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Actualités - OPINION

Un monde muet , intérêt oblige !

Le 9 décembre 1948, l’Onu officialise le terme de génocide, pour définir l’intention, en temps de guerre, comme en temps de paix, de détruire un groupe de personnes, un groupe national, ethnique, racial ou religieux. Le génocide des Arméniens en 1915 répond à tous ces points. Des morts sans sépultures, absents et tellement présents, c’est cela un génocide : l’irréparable commis pour toujours. Le 24 avril 1915, une rafle dans Constantinople marquait pour le peuple arménien le début de plusieurs années d’exécutions, de déportations et de massacres méticuleusement organisés, qui feront disparaître les deux tiers de la population. Le premier génocide du siècle passera inaperçu dans un monde en guerre. Dès l’origine, s’est donc posé le problème de la mémoire : mémoire d’un peuple dispersé et traumatisé, mémoire d’une barbarie qui interpelle toute l’humanité, mais mémoire bafouée, puisqu’aujourd’hui, nul ne s’obstine à dévoiler la vérité. En faites, ce sont ceux qui nient les crimes qui attisent la haine, car les faits sont irréfutables. Depuis plus de 84 ans, les appels se heurtent au silence. Silence des bourreaux, silence des États, silence des médias. Les bourreaux et leurs descendants ont nié : en Turquie, ils ont mis en œuvre un négationnisme d’État. Au nom de la diplomatie, le monde n’a jamais exigé d’eux qu’ils modifient leurs positions sur la question arménienne. Les victimes ont choisi le mutisme pour recommencer à vivre. C’est le silence qui fait la particularité de ce génocide. Il s’agit d’abord de rétablir une vérité historique, qui pourrait être un facteur de paix. Un geste de justice ne ressuscitera pas le million et demi d’êtres humains massacrés. Mais cette reconnaissance donne justement une dimension à la terrible lutte menée par un peuple exterminé, chassé de ses terres, dispersé aux quatre vents et qui n’a que la mémoire pour ancrage. Aujourd’hui en Turquie, des femmes et des hommes, intellectuels, chercheurs, éditeurs ou écrivains, réclament la vérité. Ils sont Turcs et farouchement opposés à ce mensonge sur l’histoire des Arméniens. Des voix s’élèvent pour que l’État regarde son passé en face et qu’il l’assume. Ce sont celles de Taner Akcam, Ragip et Aïda Zarakolu, Yelda et bien d’autres. C’est avec ces hommes et ces femmes de courage que se construira, dans la liberté, l’avenir de la région. Ce cris rappellent que la grandeur d’un pays se mesure aussi à sa capacité de reconnaître des faits avérés, que nier l’Histoire et camoufler toute trace est preuve d’un crime perpétré avec cynisme. Si le génocide arménien fut le premier du siècle, l’histoire enchaîne ensuite une terrible succession, des Tziganes aux Cambodgiens, du Rwanda à la Yougoslavie et enfin à Cana. Et si la communauté internationale avait exigé fermement que les bourreaux soient jugés et condamnés, nous n’aurions peut-être pas aujourd’hui à constater l’horreur et à combattre le mensonge. Cette absence continue de condamnations, dues à des intérêts géographiques et politiques, a aisément permis à la Turquie d’agresser des peuples voisins. Bulgares, Grecs, Perses, Arméniens, Syriens, Kurdes et Chypriotes sont tous en conflit direct avec un État qui se permet l’irréparable devant un monde sourd et muet. Un monde dirigé désormais par ceux qui, pour des intérêts de tous genres, mettent les vérités aux enchères des contrats d’armements. Avec leur nouveau surnom de «police du monde», ils se permettent de mener les vérités politiques dans le tunnel des peuples faibles et ignorés. La fin du siècle est marquée par l’absence de la justice sur une planète qui a absolument besoin d’une «police de la police» !
Le 9 décembre 1948, l’Onu officialise le terme de génocide, pour définir l’intention, en temps de guerre, comme en temps de paix, de détruire un groupe de personnes, un groupe national, ethnique, racial ou religieux. Le génocide des Arméniens en 1915 répond à tous ces points. Des morts sans sépultures, absents et tellement présents, c’est cela un génocide : l’irréparable...