Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIES

CORRESPONDANCE - William Perkin, le père du « mauve » ou l’homme qui a synthétiquement - coloré le monde

WASHINGTON-Irène MOSALLI Pour Rimbaud, c’était «A noir, E blanc, U vert, O bleu…». Pour les maisons d’édition américaines, c’était tout récemment, Mauve ou l’homme qui a créé cette couleur, Jaune, une suite de nouvelles, Bleu, un roman. Auparavant il y a eu ces autres titres Couleurs primaires et Couleurs secondaires et bien sûr la trilogie cinématographique, Bleu, Blanc et Rouge. Aujourd’hui, la vedette est au mauve grâce à l’écrivain Simon Garfield qui vient de publier un ouvrage racontant l’histoire de cette couleur, découverte par le chimiste britannique William Perkin (1838- 1907) qui, à l’âge de 18 ans, était en train d’essayer de reconstituer synthétiquement la formule de la quinine. Il se retrouve avec un résidu sombre. Plus tard, il a expliqué qu’il avait été sur le point de jeter ce résidu, lorsqu’il a eu la curiosité de l’examiner de plus près. En le manipulant, il obtient une solution d’une très belle couleur. Il venait de découvrir l’aniline, appelée par la suite la couleur mauve et qui allait servir de base à la fabrication des couleurs synthétiques. Selon Garfield, cette couleur allait changer la face du monde. Avant cette trouvaille, on obtenait les teintures et les peintures à partir de colorants animaux et végétaux. Ce qui les rendait imprédictibles, parfois trop fortes, parfois délavées. Perkin venait de capter le moyen de produire constamment une couleur uniforme. Il ouvrait ainsi la voie à la préparation synthétique d’autres coloris. Ce qui allait révolutionner le monde de la teinture et de la mode. Et le mauve devint la couleur en vogue. On a ainsi vu la reine Victoria arborer une robe de ce ton au mariage de sa fille en 1858 et l’impératrice Eugénie l’adopter parce qu’il était assorti à la couleur de ses yeux. Bientôt, la rue londonienne a été atteinte par ce qui fut appelé «la rougeole mauve». Chromophobie occidentale Cette vague chromatique prit une grande ampleur dans le secteur commercial dans la mesure où d’autres chimistes ont été poussés à développer la science appliquée dans divers domaines : médecine, parfumerie et photographie. Avant cette explosion technicolore, le monde ne se portait pas si mal en demie-teinte et en noir et blanc. Témoin le titre d’un ouvrage intitulé Chromophobia qui relate l’importance accordée à la forme, au détriment de la couleur dans la culture occidentale. L’auteur remonte à Platon qui s’en était pris à la couleur de la même manière qu’il attaquait la rhétorique. Il associait l’une et l’autre à une ornementation qui masquait la vérité et à une drogue magique et maléfique, à la fois remède et poison. Aristote a également brandi la bannière de la «chromophobie» dans son traité Poétique. «La disposition des couleurs les plus attrayantes qui soient, écrit-il, ne pourra jamais procurer autant de plaisir qu’une image sans couleur». La couleur a longtemps été considérée comme appartenant au monde primitif qui existait avant le langage et la forme qui n’ont pas pu l’apprivoiser. Selon un critique d’art, Gauguin a utilisé les couleurs «artificielles» pour naviguer de part et d’autre de la frontière séparant le naturel du surnaturel. Il les a utilisées «pour dire des choses idylliques que les mots n’auraient pas pu exprimer». Toujours est-il que la découverte de Perkin a seulement participé à colorer le monde de tout un chacun : de la palette des artistes à la matière plastique, en passant par les murs des immeubles, tous les objets du quotidien.
WASHINGTON-Irène MOSALLI Pour Rimbaud, c’était «A noir, E blanc, U vert, O bleu…». Pour les maisons d’édition américaines, c’était tout récemment, Mauve ou l’homme qui a créé cette couleur, Jaune, une suite de nouvelles, Bleu, un roman. Auparavant il y a eu ces autres titres Couleurs primaires et Couleurs secondaires et bien sûr la trilogie cinématographique,...