Théâtre Gulbenkian -LAU Illusion et réalité chez Pirandello (photo)

Les élèves de la «Humanities Division» ont présenté une œuvre de Pirandello, en anglais, au théâtre Gulbenkian (L.A.U.). «I am dreaming, but am I» (Rêve ou réalité?) est bien un pur produit de l’auteur de «Henri IV». Courte, condensée, déroutante, jouant avec dextérité sur les pièges de l’illusion, elle met en scène un couple en proie aux démons de la folie, des rapports troubles et ambigus de la fidélité et de la trahison dans une relation... Est-ce une pièce autobiographique de Liugi Pirandello? Probablement puisque le dramaturge, prix Nobel de littérature en 1934, a vécu «dramatiquement» son mariage. Sa femme, devenue folle, et internée définitivement assez tard, a mené avec virulence les assauts d’une malade qui le soupçonnait sans cesse et sans raison d’infidélité... Une expérience dont l’écho se retrouve dans son œuvre notamment cette pièce où les «cauchemars» d’une femme inquiète et angoissée prennent le dessus sur la réalité, pour se ressaisir ensuite comme une somnambule qui émerge vers une lumière sécurisante...
Interprétée avec justesse de ton par de jeunes acteurs amateurs (Rana Alameddine et Waël Sabbagh),cette pièce assez sombre consiste en une réflexion tragique et désespérée sur la conscience, sur les rapports entre le moi insaisissable et les autres, en un authentique jeu de masques…
D’ailleurs Pirandello n’a t-il pas donné à toute son œuvre le sous-titre de «masques nus»?
Mise en scène sobre et efficace de Diana Barghout et Chérine el-Kurdy qui, même dans les moments d’extrême hystérie et démence, demeure intense sans le moindre dérapage. A noter aussi un éclairage adéquat et un décor simple (un canapé où les protagonistes s’affrontent mais peut-être aussi symbole d’un divan à délier les secrets chez un psychiatre?) et quelque peu original grâce à ces deux cadres en bois suspendus en l’air reflétant le vide comme d’improbables miroirs où se croisent déliquescence et absurde…
E.D.