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Actualités - ANALYSE

Justice sociale - Inégalité dans le traitement des préjudices L'Etat d'un côté, le citoyen de l'autre

Deux poids, deux mesures : il y a l’État d’un côté, le citoyen de l’autre. Un député souligne ainsi que «lorsqu’on commet une infraction, on est frappé d’une amende qu’on ne peut éviter de payer. Mais lorsque c’est l’État qui commet le forfait, le particulier lésé ne parvient, dans le meilleur des cas, qu’à obtenir un dédommagement tout à fait symbolique. Et c’est parfois dramatique car des familles entières se sont retrouvées ruinées de la sorte». Ce parlementaire ajoute : «Si un abonné qui n’a pas la chance d’être du Sud ou de la Békaa, régions où l’on ne paye pas beaucoup de quittances, tarde à acquitter les redevances d’eau, d’électricité ou de téléphone, on lui fait payer de lourdes amendes après lui avoir coupé le ravitaillement, en lui faisant casquer en outre le rétablissement de ligne. Aucune circonstance atténuante, aucune excuse pour cas de force majeure ne lui sont consenties. Par contre, quand c’est l’État qui est en faute, c’est bien le diable si on réussit à lui faire rendre gorge. Il est même souvent arrivé que l’Administration ignore avec superbe des arrêts dirimants rendus contre elle par les tribunaux compétents, comme le Conseil d’État. Hamiha haramiha, dit le dicton libanais. Et on voit souvent ainsi l’État, gardien de la loi, se permettre de la contourner. L’exemple le plus courant est celui des sens interdits que seules empruntent des voitures relevant d’agents de l’État. Tout cela est très mauvais, car cela consacre une mentalité de rapport de force entre le secteur public et la population. Autrement dit, quand l’État en tant que personne morale se permet de transgresser la loi ou d’imposer de criantes iniquités à la population, les détenteurs de tout pouvoir qui découle de lui ne peuvent qu’en abuser. Et cela fait que les gens se mettent à maudire les dominants, qui n’ont d’ailleurs aucun titre légal à cette position». Ce député insiste : «Le citoyen a des obligations envers la collectivité, c’est-à-dire envers l’État comme envers la société. Mais il a aussi des droits. Les ignorer, ne fût-ce que dans de toutes petites choses, revient à consacrer un pouvoir arbitraire de fait. D’autant que l’État pour sa part a plus de devoirs que de droits. D’une manière générale il ne peut, sans renier sa mission fondamentale de service public, ignorer les intérêts légitimes des gens. Il ne peut par exemple, comme cela se voit si fréquemment, creuser une route et la laisser ouverte sans motif valable pendant trop de temps. Or quand cela se produit, les usagers lésés, parfois sérieusement, n’ont tout simplement aucun espoir de faire frapper d’amende l’État ou d’en obtenir un dédommagement. Quand l’électricité joue et endommage l’appareillage ménager, personne ne peut se le faire rembourser comme cela se pratique dans les pays évolués. Les gens se plaignent dans la presse ou demandent à leurs députés d’intervenir, de poser des questions au gouvernement, mais cela ne va pas plus loin. On oublie un peu trop que c’est l’État qui doit être au service du citoyen et non l’inverse. Maintenant que l’ancien système, qui faisait la part belle au pot-de-vin salvateur, est aboli, il faut que les directives du nouveau régime, qui a demandé à l’Administration de bien ménager le public qui s’adresse à elle pour des formalités, s’étendent à la notion d’équité et de droit légitime. L’État doit assurer des services, certes, mais il doit également reconnaître enfin que des personnes lésées, par des expropriations par exemple, doivent obtenir de suite leurs droits. Sans devoir recourir à de coûteuses et très longues procédures devant des commissions que, comble d’arbitraire, les services contre lesquels la plainte est dirigée forment eux-mêmes». Le président de la commission parlementaire de l’Administration et de la Justice, M. Chaker Abou Sleiman, abonde dans le même sens. Il souligne qu’en principe un citoyen peut toujours poursuivre l’État en justice, que cela prend beaucoup de temps et que souvent le dédommagement obtenu n’est pas à la hauteur du préjudice subi. Il estime cependant qu’on ne peut demander l’idéal, et qu’il faut comprendre que le changement souhaité, de longue haleine, nécessite la mise en place de structures techniques nouvelles. L’effort doit cependant être accompli, si l’on veut parvenir à l’État de droit et des institutions dont le nouveau pouvoir a fait son objectif.
Deux poids, deux mesures : il y a l’État d’un côté, le citoyen de l’autre. Un député souligne ainsi que «lorsqu’on commet une infraction, on est frappé d’une amende qu’on ne peut éviter de payer. Mais lorsque c’est l’État qui commet le forfait, le particulier lésé ne parvient, dans le meilleur des cas, qu’à obtenir un dédommagement tout à fait...