Rechercher
Rechercher

Actualités - ANALYSE

Loi électorale - L'influence régionale se fait sentir Le Parlement précipite le mouvement

On se plaignait des lenteurs gouvernementales en matière de loi électorale. D’un extrême à l’autre : la Chambre fait montre pour sa part d’un zèle, d’une précipitation excessifs. En une seule matinée, la commission parlementaire de l’Administration et de la Justice a expédié l’examen du projet de code électoral. Pour une loi d’ordre national, c’est là un exploit sans précédent dans les annales internationales et la place de l’Étoile serait bien avisée d’en demander l’homologation dans le livre Guinness des records. Du reste, pris d’émulation, le président de l’Assemblée nationale a fixé le débat général pour mercredi prochain, 22 décembre, en précisant que le vote devrait intervenir le même jour. Comme les députés aiment bien prendre le micro, deux séances sont donc prévues, une le matin et l’autre l’après-midi. Ainsi, comme le président de la République l’avait prévu, le pays sera effectivement doté d’un nouveau système électoral avant la fin du millénaire, du siècle et de l’année. Cette célérité, le lien est évident, s’explique par le soudain redémarrage du processus de paix entre la Syrie et Israël. Quand les préparatifs sur ce plan semblaient piétiner, les connaisseurs, dont le président Nabih Berry mais aussi le chef du gouvernement M. Sélim Hoss, pronostiquaient la publication de la loi électorale pour le mois de février au plus tôt. On leur a fait savoir qu’il convenait d’aller plus vite en besogne pour éviter que les élections libanaises n’interviennent après la conclusion d’une paix régionale. Auquel cas les décideurs risqueraient de ne plus avoir le champ assez libre pour dessiner totalement à leur guise la configuration de la prochaine législature libanaise. De plus, indiquent sans fausse honte des loyalistes, si le projet dit des 14 circonscriptions n’était pas adopté au plus tôt, l’évolution des négociations régionales pourrait l’entraver en renforçant la position de ses nombreux détracteurs. Il faut donc prendre l’opposition de vitesse avant que le vent ne tourne trop en sa faveur. Et notamment avant que le camp de l’Est ne fasse prévaloir qu’il reste politiquement désavantagé, la loi concoctée par le pouvoir aggravant manifestement la discrimination dont il se dit l’objet. On sait en effet que dans trois cas au moins, la situation sur le plan de la représentativité chrétienne, déjà déplorable (plus d’un tiers des effectifs sont sous contrôle mahométan), va encore empirer : à Bécharré, rattaché au Akkar-Dennyé ; à Jezzine, rattaché à Nabatyeh ; et enfin à Beyrouth dont l’Est est englouti par l’Ouest. En précipitant le mouvement électoral, on veut donc couper court aux velléités de correction de trajectoire sur le plan intérieur. Et de plus, cerise sur le gâteau pour les fans des décideurs, l’anomalie projetée est appelée à connaître une existence prolongée plus que d’ordinaire. On sait en effet que la commission parlementaire de l’Administration et de la Justice a porté à 4 ans et 8 mois, au lieu des 4 ans légaux, la durée du mandat de la prochaine législature. Cela sous prétexte d’éviter qu’en 2004, année de présidentielles et de municipales, il n’y ait de l’embouteillage sur le plan électoral. Il reste que le texte adopté est tellement bourré d’imperfections, pour user d’un euphémisme poli, qu’on se demande s’il passera la barre du Conseil constitutionnel. Si jamais il se trouve dix braves pour signer une motion saisissant de l’affaire cette haute instance. À part la violation, encore une fois, du principe constitutionnel d’égalité de tous devant la loi, à part le bizarre rattachement de Bécharré au Akkar ou de Jezzine à Nabatyeh, on relève des joyeusetés étonnantes comme le fait que les 14 circonscriptions se sont vu affubler du nom officiel de mohafazats, ce qu’elles ne sont évidemment pas car au Liban, il y a cinq districts seulement en pratique. Mais cette coquille de dénomination est délibérée : en recourant au label mohafazat, le gouvernement et la Chambre évitent en apparence d’enfreindre Taëf qui ordonne que les élections se déroulent au niveau des mohafazats. En même temps, on prépare l’opinion à un fractionnement de ces entités administratives dans le cadre du projet de décentralisation. Toujours est-il que l’ensemble porte plus que jamais la griffe régionale. À preuve que l’une des raisons avancées par les loyalistes pour justifier la précipitation ambiante est que le débat parlementaire doit intervenir avant que le ministre de l’Intérieur, M. Michel Murr, bombardé représentant du Liban à la réouverture des pourparlers, ne doive prendre l’avion pour Washington.
On se plaignait des lenteurs gouvernementales en matière de loi électorale. D’un extrême à l’autre : la Chambre fait montre pour sa part d’un zèle, d’une précipitation excessifs. En une seule matinée, la commission parlementaire de l’Administration et de la Justice a expédié l’examen du projet de code électoral. Pour une loi d’ordre national, c’est là un exploit sans...