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Actualités - ANALYSE

Hariri et Joumblatt semblent vouloir mettre le feu aux poudres L'opposition prépare ses batteries

Tandis que la commission parlementaire ad hoc entame le décryptage du projet gouvernemental de loi de finances pour 1999, l’opposition organise pour sa part une série de réunions préparatoires, en vue du débat budgétaire. Les plus actifs dans ce domaine sont bien évidemment les blocs du président Rafic Hariri et de M. Walid Joumblatt, qui intensifient leurs concertations et semblent vouloir mettre le feu aux poudres place de l’Étoile. Il y a donc nette évolution car il y a quelques jours ils laissaient entendre qu’ils allaient bouder les séances, ne pas s’y exprimer et ne pas voter. Une position adoptée, faut-il le rappeler, dans la foulée d’une intervention syrienne effectuée pour calmer le jeu sur la scène politique libanaise après des escarmouches qui avaient suscité une tension assez vive. Mais, depuis, de l’eau a coulé sous les ponts, il y a eu des arrestations et des évictions de fonctionnaires. Ce que les opposants interprètent comme une violation de la trêve tacite par le camp loyaliste. Dès lors, les contestataires n’ont plus apparemment l’intention de se contenter d’une résistance passive et fourbissent leurs armes pour passer à la contre-attaque. Cependant, stratégie et crainte de déplaire aux décideurs obligent, les communicants du camp opposant affirment que «la décision de participer au débat se fait dans un esprit de démocratie positive. Nous ne déploierons qu’un arsenal de remarques objectives, ciblées uniquement sur les questions sous étude, sans attaques incisives, sans chercher à désarçonner le gouvernement». Un programme aussi «constructif» devrait sans peine, en estiment les auteurs, obtenir le feu vert des décideurs… Après quoi, le travail de sape et de démolition pourrait commencer. Car en matière technique les «remarques objectives» sont justement celles qui portent le mieux, qui font le plus de dégâts. C’est ainsi que les députés opposants des deux blocs haririen et joumblattiste convoquent toujours, aux réunions préparatoires intensifiées qu’ils tiennent, des spécialistes, des économistes et des financiers, mais aussi des juristes haut de gamme. Pour les conseiller, leur indiquer les principaux points faibles du projet gouvernemental et leur fournir l’argumentaire dont ils devront user en séance. Les rôles commencent à être distribués entre les députés : tel se consacrera aux questions fiscales, tel autre au déficit et ainsi de suite. Section par section, chacun est appelé à consolider ses connaissances et son dossier de référence, en s’attelant avec l’aide d’experts à l’élaboration d’une véritable étude sur le créneau qu’il aura à traiter. Du vrai travail de professionnels qui tentent de ne rien laisser au hasard. Côté chiffres, les députés opposants disposent déjà des données suivantes, relevées par les spécialistes : – Les dépenses excèdent ; de 1 040 milliards de LL celles de 1998, soit 14 % de plus. Ce qui est paradoxal, quand on prétend pratiquer l’austérité. Le gouvernement ne peut pas justifier cette différence par le prétexte qu’il inclut des arriérés impayés (1 130 milliards de LL dus aux entrepreneurs, aux hôpitaux conventionnés et aux expropriés) puisqu’il traite cette créance hors budget. – Circonstance aggravante dans le même ordre d’idée : les 600 milliards de LL inscrits au budget 98 pour les crédits reportés (municipalités, dépôts divers) sont supprimés. Ce qui revient à dire que là aussi on expurge la comptabilité officielle pour lui donner bonne figure, en omettant d’inscrire ces dépenses virtuelles de 600 milliards. Auxquels il faudra sans doute rajouter les 300 milliards de LL, également de crédits reportés, gommés dans les budgets de différents ministères au nom de la compression. – Une autre astuce cosmétique dénoncée par les experts : l’on a gonflé les chiffres du chapitre du budget numéro deux dit d’exploitation, en le portant de 554 milliards de LL en 98 à 857 milliards de LL par un simple jeu d’écriture. En effet, ces 303 milliards existaient bien auparavant, et avaient le même but, mais se trouvaient inscrits au chapitre numéro un. Au titre de virements au Conseil du développement et de la reconstruction ou à la Caisse des déplacés. Il n’y a donc pas réorientation productive des dépenses comme le prétend le gouvernement. – Le gouvernement a certainement fait un effort pour comprimer les dépenses improductives, notent les spécialistes. Mais à leur avis, les coupes sombres dans les budgets de certains départements utiles vont se traduire par des effets négatifs en frustrant des secteurs productifs privés de soutien. C’est le cas, précisent les économistes, pour les crédits désormais trop réduits de ministères comme l’Agriculture, le Tourisme, l’Habitat, les Affaires sociales et la Culture, sur l’aide desquels le public ou le secteur privé concerné comptent beaucoup. – L’enveloppe des indemnités de fin de service ou des pensions de retraite aurait dû se limiter à 660 milliards de LL. Du fait de la loi de compensation adoptée dernièrement, ces dépenses sont passées à 744 milliards de LL. – Pour pouvoir annoncer un déficit limité à 40,2 %, le gouvernement prétend qu’il va percevoir cette année 4 990 milliards de LL, alors qu’un examen technique élémentaire ne lui attribue que 4 300 milliards de LL. Si on regarde du côté des dépenses effectives que la caisse va devoir assumer, le déficit réel du budget va se chiffrer à 44,5 %, même en admettant que l’État encaisse autant qu’il le souhaite, ce qui serait fortement étonnant. Et si on prenait la peine d’inclure dans le budget, comme en réalité la loi l’exige, les 1 130 milliards d’impayés cités plus haut, le déficit véritable dépasserait les 50 %.
Tandis que la commission parlementaire ad hoc entame le décryptage du projet gouvernemental de loi de finances pour 1999, l’opposition organise pour sa part une série de réunions préparatoires, en vue du débat budgétaire. Les plus actifs dans ce domaine sont bien évidemment les blocs du président Rafic Hariri et de M. Walid Joumblatt, qui intensifient leurs concertations et semblent...