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Actualités - REPORTAGES

Familles Les Asseily : caresser le coton dans le sens du fil(photo)

Un long siècle s’est écoulé depuis que les Asseily, commerçants en coton et laine, ont donné à ces matières nobles leur place d’honneur. Et de simples marchands, ils se sont vite transformés en producteurs et créateurs, par amour pour des produits auxquels leur nom est naturellement associé. La «route du coton» s’est tracée, creusant ses sillons au gré du temps, des années et des hommes, labourée par des mains inventives, un esprit de famille qui a fait évoluer les textiles pour en faire un produit fini, 100 % «fabriqué au Liban»; une façon comme une autre de protéger et renforcer le patrimoine et laisser grandir les racines. Ce long chemin, longue histoire, fut d’abord emprunté, vers la fin du siècle dernier, par deux frères, Constantin et Nagib Asseily, commerçants de leur état, en coton, laine et nattes. Le travail florissant leur permit d’ouvrir plusieurs boutiques et de se tailler une réputation importante dans le domaine. Constantin et sa femme Adèle, née Ferneiné, eurent trois fils, Michel, Gabriel, et Édouard. Constantin et Adèle quittèrent ce monde ensemble, un triste jour de 1909. Elle périt d’une fièvre contractée durant une fausse couche, il fut emporté par ses émotions, incapable de survivre à sa chère moitié… Najib mourut quelques années plus tard, de vieillesse probablement, passant le flambeau à ses fils Alfred, Albert, William et Edmond. À la disparition des deux pionniers, les cousins se réunirent pour créer une usine de textiles. 1938 verra ainsi la naissance des usines de Jdeidé, sous la bannière des sept «Asseily cousins». On raconte même qu’Eleonore Roosevelt, de passage au Liban, se serait écriée : «Comment un si petit pays possède-t-il une si grande usine?» Et Mme Charlotte Asseily, épouse d’Édouard, de répondre, vaillamment: «Nous voyons toujours grand !». En effet, les Asseily voyaient grand, travaillant le fil, jusqu’au tissage et à la teinture, à l’aide de machines anglaises et de techniques modernes. Les aînés, Michel et Alfred, s’occupaient de l’aspect administratif alors que les autres cousins se partageaient les différents département, à l’usine. «Asseily cousins» et la filature nationale de coton survécurent à la Deuxième Guerre mondiale et à la concurrence, jusqu’à la fin des années 70. Édouard préfère alors se retirer et l’usine ferme ses portes quelques années plus tard. Georges Asseily, Charlotte et « Domtex » Pendant toutes ces années où l’usine se développait, les enfants grandissaient et faisaient leurs choix. Georges Édouard Asseily fut le seul à avoir contracté le «virus textile», qui l’amena naturellement à diriger ses études dans ce sens, poursuivis au pays de Sa Majesté. Il devint donc ingénieur textile, digne héritier de la couronne Asseily, et, à 26 ans, last but not least, président de l’Association des industriels du Liban. Son jeune frère, Anthony, a préféré, quant à lui, l’univers des banques dans lequel il a trouvé sa place. En 1960, lorsque Georges rentre au pays, avec un diplôme d’ingénieur, un diplôme d’études supérieures d’économie et toute son ambition dans ses bagages, il fonde avec son père l’usine Édouard Asseily et Fils, un label de marque qui poursuivra avec succès la vocation des ancêtres. Georges, ambitieux et impatient, voulant fabriquer une marchandise locale de qualité, se heurte rapidement à l’obstination des commerçants libanais qui préféraient alors les produits étrangers. C’est ainsi que naquit et s’imposa le projet d’une salle d’exposition permanente, brillante idée d’une mère courage qui voulait stimuler son fils et surtout le retenir au pays. «Qui tiendrait en main l’affaire ?», demanda Georges. «Je le ferai», répondit Mme Asseily, «Pour combien de temps ?» s’inquiéta-t-il ; «Le temps qu’il faudra». En 1962, Domtex – Domestic Textile Center – installe à Hamra sa salle d’exposition et son atelier, Charlotte Asseily s’improvisant avec succès directrice et créatrice de modèles. «Depuis, il y a eu émergence d’un grand nombre de “n’importe quoitex”», souligne-t-elle avec humour, un tricot naissant entre ses doigts créatifs et ses baguettes de magicienne. « La gamme de produits s’est peu à peu élargie, pour finir par inclure les serviettes, sorties de bain unies et brodées, draps, tapis, couvertures en laine… Notre seul atout a toujours été la probité». Les points de vente se multiplient et s’adaptent aux «années célestes de ce pays, ceux de la guerre libanaise», le centre-ville sera vite remplacé par Sodeco et Zouk. En 1975, l’usine de Chyah brûlée, Bauchrieh prendra la relève. Georges poursuit ses va-et-vient entre le Liban et la Grande-Bretagne. Avec une priorité, un défi à relever, le même depuis les années 60 : souligner l’importance de la qualité locale, dépasser ce «complexe du made in Lebanon». «Le temps qu’il faudra» avait dit Charlotte Asseily, il y a presque 40 ans. Ce temps-là ne s’est pas encore écoulé. Car tous les matins, depuis cet engagement pris avec le cœur, elle continue à gérer 35 employés, plusieurs points de vente, imaginer des modèles, insuffler à cette affaire de famille toute son énergie. Elle continuera à le faire, le temps qu’il faudra, le temps qu’elle voudra…
Un long siècle s’est écoulé depuis que les Asseily, commerçants en coton et laine, ont donné à ces matières nobles leur place d’honneur. Et de simples marchands, ils se sont vite transformés en producteurs et créateurs, par amour pour des produits auxquels leur nom est naturellement associé. La «route du coton» s’est tracée, creusant ses sillons au gré du temps, des...