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Actualités - CONFERENCES DE PRESSE

Chareh, reçu hier soir par Boueiz, rencontrera aujourd'hui Hraoui Beyrouth et Damas réaffirment leur identité de vues face à Israël (photo)

C’est une visite (très) officielle que le ministre syrien des Affaires étrangères Farouk el-Chareh a entamée hier après-midi à Beyrouth, à l’invitation de son homologue libanais Farès Boueiz. Une visite qui s’est faite pour la première fois de manière très protocolaire: M. Chareh a été accueilli solennellement à l’AIB, peu avant 18 heures, par M. Boueiz. Il a eu droit à tous les honneurs réservés généralement à un ministre étranger des A.E. en visite officielle au Liban. Accompagné d’une délégation de six hauts fonctionnaires et responsables du ministère syrien des A.E., M. Chareh s’est rendu dès son arrivée au palais Bustros où il a eu un aparté d’une vingtaine de minutes avec son homologue libanais, avant la réunion élargie qui a groupé les deux délégations libanaise et syrienne. M. Chareh, qui a passé la nuit d’hier à l’hôtel «Vendôme», a conféré en soirée avec M. Boueiz à l’issue d’un dîner offert en son honneur par le chef de la diplomatie. Il rencontrera ce matin les ambassadeurs arabes accrédités à Beyrouth avant d’être reçu vers midi par le président Elias Hraoui qui offrira, au palais de Baabda, un déjeuner en l’honneur de son hôte syrien. Le chef du Législatif Nabih Berry et le premier ministre Rafic Hariri seront conviés à ce déjeuner. M. Chareh regagnera Damas dans l’après-midi. Ces concertations libano-syriennes sont placées, à l’évidence, sous le signe de la 425. Elles constituent dans ce cadre une «contre-offensive» diplomatique à la proposition israélienne visant à mettre en application la résolution 425 en contrepartie d’arrangements de sécurité au Liban-Sud. Le dossier du Sud ainsi que les tenants et aboutissants de la proposition israélienne concernant la 425 seront au centre de la visite que le ministre israélien de la Défense, M. Yitzhak Mordehaï, entamera aujourd’hui à Paris. L’Etat hébreu, rappelle-t-on, a sollicité officiellement l’aide de la France afin de soumettre sa proposition au Liban et à la Syrie. Cette question sera également l’un des principaux sujets discutés par le secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan, lors des entretiens qu’il aura à Beyrouth avec les dirigeants libanais, le 20 mars prochain. (VOIR PAGE 2). Selon certaines informations, M. Annan transmettra et discutera avec les responsables la teneur de la proposition israélienne. Ce même dossier sera aussi vraisemblablement évoqué au cours de la prochaine visite que le secrétaire au Foreign Office, M. Robin Cook, effectuera ce mois-ci à Beyrouth. C’est donc dans un tel contexte politico-diplomatique qu’interviennent les entretiens officiels de M. Chareh avec les dirigeants libanais. Dans les milieux proches du pouvoir, on affirme que ces concertations bilatérales visent, entre autres, à couper l’herbe sous les pieds de M. Mordehaï à la veille de son arrivée à Paris. Lors de la conférence de presse conjointe qu’ils ont tenue hier soir au palais Bustros à l’issue de leur première réunion de travail, MM. Boueiz et Chareh ont, de fait, clairement souligné à l’unisson que les positions libanaise et syrienne au sujet de la 425 sont en tous points identiques, à savoir que l’application de la résolution onusienne devrait se faire sans conditions préalables et ne saurait, par conséquent, faire l’objet d’une quelconque négociation avec Israël. Beyrouth et Damas estiment à ce propos que la proposition israélienne est «piégée» et vise, en «défigurant» la 425, à provoquer une dissociation de facto des deux volets libanais et syrien du processus de paix avec Israël. Dans ce cadre, les concertations bilatérales d’hier soir visent aussi à préparer, en quelque sorte, la prochaine visite de M. Annan à Beyrouth en court-circuitant d’office toute velléité de placer sur la table des négociations la proposition israélienne. La conférence de presse La position commune adoptée par Beyrouth et Damas sur ce plan a été clairement exposée par MM. Boueiz et Chareh au cours de leur conférence de presse au palais Bustros. Le chef de la diplomatie a commencé par souligner qu’il s’était entretenu avec son homologue syrien de «la crise irakienne, du dialogue euro-arabe, de la prochaine réunion de la Ligue arabe et naturellement de toutes les prétendues propositions qui circulent sur une éventuelle exécution de la part d’Israël de la résolution 425 du Conseil de Sécurité». «J’ai confirmé à mon homologue et aux membres de la délégation qui l’accompagne les constantes de la politique libanaise en ce qui concerne l’application des résolutions 425 et 426 du Conseil de Sécurité qui portent, dans leur propre formulation, les conditions mêmes de leur application», a commencé par dire M. Boueiz avant d’ajouter: «Rendues par l’instance internationale la plus importante, ces résolutions ne peuvent faire l’objet d’aucune concession, elles ne peuvent pas faire l’objet de pourparlers pouvant amener à la conclusion d’accords sécuritaires, elles ne peuvent qu’être appliquées à la lettre». Concernant la crise irakienne, M. Boueiz a rappelé la position libanaise «favorable aux solutions négociées» et «opposée à la politique des deux poids et deux mesures». Interrogé sur les chances d’une paix globale, «malgré tous les déboires surtout palestiniens», M. Boueiz a affirmé que «cette paix régionale ne peut qu’être globale car c’est la nature même du conflit israélo-arabe qui l’exige». «Le conflit est, de par sa nature israélo-arabe, on ne peut pas le subdiviser, et la résolution 242 du Conseil de Sécurité a très bien reflété la nature de ce conflit lorsqu’elle a parlé de pourparlers entre les arabes et les Israéliens» a-t-il répondu. M. Boueiz a indiqué que «le Liban a toujours défendu pareille approche du conflit» et a rappelé que «la délégation libanaise au congrès de Madrid a très bien expliqué à M. Baker que les Etats-Unis commettraient une grave erreur si jamais ils essaient d’effriter le front arabe uni en favorisant des pourparlers bilatéraux». Le ministre des A.E. libanais considère que «la paix dans la région doit être celle de ses peuples et non celle de ses régimes» et «cela on ne peut l’obtenir qu’à travers une paix globale». «Telle ne semble pas être la conviction israélienne qui continue à chercher par tous les moyens à obtenir, même artificiellement, des pourparlers bilatéraux, car ce que cherche Israël c’est réussir une tactique et non défendre une stratégie», devait-il conclure. M. Boueiz a indiqué enfin que c’est M. Chareh qui se chargera d’exposer l’action commune que les deux pays comptent entreprendre lors de la réunion des congrès des pays non alignés et des pays islamiques ainsi que lors de la prochaine réunion de la Ligue arabe. La déclaration de Chareh Prenant à son tour la parole, le chef de la diplomatie syrienne a souligné la convergences des points de vue entre le Liban et la Syrie au sujet de l’interprétation de la résolution 425 «qui doit être mise en œuvre sans aucune condition préalable». «Comme l’a dit le ministre Boueiz, cette résolution est un verdict prononcé par la plus haute instance internationale, a déclaré le chef de la diplomatie syrienne. Toute négociation à ce sujet signifie que ce verdict va être examiné de nouveau ce qui est inacceptable pour le Liban. Je voudrais dire que depuis 20 mois, le gouvernement israélien tente d’éviter la reprise des négociations à partir du point où elles se sont arrêtées et de s’engager à respecter les accords conclus avec les Arabes. Le gouvernement de (Benjamin) Netanyahu ne veut pas la paix. Il veut causer des problèmes à toutes les parties. Des problèmes au Liban, à la Syrie, aux Palestiniens et à toute la région. La proposition adressée au Palestiniens pour entamer les pourparlers de la solution définitive, les propos sur l’acceptation de la 425 et les messages envoyés à la Syrie par le biais des Américains et des Européens pour une reprise des négociations tout en mettant des obstacles afin qu’elles ne recommencent pas à partir du point où elles s’étaient arrêtées, prouvent que Netanyahu ne pense pas à la paix. Il parle de paix pour des raisons tactiques, mais sa position stratégique est hostile à la paix. Espérons que nous avons tort dans notre raisonnement et qu’il veuille réellement réaliser une paix juste et globale dans la région». Sur l’attitude de la France, sollicitée par Israël pour jouer le rôle d’intermédiaire avec le Liban concernant la 425, M. Chareh a déclaré: «La seule chose que les Français nous ont transmise est que leur position, exprimée par le ministre des A.E, M. (Hubert) Védrine lors de sa visite à Beyrouth, à Damas et dans les capitales de la région, est inchangée. Cette position stipule que la 425 ne comprend aucune condition. Ils (les Français) nous ont aussi informés qu’ils n’entreprendront aucune initiative sans l’accord du Liban et de la Syrie. Cela prouve que leur position est toujours la même et ils ne tomberont pas dans le piège israélien. La France est un grand pays qui a beaucoup d’influence sur les scènes régionale et internationale». Réaffirmant que la paix est un processus global, le ministre syrien a déclaré: «Nous traversons une étape délicate et nous ne pouvons pas permettre à Israël de pécher en eaux troubles. Sans paix globale il ne peut y avoir de sécurité et de stabilité. Netanyahu veut faire croire qu’il est prêt à appliquer les résolutions de l’ONU à un moment où des critiques ont été soulevées dans le monde entier sur la politique des deux poids deux mesures». M. Chareh faisait allusion aux menaces de frappes militaires adressées contre l’Irak pour l’obliger à respecter les résolutions de l’ONU, alors que l’Etat hébreu se dérobe à ses obligations internationales. La «carte» libanaise Le chef de la diplomatie syrienne a précisé que les entretiens avec M. Boueiz ont porté sur «les rôle européen et français, ainsi que sur la position de la Grande-Bretagne qui a qualifié d’illégale la poursuite de la construction des colonies». «Nous sommes attachés à ce que l’Europe joue un rôle important dans le processus de paix, a-t-il dit. Lorsque le président de la Commission européenne, M. Jacques Santer, nous a rendu visite, nous le lui avons répété. Nous n’avons pas d’inconvénients à ce que ce rôle soit complémentaire de celui des Etats-Unis qui ont lancé la première initiative de paix à Madrid. Mais il faut d’abord qu’il y ait un rôle américain. Sinon, ils n’auront rien à compléter. S’il n y a pas de rôle américain, les Européens doivent prendre l’initiative et doivent faire preuve d’efficacité et de dynamisme». Un éventuel retrait israélien suivi d’une séparation des volets libanais et syrien ne ferait-il pas perdre à Damas la carte libanaise? «De quelle carte voulez-vous parler, a répondu M. Chareh. Il s’agit là d’idées véhiculées par les Israéliens et que certains répètent, peut-être de bonne foi. Vous souvenez-vous quand Israël répétait sans cesse que la cause palestinienne était une carte syrienne? Cette cause s’est finalement terminée à Oslo, puis à Gaza, où sa situation est peu enviable. La Syrie est une force de soutien pour toute partie arabe et tout pays arabe solidaire de la Syrie renforce notre position. C’est notre unité qui fait notre force et qui donne de l’espoir aux citoyens libanais, syriens, jordaniens, et palestiniens. Si le Liban est une carte aux mains de la Syrie, Damas, avec toute la force et les moyens qu’il possède, est une carte aux mains du Liban. Celui qui n’a pas cette vision stratégique a tort est sert uniquement les allégations israéliennes». M. Chareh a ajouté que l’objectif d’Israël à travers sa dernière offensive politique au sujet de la 425 est de «démanteler la résistance libanaise sans même se retirer du Liban. Il veut une copie conforme de l’accord du 17 mai».
C’est une visite (très) officielle que le ministre syrien des Affaires étrangères Farouk el-Chareh a entamée hier après-midi à Beyrouth, à l’invitation de son homologue libanais Farès Boueiz. Une visite qui s’est faite pour la première fois de manière très protocolaire: M. Chareh a été accueilli solennellement à l’AIB, peu avant 18 heures, par M. Boueiz. Il a eu...