megastore », tél. : 01/990099, Bouery Press, tél. : 09/210660 et Lebanus, tél. : 03/691151 – 03/906403.
Il porte un jogging-suit et des tennis. Walid Hourani arrive au rendez-vous tout essoufflé. Le café est bruyant, surchauffé. Il ouvre son porte-monnaie, en sort un petit carton blanc : « C’est un laissez-passer pour l’AUB, cela vous embêterait d’y trouver un endroit plus calme ? ». Impossible de résister à ce sourire désespéré. Dehors, le pianiste libanais le plus...