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Actualités - CONFERENCES ET SEMINAIRES

Congrès d'histoire à Khan El-Franj Saïda se penche sur Sidon .. (photo)

Pour faire connaître le passé fabuleux de Sidon et faire revivre sa mémoire, l’Association Saïda patrimoine et environnement, présidée par Mme Bahia Hariri, organise un congrès historique inauguré hier par le président du Conseil, M. Rafic Hariri, à Khan el-Franj.

Dans une allocution, M. Hariri a rappelé que Saïda, sa ville natale, «a toujours fait preuve de courage et de loyauté. Elle a aspiré, tout au long de son histoire, à être une référence pour un pays libre, pour une nation fière…». M. Hariri a dénoncé les incessantes agressions israéliennes contre le Sud soulignant que «les derniers bombardements ont mis en relief la résistance de cette ville».
«Vous vous réunissez aujourd’hui autour de l’histoire de Saïda», a noté encore M. Hariri, «qui n’est en fait que le récit d’une formidable constante: celle du développement humain; celle de l’espoir en un avenir meilleur…» Et de se demander «qu’est-ce que l’histoire? L’événement historique est créé par la conscience et la volonté, il est soutenu par la foi».
M. Hariri a dit en conclusion: «Votre congrès aidera à une meilleure prise de conscience de l’existence et du destin de cette ville».
Mme Bahia Hariri a précisé, pour sa part, que ce premier congrès vient «couronner plus de quinze années d’un travail commencé en 1982, à la veille de l’invasion israélienne et dont le but est de restaurer notre patrimoine historique, religieux, architectural…».
— M. Assaad Diab, président de l’UL, a ouvert la session en souhaitant la création d’un fonds national pour la sauvegarde du patrimoine libanais, l’ouverture d’un musée local et la publication des recherches «pour que les efforts des uns et des autres ne restent pas vains».
Présentant M. Eric Gubel, M. Diab a dit que ce chercheur au CNRS avait «ramené au Liban, en tant qu’expert Unesco, plusieurs pièces archéologiques du patrimoine libanais volées au cours de la guerre».
— Eric Gubel (du Vesalius College, Belgique) a axé son intervention sur les époques paléophénicienne et phénicienne de Sidon. Citant R. Dussaud (1927) il dit «la richesse du site archéologique de Sidon offre le plus impressionnant contraste avec la pauvreté des découvertes à Tyr où l’antiquité a été réduite en miettes. Aucune localité en Syrie n’a fourni un matériel archéologique plus abondant que Sidon et ses environs immédiats».
«En 677, reprend M. Gubel, le roi assyrien Asarhadon s’empara de Sidon, ville où il ne laissa point une pierre sur une autre infirmant ainsi à tout jamais chaque initiative tentant d’en retracer l’histoire. L’itinéraire de ses troupes est considéré par plusieurs historiens comme une liste de villes dépendant du royaume de Sidon. Si tel est le cas, nous sommes amenés à la conclusion que ses princes avaient su se tailler un royaume d’une extension considérable après la dissolution du royaume bicéphale tyro-sidonien du IXe siècle».
M. Gubel a souhaité que des recherches se développent pour le plus de documents possible, afin de pouvoir esquisser le profil culturel de la métropole décapitée. Prenant comme indices des objets retrouvés au cours de différentes fouilles archéologiques, M. Gubel a essayé de mettre en lumière le passé culturel de Sidon la phénicienne. «Qu’est devenue Sidon après les ravages causés par les Assyriens?, s’est-il demandé. A en croire la littérature existante, ces derniers n’ont guère laissé plus de traces de leur présence qu’ils n’ont laissé des traces de la place telle qu’elle était avant leur intervention».
Sidon a-t-elle survécu au désastre décrit dans les textes d’Asarhadon? Malgré l’hémorragie culturelle dont les premières générations trahiront encore les symptômes, nous croyons que si. Marquée par les sièges de Sidon en 702 et 677 comme celui de Tyr en 670, l’intervention assyrienne en Phénicie ne visait qu’à démilitariser la région, tout en laissant en place des structures de commerce que les Assyriens étaient capables de contrôler, mais pas de gérer. Les produits exportés ne portent plus le cachet artistique des ateliers sidoniens qui auront besoin d’un siècle pour retrouver leur dynamisme. Malgré le fait que l’exportation fût ainsi réduite au «bulk-trade», l’adagium resta toujours «business as usual». Et c’est grâce à ce pragmatisme économique que la métropole retrouvera son dynamisme culturel que notre collègue Stucky fera revivre tout à l’heure et dont, j’espère, des fonds du gouvernement, la coordination de la DGA et l’appui de comités nationaux et internationaux dégageront les traces sur le terrain».
— M. Rolf Stucky (université de Bâle, Suisse) a parlé pour sa part de Saïda aux époques perse, hellénistique et romaine. «Les huit siècles de domination successive perse, hellénistique et romaine ont pour les cités phéniciennes en général et pour Sidon en particulier de graves conséquences: pour la première fois dans leur histoire millénaire, elles perdaient leur autonomie politique pour une longue durée», dit-il.
«La culture matérielle de Sidon entre le 6e siècle av. J.C. et le 3e s. ap. J.C, poursuit le conférencier, vit du paradoxe de l’ouverture vis-à-vis des innovations venues de l’extérieur — Iran, Grèce et Italie — et de la volonté de maintenir les traditions locales. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, cet antagonisme n’est pas une faiblesse mais une force émanant de cette culture. La curiosité vis-à-vis des partenaires voisins et lointains, caractéristique pour un peuple de marchands vivant de contacts, a facilité l’introduction de nouveaux motifs iconographiques, de tendances stylistiques et de matériaux de construction et de sculpture. Les prométhées de taureau ou de griffon, les reliefs des sarcophages royaux ou les statues d’enfants en marbre dédiées à Echmoun suivent les grandes lignes d’une mode hellénisante, commune au bassin oriental de la Méditerranée dès le début du 5e s. av. J.C. Mais à l’époque hellénistique, aussitôt que l’autonomie politique et l’identité culturelle de la ville sont menacées, une résistance locale se manifeste contre la suprématie extérieure. Par le retour aux vieilles institutions politiques et aux images de culte traditionnelles, les Sidoniens cherchent leurs propres sources idéologiques et spirituelles. La «pax romana» égalise apparemment toutes les tendances individuelles en Phénicie. Pourtant, il ne faut attendre que quelques siècles pour voir apparaître les traditions locales, conservées sous la «mince couche» de la romanisation».
— Last but not least, George Tate (de l’université de Versailles-Saint Quentin-en-Yvelines France) a parlé lui de Sidon aux époques byzantine et arabe en passant par les croisades. «Sur la ville de Sidon aux époques byzantine et arabe en avant les croisades, les sources directes sont minimes. Nous pouvons comprendre le rôle de Sidon dans cette période à travers l’histoire des cités du littoral syro-phénicien auquel elle appartient».
Ainsi, d’après le conférencier, dans l’histoire de Sidon, deux périodes peuvent être distinguées:
1 — La Sidon du IVe siècle au milieu du Ve siècle: durant cette époque, Sidon n’est pas mentionnée parmi les cités principales de la côte phénicienne. Elle apparaît comme une cité de 3e ordre, sa richesse venait surtout de l’agriculture, une agriculture favorisée par une paix quasi-totale pendant ces siècles.
2 — La Sidon du VIe siècle aux croisades. Les crises économiques et démographiques (épidémies, pénuries alimentaires…) que connaissait la Syrie pendant cette période n’ont pas épargné Sidon. Mais les cités du littoral phénico-palestinien ont été relativement peu atteintes par les grandes catastrophes. Leur relative richesse et leurs liens avec l’Egypte permettaient à ces villes d’opposer une forte résistance aux premiers croisés et aux rois de Jérusalem.
«Dans la seconde moitié du 6e siècle et dans le premier tiers du 7e siècle, Sidon est une ville byzantine, hellénisée et chrétienne probablement acquise au Concile de Chalcédoine. Elle fut conquise en dernier par les armées arabo-musulmanes probablement vers 640. Elle fut reprise par Moawiya au début du califat d’Osman. Il est possible qu’après cette conquête Sidon soit devenue une ville «entièrement peuplée par des Perses amenés par le calife Moawiya», selon Jidejian.
Ainsi Saïda était alors une ville nouvelle ou, du moins, une ville dont la population avait été renouvelée…
Signalons enfin que parallèlement à ce congrès d’histoire, deux expositions, l’une archéologique et l’autre artisanale, se tiennent à Saïda, sous les voûtes du vieux Khan.

Maya GHANDOUR
Pour faire connaître le passé fabuleux de Sidon et faire revivre sa mémoire, l’Association Saïda patrimoine et environnement, présidée par Mme Bahia Hariri, organise un congrès historique inauguré hier par le président du Conseil, M. Rafic Hariri, à Khan el-Franj.Dans une allocution, M. Hariri a rappelé que Saïda, sa ville natale, «a toujours fait preuve de courage et de...