RENCONTRE - Ils sont Charlie Chaplin et Robin Williams - Sylvio Bolinio et Alain Poudensan : si ce n’est lui, c’est donc son sosie !

Ils sont à Beyrouth depuis quelques jours et forment un duo détonnant. L’un, Sylvio Bolinio, est le sosie de Charlie Chaplin ; l’autre, Alain Poudensan, celui de Robin Williams. Invités par l’agence «Nouvel Horizon», ils se produisent dans des salles mais aussi dans des… supermarchés, semant l’hilarité sur leur passage. Ils animent également des ateliers de mime pour les jeunes. Rencontre avec deux artistes au grand talent, dont la collaboration vient tout juste de commencer chez nous. On le voit tout de suite, Sylvio Bolinio, 34 ans, est resté un grand enfant. Son parcours de clown et de mime est, dit-il, une revanche sur la vie. Né en France dans une famille très pauvre de 10 enfants, adopté par un père qui était violent et qui buvait, il a eu une enfance dure et perturbée. «À l’école, je n’arrivais pas à bien travailler et je faisais rire mes camarades pour camoufler ma détresse», raconte-t-il. On finit par le mettre à la porte en lui disant : «On ne veut pas de clown ici». Sylvio se retrouve donc à la rue. Il va voir les clowns en cachette, dans les cirques ; il regarde les cassettes de Charlie Chaplin «qui lui aussi a eu une enfance malheureuse, et avec qui j’ai beaucoup de points en commun»… Et comprend ce qu’il faut qu’il fasse de sa vie. Sylvio Bolinio a trimé dur avant de percer et de réussir. Il lui a fallu des années d’observation et de travail. «J’ai dormi dans la rue, j’ai eu faim et froid. J’ai démarré dans la rue, en tant que mime-suiveur, puis j’ai fait les grands cabarets de Paris, des émissions de télévision, beaucoup de voyages, au Canada, aux États-Unis…» Son aventure avec Charlie Chaplin a commencé par hasard, lorsqu’une dame, le sosie de la reine Élisabeth d’Angleterre en France, qui a une agence prestigieuse de sosie, le remarque et l’envoie faire un casting pour la télévision. «Ils cherchaient un acteur pour faire Charlot pour une grosse publicité. Et j’ai été retenu sur 54 personnes». Pour ses yeux un peu tristes, un peu rieurs ; pour la morphologie de son visage, très «proche» , mais aussi parce qu’il sait si bien entrer dans la peau du personnage. «J’aime Chaplin. Je ne fais pas qu’imiter ses gestes, dit-il, et je fais mon métier par amour». Humilité et respect Sylvio Bolinio souligne qu’un sosie doit «avoir l’intelligence d’une certaine humilité dans son travail et savoir rester à sa place». Son code d’honneur : ne rien faire qui soit préjudiciable à l’image de marque et la notoriété de Charlie Chaplin. «Je ne vendrais pour rien au monde l’âme de Chaplin, ni la mienne. Je suis un poète», affirme-t-il. Pour lui, «la vie est trop courte pour qu’on soit autre chose que des amateurs. Tous les jours, j’apprends quelque chose. D’avoir observé les gens, notamment les enfants, m’a beaucoup enrichi. La rue est la plus belle scène du monde. On se met à une terrasse de café et l’on voit des choses fabuleuses, des attitudes, des mimiques. Il y a là une mine d’or de trouvailles». Cela fait plus de 14 ans qu’il s’est glissé dans le personnage de Charlot. Et un jour, grâce à un grand producteur américain qui le remarque à une terrasse de café, il rencontre enfin, à Cannes, Géraldine Chaplin. Puis, plus tard, toute la famille. Un moment émouvant dont il se souviendra toujours. Sylvio Bolinio sait faire la différence entre clownerie et vulgarité. «Mon métier nécessite de la psychologie et de l’humour. Il ne faut jamais oublier d’être respectueux». Au fond de son âme et de son cœur, il est «l’ami de la veuve et de l’orphelin. J’aurais toujours de la tendresse pour ceux qui n’ont rien. Quand je joue dans la rue, je veux que le pauvre et le riche rient à part égale». Un conseil qu’il donne toujours aux jeunes qu’il rencontre : «Accrochez-vous à une étoile, que ce soit le sport, le théâtre, ou toute autre passion. L’art vous sauvera». Comme deux gouttes d’eau Alain Poudensan ressemble comme deux gouttes d’eau à Robin Williams, à un point que c’en est vraiment déconcertant. La voix, les yeux, le sourire, le regard, les cheveux… Tout. Et il n’a fait rien pour cela. Il ne s’est pas maquillé, n’a pas changé de coiffure, «juste porté des lunettes, pour accentuer la ressemblance». Côté caractère, il aime aussi faire le clown, changer de voix, faire des grimaces et savourer les rires qu’il provoque. Mais comme il aime à le répéter : «Ce n’est pas tout de ressembler à Robin Williams. Il faut monter un concept». C’est ainsi qu’il met au point il y a quelques mois, à Paris où il vit, une parodie des films de l’acteur américain. Et dans un spectacle loufoque, détonnant, drôle et interactif, où musique, éclairage, pyrotechnique et accessoires fous font un mariage passionnel, il devient tour à tour Mrs Doubtfire, l’animateur radio de Good Morning Vietnam, le savant de Flubber et Doctor Patch. À la grande et bruyante joie des enfants et des plus grands. Dans le spectacle Un éclat de rire présenté en avant-première mondiale à Beyrouth, Bolinio et Poudensan forment un duo très original. Après la prestation du faux Robin Williams qui joue plusieurs rôles, Charlot fait son entrée sur scène, introduit par un joli mot émouvant sur le mythe du cinéma, sa naissance avec le noir et blanc, etc. Ensuite, place au délire… En France, on fait souvent appel aux services d’Alain Poudensan. «Il a un talent fou ; il se prend pas au sérieux et il a une grande générosité de cœur», dit Bolinio de son nouvel associé. Ensemble, ils créent l’événement sur La Croisette, pour le Festival de Cannes dont ils sont devenus des habitués. C’est le fils d’Alain Poudensan qui note le premier la ressemblance de son père avec l’acteur Robin Williams. Puis de plus en plus de personnes. «Alors, en 1994, à la sortie de Mme Doubtfire à Paris, j’ai décidé d’aller au cinéma. C’était l’idéal pour avoir une confirmation, en observant la réaction des gens». Et là, c’est le chaos total. Autour de lui, les gens commencent à chuchoter, puis se bousculent et lui demandent un autographe. Le vrai Robin Williams, Alain Poudensan l’a rencontré à Paris, à l’occasion de la sortie du film Jumanji. Mais sa présence ayant créé une grande confusion et une panique, il a littéralement été mis à la porte sans avoir pu serrer la main de l’acteur. Plus tard, à Deauville, ils se parleront au cours d’une conférence de presse. Et poseront ensemble pour une photo souvenir. «Être le sosie de quelqu’un est un cadeau empoisonné, note Alain Poudensan. Il faut faire très attention à son image, aux médias, etc. Par ailleurs, il y a ceux qui vous prennent pour un guignol et se mettent à vous diriger et vous donner des ordres. Cela est pénible». Aujourd’hui, cela fait un an que Poudensan travaille sérieusement en tant que sosie de Robin Williams. «Je sais qu’il y a encore beaucoup à faire, dit-il. À Disneyland Paris, notamment, en avril 2002, un nouveau parc sera inauguré, basé sur le cinéma. Là, les sosies pourront avoir des ouvertures de contrats». Entre-temps, il continue de faire des prestations ponctuelles dans des soirées et des galas… Sylvio Bolinio et Alain Poudensan ont été agréablement surpris par l’hospitalité des Libanais et par l’accueil très chalereux qui leur a été réservé partout, par tous. «Nous tenons particulièrement à remercier notre hôte Georges Zoghbi (de l’agence «Nouvel Horizon») qui innove avec le sosie au Liban et qui est très actif». Et Alain Poudensan de conclure par un conseil, avec l’accent et le sourire Robin Williams : «Libanais, Libanaises, si seulement vous pouviez faire cesser les klaxons. Cela énerve pour rien et donne du stress». On peut visiter le site de Sylvio Bolinio en tapant www. mime-suiveur.com ; ou écrire aux deux artistes aux adresses suivantes : sylvio@mime-suiveur.com et apoude@hotmail.com