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Actualités - OPINION

Après vous, merci

Tout journaliste, tout publicitaire vous le dira : la technique de la communication a ceci d’extraordinaire et de palpitant qu’elle n’a pleinement atteint son objectif que quand elle a eu l’heur d’opérer dans les deux sens. Au seuil de l’an 2000, l’interactif est devenu le maître mot dans les entreprises de tout genre ; mais ce n’est guère là chose nouvelle pour les forçats de la plume que nous restons, en dépit de nos Mac’s dernier modèle. Un peu comme nos confrères de la pub le feraient d’un bon produit, nous lançons en effet des idées, des messages que nous croyons valables sans jamais prétendre, cependant, avoir découvert la poudre. Car ces idées se veulent très prosaïquement un honnête exercice de bon sens, même quand celui-ci se double d’un effort de recherche. Tout journal se doit aussi d’être à l’écoute de ses lecteurs, de prendre le pouls de l’opinion avant même que de songer à lui administrer des leçons ; il n’a certes pas démérité quand, loin de toute complaisance, les idées qu’il défend font bon ménage avec ce simple mais précieux bon sens populaire, tant méprisé ou occulté pourtant par les gouvernements. Et c’est mille fois tant mieux quand le message a si bien passé que le lecteur se manifeste pour vous dire bingo, touché. Aux éditorialistes, commentateurs, analystes, billettistes et autres galériens de bonne foi, on pardonnera dès lors cette faiblesse bien humaine de carburer au bravo, plutôt qu’à toute autre forme de gratification (Dieu et le Père Noël fassent que cet imprudent aveu échappe à la lecture des grands argentiers du journal, dont les fragiles velléités en matière d’augmentation des salaires risqueraient d’être funestement freinées en plein élan). Cela dit, ce n’est pas cracher dans la soupe que de s’étonner quelque peu du flot d’ encouragements et autres marques de soutien, aussi courtoises et chaleureuses que discrètes (et même confidentielles, vive le cellulaire !) que peut parfois prodiguer la classe politique à des journalistes qui n’ont fait après tout qu’énoncer, dans leurs écrits, de frustes évidences sinon de franches lapalissades. Qu’enfoncer des portes ouvertes au nom de ce sacré bon sens, sur le thème suivant par exemple : à l’approche d’une paix nimbée de mystère et sans jamais faillir à la coordination avec l’allié syrien, l’ État libanais serait bien inspiré de renoncer à son effroyable effacement volontaire sur la scène internationale, de montrer son aptitude à gérer les contraintes de tout règlement, de s’adresser enfin au peuple de manière intelligente et crédible pour calmer ses appréhensions. Car enfin, c’est par les hommes politiques eux-mêmes – députés, chefs de parti, leaders d’opinion – que ces choses-là devraient être dites, sur ce même forum qu’ils ont eux-mêmes choisi lorsque se révéla à eux leur destin national : la place publique, pas le cellulaire. En ce moment plus que jamais, le peuple, et c’est son droit le plus total, a besoin de savoir ; s’agissant d’affaires publiques, l’information et le débat national qui peut en naître sont avant tout l’affaire des professionnels de la politique, avec ou sans le concours des médias. C’est à nous, citoyens de tous bords et de tous corps de métier – y compris les journalistes –, qu’il revient normalement de leur décerner des mentions ou, le cas échéant, leur signifier notre désaccord. Car au lieu de dévider durant des heures des platitudes, comme le font nombre de ces honorables parlementaires habitués des talk-shows télévisés, ils auraient posé ainsi les vrais problèmes, préconisé des approches, mis en place des garde-fous et mérité la confiance de la nation. C’est là leur fonction; c’est leur chemin, qu’ils sont tenus de parcourir à découvert, sans trop raser les murs : devraient-ils y laisser quelques plumes, en cette saison de chasse aux canards boiteux et aux brebis galeuses, où commencent déjà à circuler les tickets garantis gagnants aux prochaines élections. Avec nos remerciements très sincèrement réitérés, souhaitons-leur donc bonne route pour l’an 2000, qui s’ouvre sur un vœu céleste : paix sur terre aux hommes de bonne volonté.
Tout journaliste, tout publicitaire vous le dira : la technique de la communication a ceci d’extraordinaire et de palpitant qu’elle n’a pleinement atteint son objectif que quand elle a eu l’heur d’opérer dans les deux sens. Au seuil de l’an 2000, l’interactif est devenu le maître mot dans les entreprises de tout genre ; mais ce n’est guère là chose nouvelle pour les forçats...