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Actualités - CHRONOLOGIES

DANSE - « Maahounna », de Jana el-Hassan, au TDB - Quand le corps devient vie

Phildegard Knef, Janis Joplin, Joséphine Baker, Édith Piaf, Asmahane, Ismaïl Haqui, Billie Holiday, Ute Lemper et Bertolt Brecht n’ont, de prime abord, rien en commun. Pas pour Jana el-Hassan qui les réunit tous dans Maahounna (Avec elles), un très beau spectacle qu’elle dirige, auquel elle participe, et dont elle signe la chorégraphie et la scénographie. Au Théâtre de Beyrouth jusqu’au 18 février, à 20h30. Sur scène, six danseuses «interprètent» des chansons de tous les muscles de leurs corps et de leurs visages. Et au gré des textes défile sur scène la vie d’une femme, avec ses joies, sa solitude, ses fantasmes, son romantisme, sa force, sa fragilité, son hystérie et ses déceptions. Jana el-Hassan est une femme qui sait bien parler des femmes, et qui trouve toujours – et c’est là sa force – de nouveaux langages pour le faire, et de nouvelles limites. Dans Maahounna, la chanson colle bien à la chorégraphie, l’inspire ; la musique accompagne intimement les pas des danseuses. Les tableaux se suivent sans faux raccords, aussi naturellement que les saisons d’une année. Les corps se cambrent, se tordent, se tendent, se déplient, se referment sur des sentiments toujours forts, voire même violents dans leur sincérité. Ils parlent, ils crient leur histoire. Et leurs petites histoires. Pas de fausse pudeur, pas de demi-mesure, mais une passion dramatique, qui gronde, qui tremble, qui bout. Chérine Karamé et Dania Hammoud sont époustouflantes. Elles vont jusqu’au bout du geste, maîtrisent le mouvement, dégagent une incroyable énergie. Elles sont encadrées par Dania el-Aaridi, Nisrine Massoud et Tania Khoury – danse et percussions rythmiques – qui apportant une note tantôt apaisante, tantôt humoristique, mais toujours complémentaire. Enfin, les interventions de Jana el-Hassan, si elles sont discrètes, n’en sont pas moins efficaces et viennent couronner le tout. Maahounna (1h) n’appartient à aucun style défini. Ici, avant d’être orientale, africaine, noir-américaine, classique ou moderne, la danse est langage, message. Elle est une femme qui chancelle sur ses talons, une femme qui s’impatiente, une femme qui aime. Elle ne s’encombre pas de décors ou d’accessoires, mais frappe au contraire par son côté brut, concentré. Et les musiques et paroles ne sont là que pour mieux la servir et la mettre en valeur. Un détail visuel capte toutefois l’attention du public : un pan vertical, au fond de la scène, portant en mauve et noir des caractères alphabétiques. Réalisé par le graphiste Ahmad Akl –qui signe également l’affiche et la brochure du spectacle –, ce panneau reprend le travail de l’artiste algérien Kabyle Saad el-Kouraychi, qui forme ses lettres à partir de détails du corps de la femme. «Ce spectacle a été conçu dans la continuité de mes recherches sur le corps de la femme, indique Jana el-Hassan. J’ai voulu montrer l’Occident à travers des femmes qui vivent différentes situations, tout en jouant sur l’ambiguïté entre l’Orient et l’Occident qui se rencontrent beaucoup plus qu’on ne pourrait le croire, puisque le bassin méditerranéen, c’est aussi l’Europe». Elle a également recentré un peu les techniques allemandes qu’elle possède, et mis en parallèle la rigidité de certains corps féminins et le pouvoir des hanches et du bassin de certains autres. Résultat : Maahounna est une performance étonnante, originale, expressive. À voir.
Phildegard Knef, Janis Joplin, Joséphine Baker, Édith Piaf, Asmahane, Ismaïl Haqui, Billie Holiday, Ute Lemper et Bertolt Brecht n’ont, de prime abord, rien en commun. Pas pour Jana el-Hassan qui les réunit tous dans Maahounna (Avec elles), un très beau spectacle qu’elle dirige, auquel elle participe, et dont elle signe la chorégraphie et la scénographie. Au Théâtre de Beyrouth...