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Actualités - OPINION

Tribune Quel est l'enjeu des prochaines élections ?

Le président de la Chambre vient de donner le coup d’envoi des élections de l’an 2000 en annonçant, à la suite d’une réunion avec le colonel Bachar el-Assad, que «le Liban sera très probablement divisé en 13 circonscriptions électorales». Pourquoi 13 ? Parce que les principaux acteurs politiques, qui n’ont malheureusement pas de raison d’être superstitieux, y trouvent leur compte. Le Sud est partagé en deux circonscriptions, mais il pourrait être maintenu unifié pour une dernière fois en raison de l’occupation israélienne. La région de Jezzine serait, en cas de division du mohafazat, séparée des cazas de Zahrani et de Saïda, avec lesquels elle a des affinités historiques pour se retrouver liée à Nabatieh et Marjeyoun. La Békaa, elle revient au régime d’avant-guerre avec ses trois cazas traditionnels. Quant au Nord, partagé en deux, il fait l’objet d’une «première» en matière de découpage électoral. Une des deux circonscriptions, prévue par le projet de loi électorale, regroupe des cazas qui ne sont pas géographiquement reliés entre eux. Le caza de Bécharré se retrouve avec ceux de Dennié et de Akkar. Or Bécharré et Dennié ne se rejoignent qu’à Kornet Saouda, soit à une altitude de 3 000 m. Peut-être faut-il, dans ce cas, inclure dans la loi électorale le percement d’un tunnel pour permettre aux habitants de ces régions de frayer un peu ensemble avant d’élire des représentants communs ? Au Mont-Liban, qui ne compte que quatre députés de plus que le Nord, des considérations hautement supérieures nécessitent le découpage de ce mohafazat en quatre. Est-ce là la loi «juste et équilibrée» promise par le pouvoir qui s’était, par ailleurs, engagé à la promulguer un an avant la date des élections ? Quels sont les enjeux de cette nouvelle bataille électorale ? En 1992, l’enjeu était clair : il s’agissait de traduire politiquement les gains acquis sur le terrain militaire avec l’éviction du général Michel Aoun. Peu importait, à l’époque, de respecter les formes. Le «nouvel ordre» devait être imposé. L’appel au boycott des élections, qui devait être largement suivi dans les milieux chrétiens, n’a pas ébranlé la détermination de nos dirigeants. Il en a résulté une mise à l’écart de la communauté chrétienne. En 1996, l’objectif a été de «légitimiser» le fait accompli de 1992 en encourageant, par tous les moyens, les «boycotteurs» de 1992 à «prendre le train en marche». Le président de la Chambre a même parlé de «rouleau compresseur» contre lequel il serait vain de vouloir s’opposer. la participation électorale a été importante, mais les résultats ont été identiques à ceux de 1992. Quel est l’enjeu en l’an 2000 ? «Légitimiser» une nouvelle fois la classe politique issue des élections de 1992 ? Amener un Parlement encore plus docile et plus «compréhensif» que celui qui existe aujourd’hui ? Augmenter encore plus le nombre des «loyalistes» ? L’enjeu de ces nouvelles élections n’est pas clair. Il l’est d’autant moins que nul ne peut affirmer aujourd’hui qu’elles auront vraiment lieu à la date prévue. Les élections présidentielles de 1995 n’avaient-elles pas été ajournées parce que Syriens et Israéliens étaient engagés dans une négociation qui risquait d’aboutir ? Or aujourd’hui un fait semble certain : les Israéliens vont se retirer du Liban avant juillet 2000. Comment, dans ce cas, organiser des élections un mois après ? Nos dirigeants, qui n’ont jamais péché par excès de respect pour les échéances démocratiques, ont déjà eu beaucoup de mal à gérer le retrait de Jezzine des miliciens de Lahd. Comment vont-ils faire face aux changements qu’un retrait total va nécessairement entraîner et organiser, en parallèle, des élections générales dans le pays ? L’enjeu de toute cette préparation électorale ne serait-il pas justement de maintenir séparés les deux dossiers interne et régional et de limiter le débat entre les Libanais à la seule question du découpage des circonscriptions électorales ? N’est-ce pas un but en soi que d’occuper plusieurs centaines d’individus concernés par la politique – hommes politiques, journalistes, grands électeurs, présidents de municipalité, etc. – à des questions d’alliances, de contacts, de manœuvres électorales et de faire ainsi, une nouvelle fois, la preuve que les Libanais vivent hors du temps et des réalités ? Ne nous faisons pas d’illusions. Les élections n’auront lieu que si la négociation syro-israélienne est engagée. Dans ce cas, la bataille électorale ne peut avoir d’intérêt que si elle s’inscrit dans la perspective de préparer le pays aux changements qui ne vont pas manquer d’intervenir. Il ne s’agit plus de répéter les expériences de 1992 et 1996, mais de doter le pays d’une institution qui serait – cette fois – en mesure de clore une page de son histoire pour en ouvrir une nouvelle.
Le président de la Chambre vient de donner le coup d’envoi des élections de l’an 2000 en annonçant, à la suite d’une réunion avec le colonel Bachar el-Assad, que «le Liban sera très probablement divisé en 13 circonscriptions électorales». Pourquoi 13 ? Parce que les principaux acteurs politiques, qui n’ont malheureusement pas de raison d’être superstitieux, y...