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Aucun bon scénario pour le peuple iranien


Aucun bon scénario pour le peuple iranien

Cette image fournie par le bureau de presse de l’armée iranienne le 23 juin 2025 montre le commandant en chef de l’armée, Amir Hatami (au centre), lors d’une réunion dans la salle de commandement de l’armée iranienne. Photo du bureau de presse de l’armée iranienne/AFP

Un non choix. Ni la guerre ni la paix dans la pure tradition de la République islamique et de ses alliés. Le régime iranien a tous les défauts du monde mais il n’est pas suicidaire. Ali Khamenei a passé trente ans de sa vie à construire patiemment son autorité absolue sur la République islamique, sa toile régionale dans un Moyen-Orient qui lui a toujours été hostile et son programme nucléaire sous l’un des régimes de sanctions les plus coercitifs au monde. Il vient de passer la semaine la plus difficile de sa vie. Son héritage est en ruine. Mais il est fort à parier qu’il fera tout pour sauver ce qu’il en reste.

L’Iran aura mis près de 48 heures à répondre aux frappes américaines sur les sites de Fordo, d’Ispahan et de Natanz, le guide suprême iranien n’a toujours pas réagi. Le régime a conscience que le rapport de force lui est extrêmement défavorable et que ses options sont limitées. Mais ce ne sont pas les seules raisons qui expliquent pourquoi il a pris le temps de calibrer sa réponse.

Ali Khamenei est un homme prudent. Fort avec les faibles mais faible avec les forts. Rien n’est plus important pour lui que la survie du régime. Il l’a prouvé au moment de l’assassinat de Kassem Soleimani en Irak, puis de celui de Ismaël Haniyé dans un bâtiment sécurisé de Téhéran, et encore plus quand Israël ramenait plus de trente ans en arrière le Hezbollah, pourtant le joyau de la couronne.

Cette fois, il devait faire un choix entre la mort lente (la capitulation) et le suicide (la surrenchère). Comme à son habitude, il a préféré une troisième option. Une frappe, dont les États-Unis ont sans doute été prévenus à l’avance, sur la plus grande base américaine de la région, au Qatar, pourtant l’un des pays du Golfe les moins hostiles à l’Iran. Elle sert sa rhétorique et a une surtout une portée symbolique. La République islamique bombe le torse mais ne semble toujours pas prête à entrer vraiment dans l’arène.

À 86 ans, le guide suprême a une espérance de vie assez limitée, d’autant plus si Israël et les États-Unis prennent la décision de l’éliminer. Mais il continue d’agir comme si son principal atout par rapport à ses ennemis était de pouvoir penser le temps long. Dans cette logique, le plus important pour lui n’est pas d’éviter les coups, quelle que soit leur puissance, mais de rester debout. Même après l’effondrement de l’axe (dont les forces subsistantes dans la région n’ont, encore une fois, pas été mobilisées lundi), même après la guerre menée par Israël et les États-Unis, même après la destruction de tout ou au moins d’une large partie de son programme nucléaire, il est permis de penser que Khamenei considère que rien de tout cela n’est irrémédiable. Que le régime, tant qu’il ne plie pas et qu’il ne s’effondre pas, peut reconstruire durant les prochaines décennies tout ce qu’Israël a détruit ces derniers mois.

Il peut trouver en Donald Trump, qui veut désormais terminer ce conflit au plus vite, un allié en la matière et ainsi conclure un accord qui ne ressemble pas, sur le papier, à la capitulation « inconditionnelle » a priori exigée. Mais cela suppose qu’Israël se contente de cela : d’avoir écarté la menace iranienne pendant une ou deux décennies – tout en gardant la capacité d’intervenir à sa guise – mais sans l’annihiler complètement.

Dans ce scénario, le peuple iranien serait le grand perdant de l’histoire. Le régime accentuerait probablement sa répression pour conserver son pouvoir, à l’instar de ce qu’a fait Saddam en Irak à la suite de la première guerre du Golfe.

Voilà où nous en sommes. Le régime peut sortir considérablement affaibli de cette guerre mais avec un appareil de sécurité qui demeure suffisamment solide pour mater toute forme de contestation, au moins à court et moyen terme. Il peut changer de visage, en cas de prise de pouvoir des gardiens de la révolution ou si le successeur potentiel de Khamenei s’écarte un peu de la ligne officielle. Il peut même s’effondrer – même si cela paraît peu probable – si la guerre dure et que les centres de pouvoir sont détruits les uns après les autres.

Mais aucun de ces scénarios ne correspond au projet de démocratisation et de pacification que vendent les faucons de Washington et de Tel-Aviv.

Indépendamment de ce que l’on pense des desseins d’Israël pour le Moyen-Orient, le cas iranien pose une question extrêmement complexe en matière de relations internationales. Le régime a réprimé toute forme de manifestations depuis des décennies et rien ne permet de penser qu’un Gorbatchev iranien allait à court terme prendre le pouvoir. Dans ces conditions, seule une épreuve de force peut le faire chavirer. Mais à un prix tellement exorbitant pour la population iranienne, et dans une moindre mesure pour la région, que cela fait logiquement peur à tout le monde. Le cas syrien est un parfait exemple du temps qu’il aura fallu pour déboulonner un régime aussi répressif et de la difficulté à pacifier et à stabiliser ensuite le pays.

On peut ainsi imaginer tous les scénarios géopolitiques possibles et spéculer sur la suite de ce conflit qui réservera sans doute encore bien des surprises. Mais il faut une dose considérable d’optimisme ou de cynisme – même si l’on espère sincèrement se tromper – pour prétendre que celui-ci va aboutir à la paix dans la région et à la libération du peuple iranien.

Un non choix. Ni la guerre ni la paix dans la pure tradition de la République islamique et de ses alliés. Le régime iranien a tous les défauts du monde mais il n’est pas suicidaire. Ali Khamenei a passé trente ans de sa vie à construire patiemment son autorité absolue sur la République islamique, sa toile régionale dans un Moyen-Orient qui lui a toujours été hostile et son programme nucléaire sous l’un des régimes de sanctions les plus coercitifs au monde. Il vient de passer la semaine la plus difficile de sa vie. Son héritage est en ruine. Mais il est fort à parier qu’il fera tout pour sauver ce qu’il en reste.L’Iran aura mis près de 48 heures à répondre aux frappes américaines sur les sites de Fordo, d’Ispahan et de Natanz, le guide suprême iranien n’a toujours pas réagi. Le régime a conscience que...
commentaires (16)

Qu’attend le Liban pour entrer les accords d’Abraham et en finir avec le cauchemar du Liban depuis 1975 ! J’ai connu le Liban d’avant, d’avant 1975, c’était le joyau du Moyen-Orient, prospérité, joie de vivre … les émissions comme Beyrouth fe Leïl avec un langage franco-arabe rappelant sa double identité. J’avais alors prévenu mes amis : restez sur vos gardes ! Préservez votre équilibre fragile inter religieux et n’entrez surtout pas dans un conflit qui ne vous concerne pas ! On connaît la suite ! Le mollement est venu pour le Liban de reconquérir sa liberté et sa joie de vivre !

Richard Abitbol

08 h 59, le 30 juin 2025

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Commentaires (16)

  • Qu’attend le Liban pour entrer les accords d’Abraham et en finir avec le cauchemar du Liban depuis 1975 ! J’ai connu le Liban d’avant, d’avant 1975, c’était le joyau du Moyen-Orient, prospérité, joie de vivre … les émissions comme Beyrouth fe Leïl avec un langage franco-arabe rappelant sa double identité. J’avais alors prévenu mes amis : restez sur vos gardes ! Préservez votre équilibre fragile inter religieux et n’entrez surtout pas dans un conflit qui ne vous concerne pas ! On connaît la suite ! Le mollement est venu pour le Liban de reconquérir sa liberté et sa joie de vivre !

    Richard Abitbol

    08 h 59, le 30 juin 2025

  • se debarasser de la psychose iranienne ? LA SEULE SOLUTION, en finire de leurs serviteurs . POUR DE BON, non comme cela se passe avec hezbollah ! POUR DE BON !

    L’acidulé

    10 h 52, le 25 juin 2025

  • encore un article qu'on retrouvera dans "courrier international". bravo!

    May Parent du Chatelet

    18 h 07, le 24 juin 2025

  • Un article de référence. Excellente analyse, et options stratégique plausibles. Bravo à Anthony SAMRANI qui signe là une très belle réflexion d'actualité.

    CODANI Didier

    13 h 48, le 24 juin 2025

  • y a plus que mr. samrani au sein de l'armee de L'OLJ pour ecrire des papiers ?

    L’acidulé

    10 h 48, le 24 juin 2025

  • Malheureusement, dans tous les pays qui n’ont connu que la dictature et à qui on a donné la possibilité de s’en libérer pour devenir une démocratie, se sont trouvés privés de relais à la hauteur de la tâche et donc obligés de choisir des nouveaux prétendants qui se sont vite avérés pire que ceux qu’ils disaient combattre pour obtenir leur liberté. L’Irak, la Libye, la Tunisie, et tous les autres ont gaspillé leur capital de libération en votant pour des dictateurs encore pires que ceux qu’ils ont combattus pour une démocratie dont ils ne savaient que faire puisqu’ils n’ont aucun référant en la

    Sissi zayyat

    09 h 50, le 24 juin 2025

  • *PERMISSION*...=CET APPEL DU MUFTI KABALAN,-DE PARTENARIAT AVEC L,IRAN,-EST UNE ALARMANTE RIGOLADE,-QUAND ON SE SOULE A LA LIMONADE.=DU FAKIH ETRE LES PARTENAIRES,-C,EST L,ETRE AUSSI DE SES MERCENAIRES.=NON MERCI, NOUS NIONS TEL HONNEUR,-HUMILIANT EN LARGEUR ET LONGUEUR.=EN BONS LIBANAIS NOTRE MESSAGE,-EST DE PRESERVER NOTRE HERITAGE,-LOIN DES PROVOCATEURS REGIONAUX,-ET DE LEURS MAITRES ET SCENARIOS.=NOUS SOMMES LES FILS DE LA PATRIE.-EN ELLE NOUS CROYONS POUR LA VIE.-NOS DEUX CHEFS SAGES AOUN ET SALAM,-DESARMERONT LE TANDEM TAM TAM,-NETTOYANT LA ROUTE DECISIVE,-QUI MENE JUSQ,AUX LEGISLATIVES.

    LA LIBRE EXPRESSION. LA PATRIE EN PERIL.

    09 h 22, le 24 juin 2025

  • Commentaire pertinent de Abdallah Hussein! Bien vu! Y en a marre de la bile haineuse de certains autres

    Nemer Salam

    08 h 55, le 24 juin 2025

  • Avancer plusieurs scénarios, c’est bien, mais est-on sûr de quoi on parle. Le problème iranien, à part l’étendue du territoire, aux confins de l’Asie centrale (ha,ha,ha) c’est que le régime des mollahs, (étudier la complexité de l’architecture du pouvoir iranien relève du jeu d’échec) est difficile à démonter. À cela s’ajoute une opposition faible en organisation et en crédibilité. Il y avait Khomeyni, l’autre Chah religieux, pour le grand remplacement. Mais où trouver un autre Ahmed Chareh pour faire une marche sur Téhéran. On craignait l’Alaouite e Damas, mais il fut balayé en quelques jours

    nb

    07 h 55, le 24 juin 2025

  • ‘’Mais aucun de ces scénarios ne correspond au projet de démocratisation et de pacification que vendent les faucons de Washington et de Tel-Aviv.’’ Parler de démocratie en Iran, ou ailleurs dans cette zone en guerre perpétuelle, n’a aucun sens. Le même argument lors de l’invasion de l’Irak.

    nb

    07 h 34, le 24 juin 2025

  • ‘’À 86 ans, le guide suprême a une espérance de vie assez limitée, d’autant plus si Israël et les États-Unis prennent la décision de l’éliminer’’. (Mais quel argument M. Samrani pour faire une analyse !). Au Liban, le même argument, fut avancé lors de l’élection d’un président, qu’il n’achèvera son mandat, et pourtant il survit encore. Quand l’heure sonne, il ne sera pas ‘’sauvés par le gong’’, le Guide. Regardez l’alaouite, l’Assad de Damas, et pourtant jeune, il a pris la fuite avant d’être assassiné, sans doute sur intervention de son protecteur Poutine. Le temps ne fait rien à l’affaire.

    nb

    07 h 31, le 24 juin 2025

  • La commedia dell’arte…

    Mago1

    03 h 23, le 24 juin 2025

  • Très bonne analyse. Il n'y aura probablement pas de Gorbatchev iranien et c'est peut-être tant mieux. Grobatchev a permis l'éclatement de l'URSS, qui loin d'être tranquille, a mené à la guerre meurtrière en Ukraine, en Artsakh, à la montée des islamistes radicaux dans le Caucase russe... et à la chute du niveau de vie de beaucoup de gens. Je souhaite aux Iraniens plutôt un Deng Xiaoping parlant perse pour éloigner le régime des excès idéologiques après le départ (naturel ?) de Khamenei tout comme l'original a éloigné la Chine des folies de Mao Zedong après la mort de ce dernier.

    Abdallah Hussein

    02 h 31, le 24 juin 2025

  • -RIEN DE BON A L,HORIZON, -POUR L,IRANIENNE NATION. -DE MEME POUR ISRAEL, -DONT L,ACTE FUT CRIMINEL. -QUAND A LA FRAPPE TRUMPIENNE, -C,EST UN RARE PHENOMENE, -QUE DE VOIR OUVRIR EN SCORE, -L,APRE BOITE DE PANDORE.

    LA LIBRE EXPRESSION. LA PATRIE EN PERIL.

    23 h 30, le 23 juin 2025

  • Un coup d'état militaire ?

    Dorfler lazare

    19 h 06, le 23 juin 2025

  • Bonne synthèse ! Ne rien faire pour ne pas avoir pire ou faire et détruire ... au milieu la population !

    Ludovic Hasquette

    19 h 05, le 23 juin 2025

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