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Actualités - ANALYSE

Sourde inquiétude des loyalistes sur la portée de la visite pontificale

A mesure qu’on se rapproche du 10 mai, l’inquiétude grandissante des prosyriens se réflète par un surcroît de déclarations insistant sur la nécessité de garder à la visite papale un caractère purement paroissial, sans aucune connotation politique. Ce qui serait effectivement le meilleur moyen d’éviter une quelconque évocation de la présence syrienne, du rétablissement de la souveraineté et de l’autonomie de décision nationales. Certains vont plus loin encore, en posant des conditions ou en conseillant au souverain pontife de retirer sa reconnaissance à l’Etat hébreu... M. Walid Joumblatt met en garde pour sa part contre un départ des forces syriennes «car l’unité nationale reste précaire à l’ombre du système pourri issu des accords de Taëf...» en se demandant si en cas de retrait l’alternative ne serait pas «un régime militaire ou une nouvelle guerre civile».
Le synode pour le Liban avait appelé de ses vœux la libération du Sud en base des résolutions de l’ONU, le rétablissement de la souveraineté nationale, une paix intérieure impliquant le retrait des forces syriennes pour que les forces régulières libanaises prennent en charge tout le territoire. Il avait souligné qu’il n’est rien de plus démoralisant pour le peuple libanais que de sentir qu’il n’est plus souverain, impression qui paralyse la vie nationale, retarde le retour des déplacés et alimente un flot incessant d’émigration. Le manifeste du synode citait le pape qui constatait en 1991 que «le Liban est disloqué. Il a connu de longues années durant, au su et au vu du monde entier, une terrible agonie. Et nul n’a voulu l’aider à surmonter ses épreuves intérieures, à se libérer des éléments et des forces étrangères qui ont voulu l’utiliser à leurs propres fins. Il est temps que toutes les forces armées non libanaises s’engagent à quitter le sol de ce pays pour que les Libanais choisissent une formule de vivre en paix ensemble, dans la fidélité à leur Histoire, en harmonie avec un patrimoine religieux et culturel diversifié».

Réactions

Les conclusions du synode avaient provoqué comme on sait bien des remous et des protestations. Des fractions y avaient vu une provocation portant atteinte à l’esprit de dialogue islamo-chrétien. Elle avaient souhaité que l’exorde papale, qui devait conclure officiellement le synode et qui n’a pas encore été proclamée, rétablisse pour ainsi dire l’équilibre de la balance en évitant les thèmes litigieux et en mettant l’accent sur les éléments qui unifient les Libanais, non sur ceux qui les divisent.
Toute la différence peut cependant être dans le ton. On se demande de tous côtés aujourd’hui si le pape va évoquer, dans ses propos publics ou dans son exorde pour le synode, les questions politiques ayant trait à la souveraineté et à l’indépendance du Liban.
Beaucoup pensent qu’il ne lui est tout simplement pas possible d’ignorer de tels problèmes, vitaux pour le pays visité, mais qu’il pourrait y mettre suffisamment de formes, sans toucher au fond, pour que nul ne se sente froissé.
«En vérité, souligne un modéré, les Libanais sont bien entendu unanimement d’accord, tout à fait solidaires — et il l’ont prouvé à maintes reprises — en ce qui concerne le Sud, qu’on doit libérer de l’occupation israélienne. Par contre, ils ne s’entendent pas bien en ce qui concerne la présence des forces syriennes. Une partie y voit une nécessité persistante pour le maintien de l’ordre, voire pour la protection d’une souveraineté, d’une indépendance, d’une unité nationales vues sous un certain angle. Car selon elle un retrait «prématuré» de ces forces entraîneraît une déstabilisation fatale pour le pays, voire le retour à la guerre civile comme le dit M. Joumblatt. L’autre partie de son côté pense que le pays politique n’existe pas quand la souveraineté, l’indépendance, le pouvoir de décision autonome ne sont pas garantis par le retrait de toute présence armée étrangère et par le déploiement des forces régulières nationales sur l’ensemble du territoire. Ceci étant, poursuit cette personnalité, la balle est objectivement dans le camp des tenants du pouvoir. Ce sont eux qui, sans craindre de dénoncer par là leur propre incurie, affirment que le pays ne s’est pas encore assez bien relevé — sept ans après la fin des hostilités! — pour se passer d’une aide sécuritaire. Alors la question qu’on leur adresse est simple: quand donc à leur avis, ou suivant leurs projets et leur plan d’action, seront-ils en mesure de dire: «Voyez, nous avons enfin réussi, le Liban peut tenir debout tout seul...»? Que font-ils à cette fin?».
La question se pose en effet ou plutôt, elle entraîne une réponse toute prête: rien du tout. Et même à travers leurs sempiternelles disputes, comme les décideurs le leur reprochent eux-mêmes, le contraire de ce qu’il faudrait.
E.K.
A mesure qu’on se rapproche du 10 mai, l’inquiétude grandissante des prosyriens se réflète par un surcroît de déclarations insistant sur la nécessité de garder à la visite papale un caractère purement paroissial, sans aucune connotation politique. Ce qui serait effectivement le meilleur moyen d’éviter une quelconque évocation de la présence syrienne, du...