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Actualités - CHRONOLOGIES

LIRE EN FRANÇAIS ET EN MUSIQUE - « Les carnets d’Urbain de Valsère » de Gérard Khoury - L’ Histoire au service de la fiction

Historien, Gérard Khoury est fatalement un curieux qui fréquente «le monde des papiers poussiéreux, des documents enfermés le plus souvent depuis des décennies…». Il fouine dans le passé pour comprendre et expliquer le présent. Chine chez les brocanteurs, les antiquaires, les bouquinistes à l’affût de pièces rares ou à conviction, pour découvrir, ou compléter une information. «Cette quête de la vérité est en même temps celle de la justice, car à défaut de la reconnaissance d’un bon droit face aux dictats de la force et de l’hégémonie, la certitude que donne le document vrai compense les manipulations des politiciens ou du moins en console», écrit-il. Ainsi, «Les carnets d’Urbain de Valsère, le récent ouvrage qu’il présente et signe au Salon du livre, aujourd’hui lundi à 17 heures au stand Dar An Nahar , n’est pas comme les autres. En effet, il s’agit de la reconstitution d’une petite histoire dans la grande Histoire du Liban entre 1860 et 1862, avec retranscription de «textes trouvés chez un brocanteur français» explique-t-il. Dans lequel, de temps à autre, Khoury intervient, interprète, donne des précisions pour éclairer le lecteur sur une période, un détail…Un ouvrage agrémenté de 27 dessins anonymes de Beyrouth et du Mont-Liban dénichés, eux, chez un antiquaire aixoix dans les années 1980. Il y a là trois récits croisés. D’abord celui de Victor Urbino et Urbain Valsère qui sont en fait le même personnage avec les carnets de Valsère écrits en 1824 en souvenir de son séjour au Liban de 1860 à 1862 et ceux de Victor Urbino écrits au jour le jour- carnet de route- au moment de la visite d’Ernest Renan. Puis le contexte général qui était, à l’époque, la mission militaire du Concert européen qui autorise Napoléon III à envoyer des troupes françaises dans la montagne, c’est-à-dire Deir el Kamar, le Chouf et Damas avec la collaboration des Ottomans qui ont été les véritables pacificateurs de la montagne et celle de Phénicie avec Renan justement, qui arrive deux mois plus tard, et qui va utiliser les militaires pour effectuer des fouilles (Jbeil, Byblos puis Saïda). Enfin troisième volet, l’intervention de l’auteur, les commentaires qu’il fait de la situation entre l’expédition militaire et la mission scientifique, avec le recul de l’historien d’aujourd’hui, les travaux contemporains sur l’Empire ottoman et sa vision d’historien du XXIe siècle. À ceci se greffe une histoire d’amour émouvante née entre Valsère et une princesse druze qui l’a hébergé et qu’il ne reverra jamais plus. En fait, Khoury utilise les réalités historiques, pour construire une fiction. Reste l’énigme que le lecteur découvrira dans les dernières pages, à condition de ne pas lire la postface avant d’y arriver. Quant à la fresque historique de cette époque livrée par Khoury, elle est tout simplement passionnante. Il y a des années qu’il effectue ses recherches : «Essayer progressivement de dévoiler les phases de notre histoire qui sont, soit occultées parce que cela n’arrange personne de les dévoiler, soit dans l’ombre parce que personne ne s’y est intéressée est ma façon de résister» dit-il. «Le dernier mot avant de tourner la page», comme l’écrit Khoury dans sa postface, est intéressant à relever pour des raisons évidentes de brûlante actualité : «Ce qui reste de très troublant et triste en ce qui concerne le Mont- Liban à l’époque ottomane et le Liban contemporain, c’est d’observer les cycles répétitifs (1840, 1860, 1975, 1992) de la violence et du malheur dans ce petit territoire où pourtant le pluralisme communautaire et la tradition de l’hospitalité appelaient au partage. Les dessins d’un voyageur anonyme du XIXe siècle ici présentés sont un témoignage de la beauté intacte qu’ont connue mes personnages, Urbain de Valsère, alias Victor Urbino, alors qu’au XXe siècle la guerre et la main des hommes ont fini par éroder et même parfois assassiner toute beauté…» «Troublant et triste», en effet, que nous ne sachions pas lire notre histoire pour en tirer les leçons de paix.
Historien, Gérard Khoury est fatalement un curieux qui fréquente «le monde des papiers poussiéreux, des documents enfermés le plus souvent depuis des décennies…». Il fouine dans le passé pour comprendre et expliquer le présent. Chine chez les brocanteurs, les antiquaires, les bouquinistes à l’affût de pièces rares ou à conviction, pour découvrir, ou compléter une information....