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Actualités - CHRONOLOGIE

Hraoui et Hariri ont établi un scénario pour contourner l'obstacle du mariage civil L'entente retrouvée sera scellée le soir en conseil des ministres (photo)

Les hautes sphères du pouvoir se sont montrées hier particulièrement avares de commentaires au sujet du bilan du nouveau sommet libano-syrien qui s’est tenu lundi dernier à Lattaquié. Il se confirme que l’essentiel de cette rencontre élargie a porté sur les problèmes internes libanais, sous l’angle notamment des rapports tendus entre les pôles de la troïka. Le volet régional, plus précisément l’initiative israélienne concernant la 425, n’a certes pas été négligé, mais il n’aurait été évoqué que d’une manière (relativement) succincte. La seule «fuite» publique qui a été orchestrée hier au sujet du résultat de la réunion de Lattaquié constitue une lapalissade, à savoir que le mot d’ordre est à «l’apaisement» et à l’atténuation des causes de frictions. En clair, cela signifie que les dirigeants sont appelés à éclipser et à éviter tout dossier ou tout problème susceptible d’entretenir la tension politique présente. Il faudra attendre la réunion du Conseil des ministres qui doit avoir lieu aujourd’hui au palais de Baabda sous la présidence du chef de l’Etat, Elias Hraoui, pour jauger d’une manière quelque peu précise le bilan de ce déplorable recours à l’arbitrage syrien pour le règlement de problèmes internes au Liban. Certains observateurs ont relevé hier sur ce plan que pour la première fois, le communiqué officiel publié lundi par la présidence syrienne a souligné explicitement que les entretiens bilatéraux avaient porté sur les derniers développements de la conjoncture politique sur la scène libanaise. Jusqu’à présent, les communiqués officiels syriens relatifs aux sommets entre les dirigeants des deux pays étaient laconiques et s’abstenaient de préciser que des problèmes internes au Liban avaient été discutés. Les communiqués se contentaient d’évoquer des généralités et des lieux communs pour exposer la teneur des discussions. Le fait que cette fois-ci la déclaration du porte-parole syrien ait fait état du contexte politique libanais n’a pas fait sourciller outre mesure les responsables officiels. Bien au contraire, les milieux loyalistes ont perçu cette «première» comme un indice plutôt «positif», en ce sens qu’il signifie que la partie syrienne a publiquement «parrainé» l’entente cordiale intervenue à Lattaquié. Quelle est la teneur de cette entente, et que s’est-il passé au cours des huit heures de discussions bilatérales, lundi? Si les pôles de la troïka ont tenu à se montrer discrets et peu bavards sur ce plan (du moins en public), il n’en reste pas moins que diverses indiscrétions ont quand même été filtrées à la presse par les sources proches du pouvoir. Les milieux en question ont indiqué notamment que le sommet élargi de Lattaquié a fourni l’occasion à MM. Hraoui, Berry et Hariri d’avoir une franche explication, chacun d’eux exposant en toute franchise les griefs qu’il avait à formuler à l’égard de l’autre (ou des deux autres). Les sources loyalistes susmentionnées n’ont pu préciser cependant pourquoi une telle explication, cartes sur table, ne pouvait pas avoir lieu au palais de Baabda (ou, d’une manière générale, en territoire libanais)... En tout état de cause, il ressort des indiscrétions parvenues aux médias que les fruits de la rencontre de Lattaquié devraient commencer à apparaître dès aujourd’hui, à la faveur du Conseil des ministres, pour ce qui a trait au dossier explosif du mariage civil préconisé par le président Hraoui (et qui a été à la base de la dernière brouille entre le chef de l’Etat et son premier ministre). Il aurait été convenu à ce propos (sous l’égide, évidemment, du président Assad) que lors de la séance du cabinet, cet après-midi, le président Hraoui demandera aux ministres qui le désirent de transmettre au ministre de l’Intérieur leurs observations concernant le projet de mariage civil. La suite des événements n’est pas difficile à deviner... Le chef de l’Etat a lui-même fait allusion hier, devant ses visiteurs, à cette solution «à la libanaise». Il a ainsi souligné qu’il confiera à son successeur le soin de faire aboutir sa proposition de mariage civil en lui indiquant que ce projet est désormais entre ses mains. Une telle allusion signifie, en clair, que le président Hraoui reconnaît désormais implicitement que son projet est renvoyé aux calendes grecques. (VOIR PAGE 3). L’échappatoire qui devrait être consacrée aujourd’hui lors de la séance du cabinet permet de faire d’une pierre deux coups: le chef de l’Etat aura obtenu une satisfaction purement morale en empêchant (comme le souhaitait M. Hariri) que le projet soit à nouveau discuté par le gouvernement; et dans le même temps, M. Hariri aura obtenu satisfaction en faisant obstruction au projet. Il reste que cet épisode a eu pour avantage de mettre en évidence une grave faille constitutionnelle: le chef du gouvernement s’est abstenu de signer un projet de loi approuvé (à la majorité des deux tiers) en Conseil des ministres, et la Constitution ne prévoit aucune disposition pour parer à une telle anomalie, alors que dans le même temps, le président de la République est tenu de signer dans un délai déterminé tout projet de loi approuvé par le gouvernement. S’il se confirme que le projet sur le mariage civil ne sera pas signé par M. Hariri, le chef du gouvernement aura ainsi créé un grave précédent, lourd de conséquences. Un précédent qui apporte en tout cas de l’eau au moulin du président Hraoui qui a réclamé à plusieurs reprises une révision des textes constitutionnels pour rééquilibrer les prérogatives respectives du président de la République, du premier ministre, des ministres, et du chef du Législatif. Les retrouvailles Hraoui-Hariri Il apparaît ainsi que les problèmes de fond restent encore entiers même si les pôles de la troïka sont contraints de «s’entendre». C’est ce qui explique sans doute les propos aigres-doux échangés par le président Hraoui et M. Hariri lors de leurs retrouvailles hier matin au palais de Baabda. Comme convenu, les deux hommes devaient se rencontrer en début de matinée au palais présidentiel pour confirmer le nouveau climat de détente censé marquer désormais les rapports entre les dirigeants. Recevant M. Hariri dans son bureau, le chef de l’Etat s’est empressé de souligner devant les caméras de la télévision que les correspondants de presse assignés au palais de Baabda sont sans doute «impatients» de voir M. Hariri «qui n’a pas visité le palais (présidentiel) depuis 25 jours». «Vous avez compté les jours», a aussitôt rétorqué le premier ministre. Répondant ensuite au chef de l’Etat qui affirmait sans détours qu’il avait effectivement compté les jours, M. Hariri a souligné: «Cela est un signe d’affection»... Au terme de ce bref échange devant les journalistes, les présidents Hraoui et Hariri ont fait le point de la situation, passant en revue les grandes lignes de l’ordre du jour du Conseil des ministres de cet après-midi. A sa sortie de Baabda, M. Hariri s’est refusé à toute déclaration, se contentant de souligner que tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes... Cette «entente retrouvée» au niveau de la troïka devrait porter aussi sur les autres problèmes en suspens qui ont envenimé ces derniers temps les rapports entre les responsables. Dans la pratique, le débat et les manœuvres portant sur l’élection présidentielle seraient gelés au stade actuel. Les surenchères sur les élections municipales sont, d’autre part, appelées à être dépassées dans la mesure où il aurait été convenu que ce scrutin aura bien lieu (le ministre de l’Intérieur pourrait annoncer demain, jeudi, la date de ces élections municipales). Quant au problématique dossier de la nouvelle échelle des salaires du secteur public (dont l’approbation est réclamée avec insistance par M. Berry), il aurait été décidé, lors du sommet de Lattaquié, que le programme de redressement approuvé par la troïka à la fin de l’année dernière serait réactivé, notamment pour ce qui a trait aux mesures financières et économiques susceptibles de juguler le déficit budgétaire. Concrètement, la nouvelle échelle des salaires ne serait ainsi avalisée et appliquée qu’après approbation d’une série de mesures susceptibles d’assurer au Trésor les recettes nécessaires pour couvrir les nouveaux salaires. Contre-offensive diplomatique Au niveau du volet régional, il aurait été convenu que Beyrouth et Damas s’emploieront dans le proche avenir à lancer une contre-offensive diplomatique conjointe afin de faire face à l’initiative israélienne relative à un retrait conditionnel du Liban-Sud. Dans ce cadre, M. Hariri et le chef de la diplomatie se rendront ensemble sur les bords du Barada demain, jeudi, afin de coordonner cette action commune avec le «numéro deux» syrien Abdel-Halim Khaddam et le ministre syrien des Affaires étrangères, Farouk el-Chareh. Il s’agira, essentiellement, d’entreprendre des démarches auprès des membres permanents du Conseil de Sécurité ainsi qu’auprès des pays arabes afin de plaider la cause d’une «application inconditionnelle» de la 425. Les responsables libanais et syriens discuteront également de l’attitude à adopter face à la récente prise de position du secrétaire d’Etat, Mme Madeleine Albright, qui a incité expressément le gouvernement libanais, par le biais d’un message adressé à M. Boueiz, de «prendre au sérieux» l’offre israélienne. La mission conjointe que MM. Hariri et Boueiz effectueront demain à Damas est, en soi, une première. Le chef du gouvernement et le ministre des Affaires étrangères effectuent très rarement des visites ensemble à l’étranger en raison, notamment, des divergences de vue qui les opposent dans plus d’un domaine. Mais dans le cas présent, la politique à suivre au sujet du dossier de la 425 et de l’initiative israélienne constitue un dénominateur commun facile pour les responsables officiels. Et pour cause: leur marge de manœuvre sur ce plan est particulièrement réduite.
Les hautes sphères du pouvoir se sont montrées hier particulièrement avares de commentaires au sujet du bilan du nouveau sommet libano-syrien qui s’est tenu lundi dernier à Lattaquié. Il se confirme que l’essentiel de cette rencontre élargie a porté sur les problèmes internes libanais, sous l’angle notamment des rapports tendus entre les pôles de la troïka. Le volet...