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Actualités - INTERVIEWS

Interview - Quel avenir dans la région après la paix ? Le représentant de la Ligue arabe à l'Onu, Hussein Hassouna, répond Le Liban doit battre le rappel des pays amis

«L’Orient-Le Jour» a rencontré à New York le représentant permanent de la Ligue arabe auprès des Nations unies. L’ambassadeur Hussein Hassouna est rompu aux négociations de paix. Il a lui-même participé aux pourparlers égypto-israéliens de Camp David et a contribué à aplanir les difficultés surgies lors de ces négociations. Connaissant parfaitement le dossier du différend arabo-israélien, M. Hassouna nous communique ses impressions sur les actuelles négociations syro-israéliennes, entamées le 16 décembre entre le Premier ministre israélien Ehud Barak et le ministre syrien des Affaires étrangères Farouk el-Chareh sous l’égide des Américains, et qui devront reprendre à Washington le 3 janvier prochain. M. Hassouna a également évoqué les répercussions de ces négociations sur la scène libanaise. Q. : Selon vous, pourquoi le président syrien Hafez el-Assad veut aujourd’hui la paix ? R. : «Tout d’abord, je dirais que la Syrie était le partenaire de l’Égypte dans la glorieuse lutte engagée par les Arabes pour reconquérir leurs territoires en 1973 usurpés par la force des armes par Israël lors de la guerre d’agression du 5 juin 67. Depuis lors, la communauté internationale a réaffirmé les principes qui devraient être observés dans le processus de paix pour régler le problème du Moyen-Orient. Ces principes impliquent qu’il n’y a pas d’acquisition de territoire par la force ou par la guerre et que la souveraineté et l’intégrité territoriale des pays doivent être respectées. Le troisième principe porte sur l’échange de territoires contre la paix “Land for Peace”. C’est sur cette base que la Syrie s’est attachée au respect des principes fondamentaux des droits internationaux incorporés dans la Charte des Nations unies. Depuis Madrid, la Syrie a déclaré qu’elle était prête à trouver une solution pacifique au conflit avec Israël basée sur les principes fondamentaux et sur la résolution 242 du Conseil de sécurité. Je ne crois pas qu’on puisse dire que la position de la Syrie a changé. Je pense que le président Assad a tenu ferme et a attendu le moment propice pour s’engager de nouveau dans le processus de paix. Il est resté attaché aux principes du processus de paix qui reflètent la légitimité internationale et à l’idée que les négociations devraient reprendre au point où elles avaient abouti avec le gouvernement de M. Rabin, notamment sur la base de l’acceptation d’Israël de se retirer totalement du Golan syrien occupé. Je crois que la conjoncture en Israël a changé, la conjoncture internationale aussi, et le président des États-Unis, dont le rôle est vital, s’est engagé de nouveau à rapprocher les points de vue en espérant réaliser la paix escomptée avant la fin de son mandat fin 2000. À mon avis, le président Assad voudrait donner à son pays une paix juste et durable, une stabilité qui lui permettrait de s’engager dans la voie du développement économique. Je crois que le président Assad réalise que la Syrie a longtemps été obligée de se concentrer sur la défense de son territoire au détriment de son développement économique. Q. : L’objectif de la Syrie est de récupérer le Golan et d’aboutir à une paix globale. Dans ce cas, qu’adviendra-t-il du Liban ? R. : «Le Liban est le seul pays arabe qui soit en confrontation journalière avec Israël. Je dois ici rendre hommage au Liban. Car c’est grâce à sa lutte pour libérer son territoire qu’il a infligé de lourdes pertes à Israël. Et c’est sous cette pression qu’Israël aujourd’hui bouge. Le rôle du Liban est important. C’est grâce au Liban que le processus peut progresser. Si la question du Liban n’est pas réglée, il n’y aura pas de paix durable dans la région». Q. : Comment voyez-vous l’avenir du Liban ? R. :«Il faut être optimiste. Les choses bougent enfin. Après un trop long statu quo qui a pesé sur la région, le Liban et le monde arabe peuvent envisager l’avenir avec espoir». Q. : Pensez-vous que la paix avec Israël va changer la face économique du Liban et de la Syrie? R. : «Je pense que la paix va créer un nouveau climat dans la région. J’entends évidemment une paix imposée par Israël selon ses propres termes. S’il y a vraiment une paix, je crois qu’il y aura une possibilité de coopération économique entre tous les pays de la région. Cela va faciliter aussi les relations entre les pays arabes surtout, entre le Liban et la Syrie. Il n’y aura plus besoin de zones militaires, de mesures de sécurité. Ce sont des conditions de guerre. Je ne veux pas rentrer dans les problèmes intérieurs du Liban. Mais du point de vue régional, les forces syriennes sont là aussi pour jouer un rôle préventif. Cette donnée va changer une fois qu’Israël se sera retiré et la paix instaurée. La présence militaire syrienne n’aura peut-être plus de raison d’être. Mais en tant que représentant de la Ligue arabe, je dirais que c’est aux gouvernements concernés, syrien et libanais, de se mettre d’accord là-dessus». Q. : Que fait la Ligue arabe pour aider le Liban à retrouver sa souveraineté ? R. : «La Ligue arabe discute du problème libanais chaque fois que les ministres des Affaires étrangères se réunissent dans le cadre du Conseil de la Ligue arabe et adopte des résolutions de soutien. Dans le cadre des Nations unies et des organisations internationales, la Ligue arabe assure un appui permanent au Liban à travers le groupe arabe. Lorsque les questions sont portées devant le Conseil de sécurité ou devant l’Assemblée générale, ou même devant la commission des Droits de l’homme à Genève, le groupe arabe met tout son poids derrière les demandes légitimes du Liban». Q. : Qu’adviendra-t-il des 350 000 Palestiniens qui vivent dans les camps au Liban ? La position du gouvernement libanais est claire sur cette question : droit de retour des Palestiniens à leur patrie, donc refus de l’implantation des Palestiniens. Que préconise la Ligue arabe pour les réfugiés palestiniens du Liban ? R. : «La résolution 194, réaffirmée chaque année, constitue la base juridique pour le règlement du problème des réfugiés palestiniens. Je pense qu’Israël ne peut dénier leur droit au retour parce que cela voudra dire qu’Israël ne veut pas de règlement de cet aspect important du conflit. Après tout, c’est ce côté humain d’un peuple qui a été délogé, terrorisé et renvoyé de sa patrie qui est à la base du problème du Moyen-Orient». Q. : Mais selon vous, comment va-t-on résoudre le problème des réfugiés palestiniens ? R. : «Je pense qu’une partie de ces réfugiés ira dans l’État indépendant de Palestine qui sera créé. D’autres choisiront de s’installer ailleurs, dans le monde arabe ou à l’étranger. Mais il faut absolument reconnaître leur droit au retour. Cela est fondamental. Je ne crois pas que nous puissions accepter le “niet” de Barak comme définitif. Aujourd’hui, nous entendons aussi qu’il n’y a pas de retour de Jérusalem-Est à la souveraineté palestinienne ni de démantèlement des implantations juives dans les territoires occupés. Nous avons entendu, il y a quelques années, le même langage de la part de M. Begin qui avait juré que les implantations juives dans le Sinaï y resteraient à jamais et que Charm el-Cheikh ne retournerait jamais à l’Égypte. Si les Arabes, de leur côté, faisaient des déclarations aussi intransigeantes, alors à quoi servirait la négociation ?». Q. : Quelle sera, d’après vous, l’attitude de Damas vis-à-vis de la Résistance libanaise et du Hezbollah ? R. : La Résistance libanaise est tout à fait légitime. elle est conforme à toutes les conventions et aux textes juridiques internationaux qui donnent au peuple occupé le droit de lutter afin de mettre un terme à une occupation étrangère. Le Hezbollah fait partie de la résistance. Une fois le retrait israélien réalisé, il y aura une nouvelle donne. Je pense que ce sera à l’armée libanaise de défendre son territoire. Le rôle du Hezbollah est de se défendre contre l’occupation. Mais une fois la paix instaurée, c’est aux forces politiques libanaises de déterminer le rôle que le Hezbollah continuera à jouer». La Syrie et le Liban ont le droit de réclamer une compensation financière pour les sacrifices humains et matériels qu’ils ont subis. L’occupation a été au détriment de leur développement économique. Je crois que tout cela sera sur la table des négociations. Quant aux pays arabes, ils ont déjà accepté le principe de contribuer à la reconstruction du Liban. Celui-ci devrait recourir à la communauté internationale, aux pays amis en Europe, en Amérique latine où il y a une importante communauté d’expatriés libanais, aux États-Unis même où parmi les trois millions d’Américains d’origine arabe, les Libanais constituent une force importante. Les organisations américaines arabes aux États-Unis ont des représentants influents au Congrès et dans les médias. Je pense qu’ils doivent s’activer pour essayer d’éclairer l’opinion publique américaine qui peut influencer le gouvernement, l’Administration et le Congrès.
«L’Orient-Le Jour» a rencontré à New York le représentant permanent de la Ligue arabe auprès des Nations unies. L’ambassadeur Hussein Hassouna est rompu aux négociations de paix. Il a lui-même participé aux pourparlers égypto-israéliens de Camp David et a contribué à aplanir les difficultés surgies lors de ces négociations. Connaissant parfaitement le dossier du...