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Actualités - REPORTAGES

Visite officielle - Le roi Abdallah a quitté Beyrouth hier Entre le Liban et la Jordanie, prémices d'une nouvelle coopération(photos)

Beaucoup de problèmes restent en suspens, mais les bases d’une nouvelle coopération ont été posées. Et de la rapide visite des souverains hachémites à Beyrouth, il restera principalement l’image d’une reine radieuse vêtue d’un ensemble couleur vieil or, magnifié par les chauds rayons du soleil et d’un roi souriant, multipliant les marques de sympathie à tous ses interlocuteurs libanais. Il restera aussi l’annonce sans détours d’une reprise prochaine des négociations, accueillie certes avec prudence par les officiels libanais. Mais le scepticisme affiché ne parvient plus à dissimuler la direction du vent : il souffle dans le sens d’une paix, à laquelle le Liban devrait commencer à se préparer. Le communiqué commun diffusé à l’AIB donne clairement le ton de la visite de 23 heures effectuée par le roi Abdallah et la reine Rania de Jordanie. Tout en évoquant la nécessité de renforcer les relations bilatérales entre les deux pays, le roi et son hôte libanais insistent particulièrement sur les fondements de la paix entre Israël et les pays arabes, consacrés lors de la conférence de Madrid: retrait total du Liban-Sud et de la Békaa-Ouest occupés ainsi que du Golan, application des résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité et reconnaissance du droit du peuple palestinien à se doter d’un État indépendant ayant pour capitale Jérusalem ainsi que du droit des réfugiés palestiniens au retour sur leur terre natale. Cette phrase est d’ailleurs la plus importante du communiqué, puisqu’elle reflète la hantise du Liban de voir un jour les quelque 300 000 Palestiniens (Il n’y a pas encore de chiffre officiel à ce sujet) installés sur son sol y rester définitivement. D’ailleurs, selon des sources bien informées, ce problème aurait été largement évoqué au cours des entretiens officiels du roi Abdallah avec le président Émile Lahoud, le Premier ministre Sélim Hoss et le président de la Chambre Nabih Berry. La hantise de l’implantation Sur ce thème, le Liban, dans toutes ses composantes, a parlé d’une seule voix et le roi, dit-on, aurait écouté attentivement, avant de laisser entendre que l’implantation des Palestiniens n’est pas inéluctable, mais qu’en définitive ce problème devrait être discuté directement avec l’Autorité palestinienne. D’ailleurs, des membres de la délégation officielle jordanienne ont prôné discrètement l’ouverture d’un dialogue à ce sujet entre les autorités libanaises et palestiniennes. Mais la Jordanie, par la voix de son roi, s’est déclarée prête à appuyer les thèses libanaises, quitte à remplir le cas échéant une mission de bons offices ou d’interlocuteur privilégié. La question du calendrier agricole Le souverain hachémite a-t-il fait des propositions concrètes ? Il est sans doute trop tôt pour obtenir des réponses claires, mais ce qui est sûr, c’est que son entourage a vivement clamé son appui aux thèses syriennes et libanaises, dans le cadre des négociations avec Israël, précisant ainsi que la Jordanie ne peut être un intermédiaire dans le sens strict du terme, puisqu’elle a un parti pris, celui de «ses frères arabes». Le vieux cliché d’intérêts divergents entre la Jordanie et le Liban concernant le sort des réfugiés palestiniens serait-il en train de tomber ? Beaucoup de personnes au Liban semblaient soudain le penser, même si des deux côtés, de nombreuses appréhensions demeurent. Les Jordaniens, par exemple, n’aiment pas qu’on leur parle d’une éventuelle confédération avec les Palestiniens. «Il faut d’abord qu’il y ait un État palestinien», répondent sèchement ceux qui sont interrogés à ce sujet. Au niveau des relations bilatérales, beaucoup de points restent aussi en suspens, notamment le dossier agricole, puisqu’il arrive souvent aux produits libanais d’être bloqués à la frontière jordanienne et vice versa. Les deux parties ont toutefois décidé de mettre enfin au point un calendrier agricole qui permettrait d’éviter ce genre d’incidents. Elles ont aussi convenu de relancer l’accord économique conclu entre les deux parties en 1992, en essayant de l’adapter aux besoins actuels des deux pays. La question de créer une zone franche entre le Liban et la Jordanie, prévoyant l’abolition progressive des taxes douanières, a été longuement évoquée. Naturellement, tous ces projets ne peuvent se concrétiser sans la participation de la Syrie et si l’idée d’une complémentarité syro-libano-jordanienne lancée avant la visite du roi à Beyrouth a été rapidement abandonnée, les bases d’une coopération fructueuse sont déjà posées. Bilan résolument positif donc pour le court séjour libanais du roi Abdallah et de l’impressionnante délégation qui l’accompagnait. Celle-ci comprenait outre les officiels et responsables du royaume, son jeune frère Ali, qui a fait l’objet d’une attention particulière de la part des responsables libanais, sa sœur la princesse Zein qui accompagnait la reine dans tous ses déplacements et son cousin, le prince Talal ben Mohamed. Les Libanais ont d’ailleurs bien compris le symbole contenu dans la composition de la délégation et à l’accueil comme aux adieux, ils ont tenu à exprimer l’importance qu’ils accordent à cette visite. Fanfare, hymnes nationaux, ultimes manœuvres et salutations vigoureuses, la cérémonie du départ était presque identique à celle de l’arrivée avec, en plus, un petit pincement au cœur. C’est qu’en quelques heures, le roi, la reine et leurs compagnons ont réussi à établir des contacts chaleureux avec les responsables libanais. En regardant le couple royal gravir les marches de la passerelle, le président Émile Lahoud a esquissé un dernier salut, comme s’il voyait partir un ami cher. Le seul point noir du tableau a été le passage des avions israéliens qui ont vrillé le ciel libanais de leurs lignes blanches au moment où l’avion royal décollait. Un message clair à ceux qui croient pouvoir les ignorer. Mais les responsables libanais n’ont pas bronché, les yeux résolument tournés vers l’avion portant l’emblème des souverains hachémites. Le roi parti, le président Lahoud est rapidement monté dans une modeste Mercedes grise, dédaignant l’impressionnante limousine officielle, qui est restée abandonnée sur le tarmac de la base militaire aérienne…Après les concessions faites au protocole, la simplicité du président a repris le dessus.
Beaucoup de problèmes restent en suspens, mais les bases d’une nouvelle coopération ont été posées. Et de la rapide visite des souverains hachémites à Beyrouth, il restera principalement l’image d’une reine radieuse vêtue d’un ensemble couleur vieil or, magnifié par les chauds rayons du soleil et d’un roi souriant, multipliant les marques de sympathie à tous ses interlocuteurs...