La route Gaza-Cisjordanie va changer la vie de nombreux Palestiniens (photo)

Cela fait neuf ans que Jamil al-Asmar, un Palestinien né en Cisjordanie, vit à Gaza. Neuf ans que ses enfants n’ont pas vu leurs grands-parents, restés à Naplouse, dans le nord de la Cisjordanie. Mais cela va changer avec la prochaine ouverture d’un passage pour les Palestiniens à travers le territoire israélien qui leur permettra de se rendre de Gaza en Cisjordanie. Les deux composantes de l’entité palestinienne sont distantes de quelques dizaines de km seulement, mais étaient jusqu’à maintenant, dans la pratique, très éloignées pour la plupart des Palestiniens. «Mes enfants ont grandi à Gaza et ma famille ne sait pas à quoi ils ressemblent», explique M. Al-Asmar, un enseignant de 47 ans à l’université al-Azhar de Gaza. L’accord signé le 5 octobre sur l’ouverture de ce passage – en réalité le droit pour les Palestiniens d’emprunter, dans des conditions très strictes, une route israélienne déjà existence qui relie Gaza à Tarqumiyah, près de Hébron, dans le sud de la Cisjordanie – lui permettra ainsi de se rendre à Naplouse avec sa femme et ses trois enfants. «Il y a beaucoup de membres de ma famille qui ont grandi pendant que j’étais loin d’eux dans ma propre patrie et que je ne connais pas», commente-t-il. Comme lui, même si c’est pour d’autres raisons, de nombreux habitants de Gaza attendent avec impatience que ce passage soit opérationnel, ce qui devrait être le cas dans les prochains jours, lorsque tous les détails pratiques auront été mis au point. Ayman Zaqut, 24 ans, est l’un d’eux. À moitié paralysé depuis l’Intifada (la révolte palestinienne de sept ans contre l’occupation israélienne qui débuta en 1987), M. Zaqut, qui se déplace en fauteuil roulant, compte aller maintenant tous les deux mois à Ramallah, en Cisjordanie, pour se faire soigner dans la seule clinique spécialisée des territoires. Depuis l’instauration de l’autonomie palestinienne, en 1994, un Palestinien de Gaza désirant se rendre en Cisjordanie, et vice versa, devait, en effet, demander aux autorités israéliennes un permis spécial très difficile à obtenir. Pour les activités ayant eu maille à partir avec la justice israélienne, c’était peine perdue... Désormais, le candidat au voyage devra présenter une demande auprès du ministère palestinien des Affaires civiles, qui la transmettra aux autorités israéliennes. Si elle est acceptée, une carte magnétique lui sera remise par les Israéliens, en présence d’un policier palestinien non armé. Les Palestiniens auxquels l’entrée en Israël est interdite pour des raisons de sécurité, mais qui ne sont pas recherchés, ne pourront voyager sur cette route qu’à bord de bus escortés par des véhicules de la police israélienne. Il y a quelques jours, Abdallah al-Nadr, un homme de 35 ans sans emploi, est allé dans les locaux du ministère des Affaires civiles à Gaza pour se renseigner sur les formalités à accomplir. «Je suis venu me renseigner, parce que je ne suis jamais allé en Cisjordanie de toute ma vie», a-t-il déclaré. «Je veux y aller, car j’espère y trouver du travail». Ce passage pourrait, en effet, constituer une bouffée d’air pour les quelque un million d’habitants de Gaza, où le taux de chômage est très élevé. À l’heure actuelle, environ 80 000 Palestiniens, dont un peu plus de 30 000 habitants de Gaza, ont un permis pour aller quotidiennement travailler en Israël. Salim Ajur, un commerçant de 37 ans, possède une fabrique de produits ménagers à Gaza. Ayant passé quatre ans dans les prisons israéliennes, cela fait 11 ans qu’il ne peut plus aller en Cisjordanie. L’ouverture de la route Gaza-Tarqumiyah devrait lui permettre de pouvoir y retourner enfin et de développer ses affaires. «Je pense accroître ma production et le nombre de mes ouvriers et de mes machines», prédit-il.