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Actualités - OPINIONS

En toutes démocraties -

La photo d’Élias Murr collé à Nabil Kaouk – il y avait même une conférence de presse conjointe – à la une des journaux n’a en soi rien d’exceptionnel. Un ministre de l’Intérieur et des Municipalités a toute la latitude de fréquenter un haut cadre du Hezbollah, et cela quand bon lui semble. Sauf un dimanche électoral. Surtout quand le parti de Dieu est en première ligne, avec des candidats dans presque chacun des villages du Sud. Surtout qu’Élias Murr a fait la tournée des grands ducs loyalistes avec force tambours et trompettes. À cors et à cris. Et uniquement loyalistes. Élias Murr peut tout se permettre, dans les limites légales. Il peut tirer fierté – ou faire contre mauvaise fortune bon cœur – de n’importe quelle amitié, ou alliance, politique. Le ministre de l’Intérieur, par contre, se doit d’être, particulièrement un dimanche d’élections, le plus impartial des hommes. Règle sous-entendue qu’il a ouvertement et clairement bafouée hier. Et son «si Walid Joumblatt avait été présent (à Hasbaya), j’aurais certainement été le voir» n’a leurré personne. Élias Murr a commis ainsi une faute grave (détone-t-elle tant que cela finalement dans un Liban désormais complètement décivilisé ?). Et personne n’aura l’indélicatesse de l’imputer au manque d’expérience du jeune et fougueux premier flic du Liban. C’est un tout : la faute au mode de fonctionnement du pouvoir. Beaucoup plus chuchotée que criée : la proposition de budget 2002 de Rafic Hariri. Qui, en définitive, repose sur deux principes. Un : le dédit. Rafic Hariri avait martelé depuis sa déclaration ministérielle place de l’Étoile qu’il ne comptait absolument pas réduire les dépenses. Une décision devenue plus tard le credo du redoutable (et cachotier) binôme Siniora-Fleyhane. Et ne voilà-t-il pas que le budget 2002 porte en lui, en titre-étendard, la diminution, qu’on dit drastique, des dépenses. Deux : la ressemblance frappante avec la politique économique, notamment en dernière heure, du cabinet prédécesseur. Personne, à part sans doute les principaux intéressés, ne penserait dire que le gouvernement Hoss avait inventé la poudre, avait la science infuse ou bien était sur le point de réussir l’exploit. Il n’empêche, le résultat est le même : onze ans. Cela fait onze ans que l’on perd un temps fou. Onze ans que l’on se fait la course, à qui précipitera le plus vite, gouvernement après gouvernement, le Liban dans le gouffre. Au fond duquel, aujourd’hui, il déliquesce et dégénère. Et qui ne sait pas aujourd’hui que la condition sine qua non de tout redressement est la confiance des Libanais en le Liban en général, leur gouvernement en particulier ? Qui ? Les arrestations à Damas. Qui se poursuivent jour après jour entre cris et chuchotements. Et leur nécessaire ricochet sur les libertés et la démocratie libanaises. Un homme politique de tout premier plan (se) posait une question simple : «Comment peut-on demander, ou espérer, le respect des libertés et de la démocratie au Liban alors que ces dernières sont quotidiennement violées en Syrie ?». C’est effectivement simple comme bonjour. Et démontre, si tant est qu’il en avait besoin, la pertinence, la justesse, la véracité et la nécessité de «l’appel n° 2» des évêques maronites. La Syrie exerce au Liban une hégémonie sans partage et une tutelle politique sans limites, c’est un fait. Comment alors pouvoir penser échapper ici aux règles (d’acier) en vigueur là-bas ? Et comment veulent-ils ancrer le pays de plain-pied dans le XXIe siècle en continuant à le comparer à la Syrie ? À niveler par le bas ? C’est mathématique. D’ailleurs, le veulent-ils ? Et c’est là que la démission de Ralph Riachi prend toute son ampleur. Toute sa gravité. On devine bien plus qu’on ne connaît les raisons de sa décision. Ce que l’on apprend par contre, c’est que Ralph Riachi a compris une chose essentielle. Bien plus fort, plus plein et plus jouissif que le pseudo-pouvoir felaté, alloué, et parfois avec quelle générosité, par Damas à ses très nombreux thuriféraires – quels qu’ils soient –, il y en a un autre. Que devraient essayer, criant ou chuchotant, tous les dirigeants libanais au bon fond – et ils existent – si vite grisés par les tonnes de faux-semblants. Le pouvoir de dire non.
La photo d’Élias Murr collé à Nabil Kaouk – il y avait même une conférence de presse conjointe – à la une des journaux n’a en soi rien d’exceptionnel. Un ministre de l’Intérieur et des Municipalités a toute la latitude de fréquenter un haut cadre du Hezbollah, et cela quand bon lui semble. Sauf un dimanche électoral. Surtout quand le parti de Dieu est en première...