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Actualités - CHRONOLOGIE

En marge du sommet, conférence de presse commune organisée par la FIDH Les ONG dressent un bilan affligeant des libertés publiques au Liban

Les droits de l’homme au Liban se portent très mal, la société civile fait l’objet d’une campagne de répression systématique. Pourtant, en tant que pays membre de la sphère des pays francophones, le Liban est signataire de la Déclaration de Bamako 2000 sur les droits de l’homme, la démocratie et la bonne gouvernance. Tout comme il est signataire de la Déclaration universelle des droits de l’homme et des différents pactes internationaux, notamment ceux relatifs aux droits civils et politiques et aux droits économiques et sociaux. Et, jour après jour, le fossé se creuse davantage entre les dispositions contenus dans ces textes et la pratique sur le terrain. Tel est le bilan affligeant dressé lors d’une conférence de presse commune de plusieurs ONG des droits de l’homme au Liban, organisée hier par la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) à l’hôtel Martinez en présence d’employés de la MTV, de réfugiés palestiniens, de parents de disparus durant la guerre, de parents de détenus libanais en Syrie et d’étudiants. La « vacuité ». C’est le mot qu’a utilisé le directeur exécutif de la FIDH, Antoine Bernard, pour dénoncer « l’absence d’initiative concrète » au niveau du secrétariat général de la Francophonie, entre 2000 et 2002, « pour remédier effectivement aux situations de violations graves des droits de l’homme ». Un état des choses désolant, à modifier absolument. Ce pourquoi ont œuvré les chercheurs rassemblés durant le week-end dans le cadre du séminaire sur les droits de l’homme en marge du Sommet de Beyrouth. Séminaire au terme duquel a été créé dimanche le réseau francophone des droits de l’homme (voir ci-dessous). « La Déclaration de Bamako 2000, adoptée pourtant par les gouvernements des pays francophones », (...) avait « doté la francophonie d’un mécanisme de surveillance de la situation des droits de l’homme dans les pays membres, prévoyant la mise en œuvre de mesures concrètes en cas de violations graves ou massives des droits de l’homme et/ou de crise ou de rupture de la démocratie », a-t-il remarqué. Des mécanismes prévus par le chapitre 5 des accords de Bamako, qui devraient entrer en application grâce au nouveau réseau francophone. Lequel devrait être adopté par les chefs de gouvernement durant le Sommet de Beyrouth. Sur le Sommet de Beyrouth, M. Bernard a affirmé que la FIDH « en attend néanmoins davantage que de seulement servir de caution à des autorités qui ne sont pas exemptes de reproches au regard de leurs mesures et leurs pratiques dans le domaine des droits de l’homme ». Le directeur exécutif de la FIDH a dénoncé « le sécuritarisme et l’autoritarisme croissants au Liban, les lourdes menaces pour les libertés civiles et politiques, dont la fermeture de la MTV est une triste illustration, le dossier des disparus qui reste au point mort, les discriminations systématiques dont continuent d’être victimes les réfugiés palestiniens au Liban et le sort tragique réservé aux demandeurs d’asile non palestiniens ». Il a notamment condamné la tenue, dans le même bâtiment samedi, du séminaire sur les droits de l’homme et de l’audience à huis clos sur l’affaire MTV, les menaces de poursuites par le procureur Addoum contre les pôles de l’opposition et la situation inhumaine au camp de Chatila, que la FIDH avait visité dans la matinée. M. Bernard a par ailleurs appelé les États francophones à respecter leurs engagements pris à Bamako, en « adoptant toutes les mesures permettant de poursuivre et de sanctionner les auteurs de violations graves des droits de l’homme », notamment à travers la ratification du statut de la Cour pénale internationale (CPI). Il a dénoncé dans ce cadre les pressions américaines sur les pays francophones pour faire avorter la création de la CPI. Et de demander aux États francophones de tout mettre en œuvre pour garantir la liberté d’association et la liberté d’action des défenseurs des droits de l’homme. Bilan noir des ONG Ensuite, se sont succédé, à tour de rôle, neuf orateurs. MM. Bassam Hobeichi et Ragi Sourani, respectivement directeurs de l’Organisation palestinienne pour les droits de l’homme et du Centre palestinien des droits de l’homme à Gaza, ont mis en exergue les conditions inhumaines dans lesquelles vivent les réfugiés palestiniens au Liban. M. Hobeichi a condamné le racisme de la loi libanaise empêchant les Palestiniens d’acquérir des biens-fonds. Mme Yolande Georgiou, de la Fondation des droits de l’homme et du droit humanitaire (FDHDH), a évoqué « l’instrumentalisation de la justice comme instrument de répression », qui s’est manifestée notamment par « le renforcement du pouvoir du procureur général près la Cour de cassation au terme de la nouvelle loi de procédure pénale ». Elle a également réclamé la supression du tribunal militaire et a énuméré les différentes violations dans l’affaire de la fermeture de la MTV. M. Élie Abou Aoun, chargé de mission au Liban de Nouveaux droits de l’homme (NDH), s’est inquiété des enquêtes sur des crimes à caractère politique auxquelles la justice ne donne pas suite, tels que les assassinats des quatre juges à Saïda en 1999, de l’ingénieur FL Ramzi Irani et de l’ancien ministre Élie Hobeika. Il a également évoqué les nombreuses restrictions présentes dans la loi sur la liberté d’association et la loi sur les clubs de jeunesse. M. Nabil Maamari, de l’Association libanaise des droits de l’homme (ALDHOM), a énuméré, lui aussi, plusieurs violations, concernant notamment le traitement « esclavagiste » de la main-d’oeuvre étrangère, la corruption de l’Administration ou la situation des prisons. MM. Ghazi Aad et Wadih el-Asmar, respectivement porte-parole des associations Solide et Solida qui s’occupent des détenus libanais en Syrie, ont mis en exergue les contradictions dans les déclarations des autorités libanaises concernant l’existence ou la non-existence de détenus en Syrie. M. Asmar a appelé la commission ministérielle présidée par le ministre Fouad es-Saad et chargée du dossier, et dont la mission est terminée depuis plusieurs mois, à rendre ses conclusions ou à avouer son incompétence. Il a souligné que les autorités de Damas avaient promis aux parents de détenus, il y a trois mois, une réponse sur la présence de leurs enfants en Syrie, qu’elles n’ont toujours pas donnée. Le délai expire le 22 octobre. M. Asmar a également répondu au ministre de la Culture qui avait affirmé dans une conférence de presse dimanche que la MTV était une « affaire d’ordre interne » à ne pas discuter durant le sommet. « Qu’il nous explique comment délimiter, au niveau des droits de l’homme, entre les violations d’ordre interne et celles pour lesquelles nous pouvons intervenir », a-t-il conclu. Le responsable du bureau régional aux Nations unies du haut-commissariat pour les droits de l’homme, Amine Madani, a appelé les autorités libanaises à se conformer aux conventions internationales signées par le Liban, et la société civile à poursuivre la lutte pour le respect des droits de l’homme. Et le président de la FIDH, Sidiki Kaba, de conclure en rendant hommage aux défenseurs des droits de l’homme qui luttent pour le respect de ces principes universels aux dépens de leur propre liberté et de leur sécurité. Témoignages La FIDH a ensuite offert sa tribune à Joumana Fehmi, employée de la MTV, qui a retracé l’interminable parcours de violations dont les employés de la chaîne ont été victimes depuis le 4 septembre, puis aux parents des détenus libanais en Syrie. Enfin, Marc Makary, président de l’amicale des étudiants de la faculté de droit à l’Université Saint-Joseph, a fait un état des lieux des violations que subissent les étudiants: emploi de la force par les forces de l’ordre pour disperser les manifestants, octroi de permis pour les manifestations « dépendant des bonnes humeurs du ministre de l’Intérieur », convocations sans mandat d’amener par les autorités et tortures d’étudiants par les services de renseignements. Et d’appeler « la presse française et les réseaux des droits de l’homme dans le monde à agir pour protéger la société civile libanaise, abandonnée à elle-même et en constant recul ». Michel HAJJI GEORGIOU
Les droits de l’homme au Liban se portent très mal, la société civile fait l’objet d’une campagne de répression systématique. Pourtant, en tant que pays membre de la sphère des pays francophones, le Liban est signataire de la Déclaration de Bamako 2000 sur les droits de l’homme, la démocratie et la bonne gouvernance. Tout comme il est signataire de la Déclaration...