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Actualités - OPINION

Partie de ping-pong entre le Législatif et l’Exécutif

Cette patate chaude du cellulaire que le gouvernement tente de lui refiler, le Parlement s’en défausse vite fait. En refusant avec éclat de se sacrifier pour la noble cause de l’équanimité au sein du Conseil des ministres. Autrement dit, et pour tout dire familièrement, le président Berry n’éprouve pas le souhait de voir l’accord, ou le raccord, se faire sur son dos entre les présidents Lahoud et Hariri. Dès lors, sa réaction en flèche, immédiate, laisse craindre un peu que la bataille du cellulaire, jusque-là circonscrite au for intérieur de l’Exécutif, ne se transforme en bras de fer entre les pouvoirs. Le président de la Chambre a tout d’abord noté, sur le plan de la forme, l’irrégularité du procédé utilisé par le Conseil des ministres. Qui, sous la signature de M. Hariri, prie l’Assemblée nationale par le truchement de son perchoir, de bien vouloir trancher le litige d’interprétation relatif à la loi sur la privatisation du cellulaire. Notamment au sujet des délais : le 9 août pour l’appel d’offre le 31 pour l’ouverture des enveloppes. La démarche gouvernementale paraît d’autant plus inconséquente à M. Berry qu’on lui en demande encore davantage alors qu’il a déjà donné. C’est-à-dire qu’il a, comme on sait, joué les pompiers. En élaborant l’arrangement initial accepté par MM. Lahoud et Hariri. Protocole qui a débouché sur un projet de loi voté ensuite par la Chambre. Un texte dont l’application est du seul ressort du gouvernement, et le Parlement s’étonne donc qu’on le prie d’intervenir à un tel stade. Partant de là, le président Berry aborde le fond. Entendre les prérogatives des pouvoirs. Il affirme que ce n’est ni à l’Assemblée ni à son bureau d’expliquer les lois. Mais de légiférer. Parfois motu proprio, le plus souvent en étudiant des projets élaborés par le gouvernement, qui doit ensuite les exécuter. Lorsque des dispositions manquent de clarté, ajoute en privé et en substance M. Berry, le gouvernement peut toujours les modifier, à travers un nouveau projet de loi adressé à l’Assemblée. Ou attendre que cette dernière prenne l’initiative de la correction, via une proposition de loi. Ce que M. Berry ne signale pas avec beaucoup d’insistance c’est qu’il existe en réalité des instances étatiques juridiques habilitées à rendre au moins un avis consultatif, ou même arbitral, en cas d’embrouille. On songe ainsi au Conseil constitutionnel, bien sûr, mais aussi, le cas échéant, au Conseil d’État, aux services de contentieux de divers départements spécialisés, ainsi qu’à divers tribunaux administratifs ou ordinaires. Sans compter que, sans que cela ne l’engage à rien, (sauf à des débours), l’État peut prendre conseil auprès du privé. Une pratique assez courante du reste, et relativement lucrative ou dispendieuse, que ces études haut de gamme, techniques ou autres. Toujours est-il qu’après le niet plus ou moins voilé de la Chambre, on en revient à la case départ. C’est-à-dire au litige entre les dirigeants qui ont pouvoir sur la matière. Le plus grave dans cette affaire, déplore un ministre, c’est qu’elle confirme un manque total de confiance entre les responsables. Qui se suspectent, voire s’accusent, de desseins réciproques malveillants. Ainsi, le ministre des Télécoms, M. Jean-Louis Cardahi, n’hésite pas, nonobstant le principe de cohésion, à soutenir publiquement qu’on lui sème des embûches dans l’exécution d’une loi qui se trouve de ce fait piégeuse. À ce propos, M. Cardahi affirme que l’on a prévu des délais bien trop courts pour organiser l’adjudication. Pour contrer cette chausse-trappe, il propose comme on sait des mécanismes étatiques déterminés pour assurer le relais, après la fin des services de Cellis et de LibanCell. Mais cette méthode est rejetée par le Premier ministre. Dont les proches font observer qu’au lieu de perdre du temps à se soucier d’une paranationalisation, le département concerné devrait se focaliser sur une bonne préparation de l’adjudication. En mitonnant un cahier des charges de haut niveau, pour attirer les compagnies internationales du dessus du panier. Selon un observateur averti, le bras de fer ne tourne pas seulement sur le fait de savoir si Cellis et LibanCell vont être sollicités pour une rallonge de deux mois, en cas d’échec de l’adjudication. Mais aussi, mais surtout, sur l’éventualité d’un report de la date butoir du 31/8. Ce qui impliquerait la mise en place d’une direction provisoire, tout en continuant à rechercher des adjudicataires. Le président de la République et M. Cardahi, qui regrette pourtant que les délais soient trop avancés, tiennent, disent les loyalistes, au respect de la date du 31/8. Ils pensent dès lors qu’il est toujours loisible d’installer des commandes transitoires, sans pour autant empêcher la quête de nouveaux concessionnaires par voie d’adjudication. Mais, bien entendu, le camp d’en face, soutenu à dire vrai par de nombreux parlementaires, pense qu’on peut sans mal proroger le délai jusqu’au 31/10. Ces détails sont sinon complexes du moins assez compliqués. Et relativement oiseux, estime un opposant. Pour qui l’essentiel est que l’État est miné par les querelles d’influence qui opposent ses tenants. Et cela au moment où les finances publiques sont au plus mal et que la récession économique s’aggrave. Cependant, selon un ministre qui s’efforce de jouer les go between, le conflit du cellulaire ne risque pas de faire sauter le cabinet. Et, à son avis, l’on va bientôt trouver un compromis. Un de plus, un de moins, serait-on tenté de soupirer. Pour passer ensuite, sans doute, à d’autres haies du steeple-chase, avec les privatisations de l’EDL, des eaux, de la Régie et tutti quanti. Philippe ABI-AKL
Cette patate chaude du cellulaire que le gouvernement tente de lui refiler, le Parlement s’en défausse vite fait. En refusant avec éclat de se sacrifier pour la noble cause de l’équanimité au sein du Conseil des ministres. Autrement dit, et pour tout dire familièrement, le président Berry n’éprouve pas le souhait de voir l’accord, ou le raccord, se faire sur son dos...