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ÉTUDE - Parution d’une analyse d’Élisabeth Vauthier dans les « Annales » de l’Université de Balamand L’écriture renouvelée du roman arabe contemporain

Dans ses Annales, la faculté des lettres et des sciences humaines de l’Université de Balamand a fait paraître, dans le cadre thématique des «Identités diffuses», une étude d’Élisabeth Vauthier, professeur à l’Université de Nantes, Image et renouvellement de l’écriture dans le roman arabe contemporain. Nous en reproduisons dans nos colonnes quelques extraits : La langue arabe : chargée d’absolu «À travers le roman arabe se dessine l’aventure de la littérature moderne en général. Car le genre a très rapidement incarné, à côté d’autres types d’écriture, cette recherche constante de la contemporanéité qui anime les littérateurs depuis deux siècles. Dès ses débuts, le roman s’est efforcé de s’affirmer comme l’historien de son temps, transportant le réel immédiat dans l’univers imaginaire de la fiction. Dans cette entreprise, la littérature arabe s’est appuyée à la fois sur des modèles étrangers, sur sa tradition littéraire et sur une langue que les écrivains et les penseurs se sont appliqués à faire coïncider avec la réalité vécue (…)». «La situation de la langue arabe est d’autant plus complexe que ses locuteurs entretiennent avec elle une relation particulière. Chargée d’absolu et manifestation du sacré, car instrument de la parole divine, elle peut s’enorgueillir d’un patrimoine magnifié et s’est identifiée à une réalité glorieuse que l’on cherche à retrouver. Comment donc faire pour la rendre à la fois absolue et historique (ou «relative» selon l’expression du romancier et critique égyptien Edouard al-Harrat), qu’elle s’ouvre sur l’être moderne sans perdre sa richesse historique ? Il ne s’agit pas de détruire ce qui existe déjà mais, déclare al-Harrat, “d’ouvrir les portes verrouillées, derrière lesquels battent des flots impétueux qui cherchent à se déverser (…)”». Un réalisme « photographique » «La question se pose évidemment de façon différente dans la poésie et dans le roman arabes modernes. Le roman qualifié de “traditionnel” par la critique actuelle considère rarement l’image littéraire comme une force de renouvellement à l’œuvre dans l’écriture. Profondément marqué par le réalisme, il s’intéresse davantage à la construction du récit et à la précision de l’expression, car il recherche dans l’univers romanesque une correspondance minutieuse avec la réalité extérieure. Ce réalisme “photographique”, largement conforté par la conception du texte littéraire comme ”reflet” du réel, sera mis en cause après la guerre de 1967. Pour la jeune génération, l’écriture doit désormais se libérer des formes d’expression antérieures et traverser les apparences pour toucher enfin à l’essentiel (…)». «Le monde extérieur n’est finalement qu’une éternelle histoire rappelée par le souvenir, comme le fait le voyageur qui se remémore des scènes du passé, car le présent romanesque n’abrite la plupart du temps que l’évocation d’un passé qui reprend vie dans le souvenir (…). Chaque image s’ouvre sur une autre, dans une tentative de renouer les liens entre les objets du monde. Mais ce faisant, elle ouvre aussi une distance irréductible. Aucune accumulation de mots ne pourra la réduire (…)». Un sens qui se dérobe «Dans le processus narratif, l’image ne vient donc pas enrichir ou embellir le discours. Elle suscite la multiplicité du sens. Se faisant l’interprète d’une sensibilité particulière face à la réalité extérieure, elle n’épuise pas la réalité mais la féconde en créant inlassablement de nouvelles significations. Elle renouvelle la représentation collective du monde, redonnant à la langue cette virginité tant recherchée par les littérateurs en quête d’une littérarité moderne. Comme le prônait Hani al-Rahib ou Adonis, la langue ne tire plus sa signification du passé mais du présent de l’évocation, qui représente à la fois le temps du souvenir et celui de l’écriture et de la lecture (…). Mais l’écriture ne peut pour autant épuiser le réel. Cherchant à sortir des cadres conventionnels de la littérature romanesque, elle se révèle sous la forme d’un sens qui se dérobe, car il n’est jamais isolable du reste du texte. Elle ne l’établit pas définitivement mais le nuance en une multitude de facettes que le mouvement de la lecture peut enrichir à tout moment de nouvelles significations».
Dans ses Annales, la faculté des lettres et des sciences humaines de l’Université de Balamand a fait paraître, dans le cadre thématique des «Identités diffuses», une étude d’Élisabeth Vauthier, professeur à l’Université de Nantes, Image et renouvellement de l’écriture dans le roman arabe contemporain. Nous en reproduisons dans nos colonnes quelques extraits : La...