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Actualités - ANALYSE

Albright à l'heure H du Haschisch

A la veille de l’arrivée dans la région du secrétaire d’Etat Madeleine Albright, un rappel américain tout à fait insidieux à l’adresse du Liban et de la Syrie, un de ces «petits messages» dont la diplomatie à pression est friande: le périodique «Insight» qu’édite le «Washington Post» publie un rapport de six pages, qu’il attribue à la «Drug Enforcement Agency» (DEA). Cet organisme hautement qualifié, sinon largement informé, soutient que contrairement aux affirmations des autorités locales, répercutées par de précédents rapports, la production de narcotiques (haschisch et pavot) se poursuit gaillardement dans la plaine de la Békaa.
Le timing, le lieu et le contenu de ces «révélations», qui insistent lourdement sur la présence syrienne dans la haute plaine frontalière, révèlent par eux-mêmes le but recherché: exercer une pression accentuée sur Damas, dans la perspective des entretiens que Madeleine Albright doit y avoir et qui sont considérés d’avance comme «très difficiles» par Washington.

Réaction

Cet objectif est d’autant plus évident qu’il y a à peine quelques mois, la même DEA relevait en se frottant les mains que les cultivateurs libanais avaient renoncé aux cultures interdites et que le Liban n’en exportait plus. Il n’est pas étonnant cependant que les Américains changent de ton. D’un côté parce qu’Albright, qui s’est décidée à visiter Damas (non inclus dans son programme initial de tournée régionale), a besoin qu’on lui prépare le terrain.
Surtout qu’elle veut parler avec les Syriens du Liban-Sud où la situation est toujours tendue.
Et d’un autre côté parce que le phénomène Toufayli n’a certainement pas échappé à l’attention des Américains. Ces derniers, voyant le laxisme des autorités locales à cet égard, ont pu en déduire que les cultivateurs de la Békaa, déçus par le manque d’aide, ont finalement repris la culture du H et de l’O (opium) en renonçant aux cultures de substitution, comme le tabac dont l’Etat libanais ne leur a pas racheté la production comme promis.
Faisant preuve de réflexes plus vifs que ceux de Beyrouth, le lobby libanais de Washington, proche comme on sait de l’opposition radicale de l’Est, a immédiatement réagi à la publication du rapport de la DEA dans le «Insight», en adressant des lettres de protestation au département d’Etat mais aussi à la Maison-Blanche. Dans cette supplique au président Clinton, le lobby demande que Madeleine Albright œuvre pour le retrait israélien du Liban-Sud mais discute aussi avec Damas le maintien de 40.000 de ses hommes au Liban, sans départ ni redéploiement comme prévu dans les accords de Taëf. La lettre affirme que ce pays est pris en otage, que la culture de drogue n’alimente pas sa propre économie nationale, du reste handicapée par une main-d’œuvre étrangère massive — plus d’un million et demi d’ouvriers, dit le document —, qui lui est imposée et qui pompe ses ressources pour les envoyer ailleurs...
Et de rappeler que durant l’opération «Raisins de la colère», Israël a pu détruire et massacrer sans que les forces présentes pour protéger le Liban puissent éviter d’être elles-mêmes prises à partie dans certaines de leurs positions à proximité de Beyrouth, ce qui de l’avis de ces opposants prouve que leur présence ne se justifie pas techniquement.
Toujours est-il que malgré la pression du lobby libanais radical, soutenu par des membres du Congrès, Albright n’envisage pas au départ de visiter le Liban dans le cadre de sa tournée et ne le ferait, indique une source informée, que s’il y avait quelque chose de nouveau, de concret, à l’issue de ses entretiens à Tel-Aviv et à Damas en ce qui concerne le Sud. A tout hasard cependant, ajoute cette même source, le secrétaire d’Etat s’est fait remettre un rapport détaillé sur la question libanaise, élaboré par un cadre du département d’Etat qui avait été longtemps en poste à Awkar.

Ph. A-A.
A la veille de l’arrivée dans la région du secrétaire d’Etat Madeleine Albright, un rappel américain tout à fait insidieux à l’adresse du Liban et de la Syrie, un de ces «petits messages» dont la diplomatie à pression est friande: le périodique «Insight» qu’édite le «Washington Post» publie un rapport de six pages, qu’il attribue à la «Drug Enforcement...