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Cercle vicelard

Le plus fascinant à chaque crise internationale, c’est d’observer les Libanais à l’unisson, haut du panier comme grouillots de base, se prendre les infos en pleine poire dans un silence recueilli, pour ensuite se croire obligés d’aller déverser dans les salons ou sur les réseaux leurs réactions enfiévrées, chacun en fonction de sa chapelle intime. Lassés de voir leurs chefs leur pomper l’air en moulinant la même purée, au milieu d’un cercle vicelard dont ils cherchent en vain à forcer la quadrature, les gens s’acharnent à vouloir donner un avis définitif sur la guerre en cours… Tout en feignant d’oublier que personne ne leur a jamais rien demandé.

Certes, le jeu de rôles y est, mais comme il existe un vide effarant au plan des idées, le Koullouna standard carbure au binôme sympathie/aversion. Le procédé est simple : il commence d’abord par choisir son camp, généralement à fesse ou face avec un billet de 100 dollars ; ce n’est qu’ensuite qu’il fabrique l’argumentaire qui va avec. Il a beau affûter ses neurones, il s’emmêle toujours les pronostics, opère un virage sur l’aile à 180 degrés, pour ensuite placer son analyse géopolitique en compatibilité avec son mental.

Le vulgus libani a déjà produit à travers les âges les meilleurs nassériens, la fine fleur des propalestiniens, la quintessence des pro-israéliens et le nectar des prosyriens. Alors forcément, y en a aujourd’hui qui sont plus iraniens que les Iraniens. Faut juste les retenir d’envahir Israël, la Maison-Blanche et la base militaire de Diego Garcia. Voilà pour le tableau, les acteurs sont en place. Monologuant sans cesse, ils prennent des poses. L’attitude est leur seconde nature. Une vraie pépinière de talents, interminable bobine d’un pays qui se dévide à reculons.

Qu’en est-il entre-temps de nos casseroles domestiques ?

Rien, nada, balle-peau ! Le gouvernement joue le même navet gardé en stock : on continue de finasser avec le FMI en traînant les pieds dans la restructuration des banques et les privatisations des officines poubelles ; on démantèle les stocks d’armes du parti barbu au Sud, mais on se garde bien de les lui confisquer, sans doute pour ne pas vexer celui qui a servi de paratonnerre iranien raté lors de la dernière raclée israélienne ; enfin, Joseph Ier et Tonton Nawaf se complaisent dans leurs causettes d’alcôve conviviales avec le tandem imberbo-barbu. Pour l’heure, ils en sont au stade du dialogue du sourd-muet unijambiste et de l’aveugle cul-de-jatte.

Finalement, ça bouge sans trop bouger et l’on ne s’en rendra même pas compte, car faut faire gaffe, « en cette phase cruciale de l’histoire du Liban ». En attendant probablement l’étape « décisive », la période « délicate » et le stade « critique ».

Changer le bocal en gardant les mêmes cornichons, c’est ça le vrai changement ! Surtout quand l’ensemble pue le vinaigre…

gabynasr@lorientlejour.com

Le plus fascinant à chaque crise internationale, c’est d’observer les Libanais à l’unisson, haut du panier comme grouillots de base, se prendre les infos en pleine poire dans un silence recueilli, pour ensuite se croire obligés d’aller déverser dans les salons ou sur les réseaux leurs réactions enfiévrées, chacun en fonction de sa chapelle intime. Lassés de voir leurs chefs leur pomper l’air en moulinant la même purée, au milieu d’un cercle vicelard dont ils cherchent en vain à forcer la quadrature, les gens s’acharnent à vouloir donner un avis définitif sur la guerre en cours… Tout en feignant d’oublier que personne ne leur a jamais rien demandé. Certes, le jeu de rôles y est, mais comme il existe un vide effarant au plan des idées, le Koullouna standard carbure au binôme sympathie/aversion. Le...
commentaires (7)

Las de ces bricoleurs qui se succèdent et se ressemblent, les libanais comme à leur habitude essaient de secouer le cocotier des fois qu’ils réussissent à faire tomber le fruit le plus pourri, en espérant qu’il atterrisse sur un autre pourri et qu’on en finisse une fois pour toute. Étant exangue et sans le sou, on préfère se défouler par les bal bla qui nous caractérisent, pour étouffer ceux des responsables politiques qui n’ont pas fini de nous décevoir en nous gavant de leurs bonnes intentions sans jamais se montrer à la hauteur de la moindre de leur mission, aussi insignifiante soit elle.

Sissi zayyat

17 h 32, le 20 juin 2025

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Commentaires (7)

  • Las de ces bricoleurs qui se succèdent et se ressemblent, les libanais comme à leur habitude essaient de secouer le cocotier des fois qu’ils réussissent à faire tomber le fruit le plus pourri, en espérant qu’il atterrisse sur un autre pourri et qu’on en finisse une fois pour toute. Étant exangue et sans le sou, on préfère se défouler par les bal bla qui nous caractérisent, pour étouffer ceux des responsables politiques qui n’ont pas fini de nous décevoir en nous gavant de leurs bonnes intentions sans jamais se montrer à la hauteur de la moindre de leur mission, aussi insignifiante soit elle.

    Sissi zayyat

    17 h 32, le 20 juin 2025

  • Ke cé vrè: on est tout sauf libanais...

    Wlek Sanferlou

    14 h 44, le 20 juin 2025

  • que c'est triste le liban !

    L’acidulé

    10 h 04, le 20 juin 2025

  • Bravo Excellente Description.

    William Cadige

    09 h 27, le 20 juin 2025

  • Vous vous surpassez monsieur. Et vlan ! Que c’est vrai ! Beaucoup de discussions dans les salons aujourd’hui. Finalement on a tous raison et tout le monde a vu juste !

    Goraieb Nada

    07 h 02, le 20 juin 2025

  • Excellent, spot on!

    CW

    07 h 01, le 20 juin 2025

  • Magnifiquement brossé ! Et triste…

    Droin Diane

    03 h 30, le 20 juin 2025

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