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Actualités - REPORTAGE

Justice - La Cour a entendu hier le pilote qui conduisait l'hélicoptère le jour de l'attentat Le Puma 906 n'a pu être piégé qu'à Adma, affirme le colonel Antoine Boustany (photo)

Audience émotion hier dans l’affaire Karamé. En écoutant le colonel à la retraite Antoine Boustany raconter comment il a réussi à faire atterrir l’hélicoptère Puma No 906 sur son flanc, car les roues étaient bloquées, sauvant ainsi tous les passagers sauf bien sûr le Premier ministre Rachid Karamé, tué sur le coup, l’assistance retient son souffle. Le colonel Jamal Mawas, de la partie civile, qui se trouvait aussi à bord de l’appareil ce sinistre 1er juin 1987, en tant qu’aide de camp de Karamé, sort précipitamment de la salle, gêné par les souvenirs. Et c’est le président Mounir Honein qui finira par exprimer le sentiment général en félicitant Boustany pour son exploit. Le colonel Boustany qui a quitté l’armée en 1992 est un témoin que défense et partie civile attendaient avec impatience. Chaque partie, y compris naturellement le procureur Adnane Addoum, lui avait préparé une série de questions et son audition ne s’achève qu’à 22h. Boustany commence à parler et lorsqu’il évoque le corps du Premier ministre coincé par terre, derrière le siège du pilote et à côté de celui du Dr Abdallah Racy qui ne parvient pas à parler, l’assistance a l’impression de vivre la scène. Le colonel a visiblement été marqué par cet événement et s’il avoue à la Cour que sa mémoire le trahit, il n’en reste pas moins, dans certains faits, d’une grande précision. Contredisant les thèses de la défense, il précise que, selon lui, la charge explosive n’a pu être placée à bord de l’hélicoptère qu’à la base d’Adma, «soit par un technicien de la base, soit par quelqu’un qui a été grandement aidé par un technicien de la base». La défense penche plutôt pour la version selon laquelle la charge aurait été placée lors de l’escale de Tripoli, où le Premier ministre avait été embarqué, ainsi qu’une dizaine de passagers et plusieurs bagages. Mais le colonel Boustany affirme qu’il est resté à bord de l’hélicoptère pendant cette escale qui a duré 7 minutes et il n’avait ouvert que la porte latérale de droite entièrement visible de son siège. Or, selon les conclusions de la commission d’enquête militaire et de l’enquête judiciaire, la charge aurait été placée dans une cavité entre le capitonnage et la paroi de l’appareil, soit à la place généralement réservée aux écouteurs, soit près du conduit hydraulique. Il affirme aussi que lors de l’inspection de routine qu’effectue le pilote avant de décoller, il n’a pas à ouvrir ce capitonnage. Sauvés par la grâce divine Le lundi premier juin 1987, il est notifié de sa mission peu avant 8 h, c’est-à-dire quelques minutes avant le décollage. Il quitte donc la base d’Adma avec son copilote, le brigadier Mlayès (qui sera lui aussi entendu par la Cour), et se dirige vers Zghorta pour embarquer le Dr Racy. Il se dirige ensuite vers Tripoli pour prendre à bord Rachid Karamé. Son dernier contact radio a été avec la base de Kleyate. Il se trouve alors au niveau de Ras Chekka et il informe la tour de contrôle de la base qu’il va se brancher sur la fréquence des opérations centrales à Yarzé. Mais il ne parvient pas à parler avec ces opérations, la fréquence étant occupée par le pilote d’un autre hélicoptère. Au moment où il va prendre la parole et alors qu’il a mis le pilotage automatique après avoir tourné l’avant de l’appareil vers Ras Chekka, il sent une terrible explosion et un souffle violent venant du côté gauche. L’hélicoptère se retrouve tourné vers la mer. Le pilotage automatique ne fonctionne plus et l’hélicoptère est sans contrôle. «Je reprends le volant et je tourne l’appareil vers la côte avant de remettre les commandes au copilote, car je veux situer la panne et essayer de la réparer. J’essaye d’atterrir sur un petit espace, mais les roues sont bloquées. J’essaye d’utiliser le mécanisme manuel en vain. Je demande au Dr Racy où se trouve le Premier ministre et d’un geste, il me l’indique par terre. Je me dis alors qu’il faut à tout prix se rendre dans un lieu où il y a des militaires et des secours. Je reprends les commandes et je me dirige vers Halate, tout en demandant à mon compagnon de se préparer à dégager les passagers». Le colonel Boustany se rappelle avoir vu une embarcation devant lui, dans la mer, alors qu’il se trouvait au niveau de Ras Chekka. Et après l’explosion, lorsque l’appareil est pointé vers le bas, il revoit la même embarcation en dessous de lui. (Selon l’acte d’accusation, c’est à partir de cette embarcation que Ghassan Menassa, actuellement en fuite, aurait actionné la radio commande de l’explosif). «Il y avait aussi d’autres embarcations dans la mer, dont un cargo. Mais cela ne m’avait pas paru anormal», ajoute-t-il. Selon le témoin, ceux qui ont posé la charge explosive ne se souciaient pas de la vie des passagers. «L’explosion a provoqué des pannes. C’est la grâce divine qui nous sauvés». Viennent ensuite les inévitables questions sur le poste radio GENAV. Le témoin confirme que les bases de Halate et Rayack utilisaient la même fréquence. Ce qui contredit les affirmations du brigadier Khalil Matar. Le témoin conteste toutefois le document présenté par le procureur comme étant une copie de celui qui était collé sur la paroi de l’hélicoptère, au-dessus du poste radio et qui indique les fréquences des diverses bases, car la fréquence d’Adma n’y est pas inscrite. Boustany déclare encore que, selon lui, la surveillance des hélicoptères à Adma était stricte «jusqu’à un certain point». Interrogé sur ses relations avec le brigadier Matar, il affirme qu’ils étaient en désaccord sur de nombreux points. Il ajoute qu’il a travaillé avec lui dans le cadre de la commission chargée d’enquêter sur l’accident survenu en plein vol à l’officier Sadaka et à son compagnon, causant leur mort. Matar était le président de cette commission et Boustany son adjoint. «Après avoir appris son rôle dans l’affaire Karamé, je me suis rappelé avoir eu l’impression qu’il voulait m’écarter de cette enquête». Cela ne l’a pas empêché de signer le rapport établi alors. Cette affaire est particulièrement obscure et l’acte d’accusation laisse entendre que le technicien qui accompagnait l’officier Sadaka pourrait être celui qui avait placé la charge à bord du Puma No 906. Comme celui-ci est mort, les supputations continuent et la vérité se fait attendre.
Audience émotion hier dans l’affaire Karamé. En écoutant le colonel à la retraite Antoine Boustany raconter comment il a réussi à faire atterrir l’hélicoptère Puma No 906 sur son flanc, car les roues étaient bloquées, sauvant ainsi tous les passagers sauf bien sûr le Premier ministre Rachid Karamé, tué sur le coup, l’assistance retient son souffle. Le colonel Jamal...