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Actualités - CHRONOLOGIE

L'affaire Abou Rizk domine la réunion de la commission parlementaire de l'administration et de la justice Nouvelle proposition de loi pour la suppression du service du drapeau (photos)

Le visage sombre, le chef du gouvernement, M. Rafic Hariri, répond laconiquement aux questions de la presse à sa sortie d’un entretien d’une heure et demie avec le président de la Chambre, M. Nabih Berry. Il se contente d’indiquer du bout des lèvres que la conversation a porté sur la loi électorale.
Le ton est très peu convaincant. Au point qu’un journaliste, qui couvre les activités du Parlement depuis de nombreuses années, fait remarquer que M. Hariri commence à agir comme feu le président Chamoun qui fournissait à la presse des indications en contradiction totale avec la teneur de ses entretiens avec le président de la Chambre. Selon des sources parlementaires, l’affaire Elias Abou Rizk a été au centre de l’entrevue Berry-Hariri. De manière générale, l’arrestation du leader syndical a été hier au centre des activités de la Chambre et a dominé le débat — houleux — au sein de la commission parlementaire de l’Administration et de la Justice, divisée entre députés opposants et loyalistes.
La commission que préside M. Chaker Abou Sleiman était réunie, en présence du ministre de la Justice, M. Bahige Tabbarah, pour débattre de trois sujets inscrits à son ordre du jour: la nomination de nouveaux magistrats, la suppression des tribunaux de première instance et la prolongation de l’âge de retraite de certains juges. Mais à l’ouverture de la séance, le député Zaher Khatib a soulevé la question de l’arrestation de M. Elias Abou Rizk, dénonçant vivement les «mobiles politiques vindicatifs» qui l’ont commandée. M. Khatib voulait que la commission planche sur cette affaire et a demandé que le procès-verbal de la séance — les réunions des commissions se tiennent à huis clos — soit rendu public. Les députés loyalistes ont protesté vivement et le ministre de la Justice a fait remarquer que cette question ne figure pas à l’ordre du jour de la réunion. Mais M. Khatib ainsi que quelques-uns de ses collègues ont poursuivi sur leur lancée, dénonçant le caractère «arbitraire» de l’arrestation du leader syndical pour cause d’«usurpation de titre et de pouvoir».
Et l’opposition parlementaire qui avait voté jeudi dernier une motion contraignant le gouvernement à respecter les lois et la Constitution est revenue à la charge hier, soulignant la nécessité que l’Exécutif «respecte les dispositions du document d’entente nationale, se rapportant notamment au principe de la séparation des pouvoirs, à la préservation des libertés publiques et précisant que le peuple est la source de tous les pouvoirs». Un long débat s’est ensuivi. Selon des sources parlementaires, les députés étaient tous d’accord sur le fait que l’Etat ne doit pas se mêler des affaires des organismes ouvriers.

«Esprit vindicatif»

Les opposants, parmi eux, insistaient sur le caractère «vindicatif» des poursuites engagées contre le leader syndical, apprend-on de même sources. Pour l’opposition parlementaire, l’action en justice intentée contre M. Abou Rizk constitue «un pas sur la voie de la dictature» et commande «une mobilisation générale des Libanais contre le massacre des libertés». Les députés hostiles à la politique du Cabinet Hariri ont souligné avec insistance le fait que l’affaire Abou Rizk n’a «rien de judiciaire» et reste «purement politique» et ont exprimé leur indignation devant «l’immixtion du Pouvoir politique dans les affaires de la justice». «Il ne faut pas oublier qu’en plus de son titre de leader syndical, Abou Rizk a une autre qualité, politique contestataire», a-t-on affirmé dans ces milieux où l’on a considéré que l’Etat cherche à travers la bataille qu’il mène contre le leader syndical à adresser un message aux courants de l’opposition.
En dépit du souhait des députés opposants de rendre public le procès-verbal de la réunion, M. Chaker Abou Sleiman n’a abordé que d’une manière laconique le débat parlementaire autour de l’arrestation de M. Abou Rizk. Il a souligné que les députés ont tous convenu de la nécessité de respecter les libertés publiques.
En réponse aux questions de la presse, M. Abou Sleiman a répondu en indiquant qu’il n’est pas possible de commenter la détention de M. Abou Rizk, partant du principe de la séparation des pouvoirs. «Nous ne pouvons pas réclamer une chose et son contraire. Mais nous avons défini des principes généraux auxquels il n’est pas question de renoncer, comme le respect des libertés syndicales ou politiques», a-t-il affirmé ajoutant qu’une «grande partie de l’opinion publique considère que l’arrestation d’Elias Abou Rizk constitue une atteinte aux libertés publiques».
Si une bonne partie de la réunion de la commission a été consacrée à l’affaire Abou Rizk, le reste a porté sur le développement et la préservation du Pouvoir judiciaire. Le débat a été lancé à la faveur de l’examen des trois textes inscrits à l’ordre du jour de la réunion. Les députés ont considéré les trois sujets comme étant «fractionnés» et se sont déclarés «inaptes» à les examiner, a-t-on appris de sources parlementaires. Ils devaient demander au gouvernement de les grouper dans un même projet de loi et de joindre au texte un exposé des motifs clair et exhaustif. Les parlementaires se sont étendus sur le projet relatif à la prolongation de l’âge de retraite de certains juges et ont demandé au ministre de la Justice de leur expliquer ce qui le justifie.
Selon certaines sources proches des personnes réunies, nombreux sont les députés qui ont exprimé leur opposition au maintien dans le cadre de juges qui ont atteint l’âge de la retraite. Selon les mêmes sources, il y a de fortes chances que la commission renvoie le texte au gouvernement.

Le service du drapeau
et l’échelle des salaires

Si la réunion de la commission de l’Administration et de la Justice a revêtu un caractère politique, celles des commissions de la Défense nationale et des Finances et du Budget étaient purement techniques. La commission de la Défense a planché sur la proposition de loi exemptant les natifs de 1975 et des années précédentes du service du drapeau. L’examen du texte a été toutefois reporté à jeudi prochain parce que cinq députés ont présenté à la Chambre une nouvelle proposition de loi concernant l’abrogation du service militaire. Les députés sont Samir Azar, Mohamed Abdel-Hamid Beydoun, Mohamed Fneich, Ibrahim Amine el-Sayyed et Assem Kanso.

Quant à la commission des Finances qui poursuit l’examen de la nouvelle échelle des salaires dans le secteur public, elle n’a pas encore réussi à s’entendre avec le gouvernement au sujet de la modification de l’horaire de travail au sein des administrations publiques, de l’évaluation de la productivité des fonctionnaires et du salaire de base des fonctionnaires établis à l’étranger.

Les députés considèrent qu’il n’est pas nécessaire de prolonger de deux heures l’horaire de travail au sein de l’administration pour qu’elle soit plus efficace, estimant par ailleurs que l’évaluation du travail des fonctionnaires laisserait la voie ouverte à davantage d’immixtions politiques dans les affaires de l’administration, d’autant que cette évaluation relève du Conseil de la Fonction publique.

La commission a approuvé deux barèmes du projet relatif à la nouvelle échelle des salaires. Il lui reste un seul sur lequel elle planchera la semaine prochaine. Le président de la commission, M. Khalil Hraoui, ne veut toujours pas donner des précisions au sujet des barèmes approuvés «pour ne pas paver la voie à des interprétations et à des réclamations».

Quelque temps avant que la commission n’achève ses travaux, le chef du gouvernement sort de son entretien avec M. Berry. Le ministre de la Défense, M. Mohsen Dalloul, a assisté à une partie de la conversation, M. Hariri est aussitôt assailli par les correspondants de presse mais, contrairement à son habitude, il ne s’arrêtera que quelques instants devant eux, le visage fermé, pour indiquer qu’il a débattu avec son hôte de la nouvelle loi électorale et que l’examen de l’échelle des salaires dans le secteur public se poursuit en commissions.

Tilda ABOU RIZK
Le visage sombre, le chef du gouvernement, M. Rafic Hariri, répond laconiquement aux questions de la presse à sa sortie d’un entretien d’une heure et demie avec le président de la Chambre, M. Nabih Berry. Il se contente d’indiquer du bout des lèvres que la conversation a porté sur la loi électorale.Le ton est très peu convaincant. Au point qu’un journaliste, qui couvre...