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Actualités - CHRONOLOGIE

Médecine - Huit mille praticiens en grève aujourd'hui Plus d'arrestations préventives, demandent les médecins(photo)

Les quelque 8 000 médecins du Liban observeront aujourd’hui une grève de 24 heures pour protester contre l’arrestation puis la condamnation par le tribunal militaire de trois de leurs collègues accusés de fautes professionnelles et de négligence ayant entraîné le décès d’un sous-officier de l’armée libanaise. Outre le mouvement de protestation médical qui culminera avec un sit-in des médecins vêtus de blouses blanches devant le siège de la Chambre pour réclamer l’adoption d’une loi interdisant l’arrestation préventive de médecins, cette affaire a aussi provoqué des remous politiques. La commission parlementaire de la Santé a estimé que l’arrestation des trois médecins constitue une violation des lois et des procédures en vigueur. La Fédération des Ordres des professions libérales a également tenu une réunion extraordinaire pour exprimer son soutien aux mesures décidées par l’Ordre des médecins. Pour sa part, le comité exécutif du Bloc national (BN) a critiqué aussi bien les carences de l’hôpital militaire qui a été incapable d’offrir au sous-officier décédé les soins nécessaires, que l’inaction de l’Ordre des médecins face aux fautes professionnelles commises par les trois praticiens. Rappelons que le tribunal militaire a condamné lundi soir les trois médecins à des peines de prison de cinq jours, correspondant à la détention préventive qu’ils avaient déjà subie, «pour négligence ayant entraîné la mort du sergent-chef Khalil Hamad» le 15 août. Le sous-officier qui avait été admis la veille à l’hôpital militaire pour maux d’estomac accompagnés de vomissements, avait été ensuite admis dans deux hôpitaux privés avant de succomber à une infection foudroyante du pancréas. C’est la première fois au Liban qu’un juge militaire, le brigadier Maher Safieddine, condamne des médecins sans se référer à un rapport médical établi avant la décision du tribunal militaire. Interrogé par L’Orient-Le Jour, le président de l’Ordre des médecins, le Dr Ghattas Khoury, a déclaré qu’il rejetait «le principe même de l’arrestation préventive sans la consultation de l’Ordre et sans établissement par une commission scientifique d’un rapport précisant s’il y a eu oui ou non négligence ou faute professionnelle». «Cette affaire est très grave, a-t-il dit. Elle porte sur la liberté d’exercer à l’abri des pressions. On ne peut pas faire correctement son métier quand on est soumis à de fortes pressions». Les urgences épargnées par la grève Le Dr Khoury a précisé que la grève des blouses blanches concerne tout le secteur médical sauf les cas d’urgence. «Nous avons demandé aux médecins de suspendre pour 24 heures toutes leurs activités, a-t-il dit. C’est-à-dire que les rendez-vous dans les cliniques privées sont reportés d’un jour de même que les opérations chirurgicales courantes. Les cas d’urgence pourront être traités et les médecins pourront visiter les patients ayant besoin d’un suivi». Le tribunal militaire a été désavoué par la commission parlementaire de la Santé réunie hier sous la présidence de M. Riad Sarraf, lui-même un médecin. La réunion s’est déroulée en présence des députés Ismaïl Succariyé, Sleimane Kanaan, Pierre Daccache, Jean Ghanem, Antoine Hitti (tous des médecins) et Marwan Hamadé (ancien ministre de la Santé), ainsi que du Dr Khoury. À l’issue des débats, M. Sarraf a déclaré que la commission «estime que l’arrestation des trois médecins constitue une violation des lois et des procédures en vigueur». «Cette affaire met de nouveau sur le tapis le système de santé au Liban, a-t-il dit. Tout en affirmant son soutien à toute décision disciplinaire ou judiciaire prise à l’encontre de ceux qui se rendent coupables de négligence, la commission insiste sur la nécessité de respecter les lois pendant les procédures, conformément au code de déontologie médicale et au code pénal et non pas en procédant à des arrestations préventives injustifiées». «Le Dr Khoury a assuré que l’Ordre des médecins va procéder à l’enquête professionnelle et scientifique qui a été négligée par la justice militaire, a ajouté M. Sarraf. Et la commission parlementaire se réunira une nouvelle fois pour entendre le rapport établi par la commission disciplinaire de l’Ordre des médecins». Le syndicat des propriétaires des hôpitaux privés a pour sa part publié un communiqué pour exprimer son soutien aux mesures de protestation décidées par l’Ordre des médecins. Il a aussi demandé que l’arrestation préventive ne soit plus exercée à l’encontre des membres du corps médical et a réaffirmé sa confiance dans la justice libanaise. Le syndicat des biologistes du Liban, ainsi que les ligues des médecins de Nabatiyé et de la Békaa ont également fait paraître des communiqués similaires. Le Parti socialiste progressiste avait déclaré dans un communiqué publié lundi que «l’arrestation préventive ne doit pas devenir une épée de Damoclès constamment suspendue au-dessus de la tête du médecin». M. Mohammed Abdel Hamid Beydoun avait de son côté indiqué que «le tribunal militaire, tribunal d’exception, ne peut avoir, dans un pays démocratique, d’aussi larges prérogatives lui permettant de se saisir d’affaires en tous genres». Au-delà du décès tragique du sergent-chef Khalil Hamad, cette affaire pose tout le problème de la détermination des responsabilités, de la déontologie médicale si souvent oubliée et des attributions du tribunal militaire.
Les quelque 8 000 médecins du Liban observeront aujourd’hui une grève de 24 heures pour protester contre l’arrestation puis la condamnation par le tribunal militaire de trois de leurs collègues accusés de fautes professionnelles et de négligence ayant entraîné le décès d’un sous-officier de l’armée libanaise. Outre le mouvement de protestation médical qui culminera...