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Culture - Initiative

LeBAM fait son retour : un orchestre pour tous, une école du vivre-ensemble

Après des années de silence imposé par la crise, l’orchestre citoyen revient sur scène. Objectif : rassembler les Libanais autour d’une musique gratuite, accessible et fédératrice.

LeBAM fait son retour : un orchestre pour tous, une école du vivre-ensemble

L’orchestre LeBAM pendant un concert le 6 mai 2023 au Musée national de Beyrouth. Photo fournie par LeBAM

Depuis 2008, LeBAM tend ses instruments aux quatre coins du pays, avec un objectif clair : permettre à tous les enfants, quels que soient leurs moyens, de faire de la musique ensemble. Un projet culturel devenu acte de résistance, relancé avec un concert inaugural ce mercredi 14 mai au Musée national de Beyrouth, après des années de silence imposé par la crise.

Une musique fédératrice et citoyenne. Tel est l’objectif affiché du LeBAM (The Lebanese Band Association for the Promotion of Music), qu’il honore depuis sa création en 2008. Mais la crise, le Covid-19, l’explosion du 4-Août, la guerre, le départ des musiciens enseignants ont eu raison des meilleures volontés du monde et ont mis à l’arrêt ses activités, qui commencent tout juste à reprendre avec un concert mercredi au Musée national. « J’ai l’impression d’être Sisyphe », dit son fondateur et président, l’ancien parlementaire Ghassan Moukheiber.

La musique, un outil de développement citoyen

C’est un rêve d’enfant que ses parents lui avaient interdit. Adulte, il l’a rattrapé au conservatoire en apprenant le hautbois, qu’il abandonne finalement au profit d’études de droit aux États-Unis. Jusqu’au déclic, à Corfou, où il découvre une île où 75 % des habitants jouent d’un instrument dans des orchestres d’harmonie. À l’époque des clivages politiques entre le 8 et le 14 mars, il propose à ses amis Ghassan Tuéni et Walid Gholmieh (alors directeur du Conservatoire national) de créer un orchestre citoyen. « La musique est un langage universel, elle ne connaît ni chrétien ni musulman. C’était la meilleure manière de recréer une citoyenneté », dit-il.

Gholmieh promet de détacher des enseignants du conservatoire, et la présence de Ghassan Tuéni appuie une initiative culturelle pure, totalement apolitique. LeBAM est fondé avec, pour commencer, les instruments à vent : « Car les orchestres d’harmonie utilisent des instruments rares, souvent relégués aux villages ou à l’armée, ce qui les rend militaristes », s’amuse Ghassan Moukheiber. La mission du LeBAM est donc de démocratiser la musique et de la rendre accessible à tous, surtout aux plus démunis et en régions. Les instruments sont mis à disposition gratuitement, et il fut un temps où le transport l’était, tout comme les concerts.

En 2011, l’orchestre, formé de 50 jeunes – dont c’était le baptême de l’air –, donne un concert au Victoria Hall à Genève, une première pour l’ensemble. La route a depuis été jalonnée de belles expériences, qui portent toutes des valeurs chères à Ghassan Moukheiber : la collaboration dans toute son essence et le respect de la différence.

LeBAM, des histoires de vie

Beaucoup de ces jeunes jouent dans l’Orchestre national du conservatoire. Carl Bitar, un adolescent qui a intégré le projet, se dit ravi de pouvoir s’exercer au saxophone tous les samedis et de participer à des concerts : « Une expérience enrichissante à tous les niveaux. » Rita Chakhtoura, autre adolescente, fait, elle, part de son bonheur « d’expérimenter » la musique collectivement au sein de l’ensemble.

Car c’est un projet pérenne que mène le LeBAM, qui compte aujourd’hui des musiciennes devenues depuis mères de famille. C’est aussi une histoire d’amour : celle de Ghassan Moukheiber, qui a rencontré sa femme Marina, musicienne et chanteuse, au cours d’une randonnée musicale organisée par le LeBAM, où elle a démarré en tant qu’étudiante. C’est une chute et un orteil fracturé qui mènent l’ancien député à son chevet et allument l’étincelle au sein du couple. À présent, Marina est vice-présidente du conseil du LeBAM et en charge de toutes ses activités, alors que Ghassan commence à se retirer sur la pointe des pieds.

LeBAM, c’est donc la gratuité de l’enseignement partout, la diversité régionale avec la création de quatre centres et huit orchestres – dont un orchestre de jazz entre autres – et un camp de musique. Cinq mille matières pédagogiques ont été déposées à la NDU, mais sont accessibles à tous. « Trois groupes ont été rajoutés au principal », explique Marina : The Joyful Team, dont la mission consistait à visiter des malades chez eux ou à l’hôpital pour leur jouer de la musique ; The Sunshine Band, composé de trisomiques 21 et d’enfants à besoins spéciaux ; et le LeBAM Combo, qui, lui, rassemble les meilleurs musiciens et participe à des activités rémunérées, ce qui contribue à retenir ces jeunes au Liban.

Tout ce beau travail s’est donc arrêté net en 2019. D’un orchestre de 55 membres avec un effectif de 400 élèves, LeBAM dénombre aujourd’hui un orchestre de 37 musiciens et 50 nouveaux élèves. Mais le LeBAM ne perd pas pour autant de vue sa philosophie de base, dont la mission, in fine, est d’intégrer l’enseignement obligatoire de la musique dans le cursus scolaire. Une tâche qui avance lentement, mais sûrement.

Un partenariat local et international en pleine expansion

Depuis le début de l’aventure, un accord de collaboration particulier est signé avec le conservatoire, dont les directeurs sont membres d’office du LeBAM. Mais les coopérations sont nombreuses, sur les plans local et mondial, notamment avec Gene Aitken, qui a insufflé tout l’esprit du groupe. Ce dernier, éducateur, chef d’orchestre et musicien de jazz américain de renommée internationale, lauréat d’un Grammy Award, est reconnu pour son rôle déterminant dans la diffusion du jazz à travers le monde. Par ailleurs, dans le cadre du développement du LeBAM, un accord devrait être conclu avec l’association Démos, son alter ego français.

LeBAM compte pour sa survie sur le mécénat et les sponsors, et désormais sur une contribution de 40 dollars par mois et par élève, pour ceux qui peuvent se le permettre. D’où l’importance de ce premier concert payant, Dance Around the World, prévu mercredi 14 mai au Musée national : un concert de musiques du monde dansantes – pour trancher – en collaboration avec le professeur et danseur Mazen Kiwan et sa compagne Sahar, qui vont démontrer leur talent sur quelques morceaux de tango, cha-cha-cha et valse. « Nous ne voulons pas abandonner, le succès de ce concert est primordial pour un financement futur », lâche Ghassan Moukheiber.

LeBAM a par ailleurs lancé une campagne de crowdfunding en ligne intitulée « Enseigne-moi la musique ». Une musique qui va d’ailleurs être instruite à l’ALBA Balamand, où seront abritées les répétitions de l’orchestre, qui avaient lieu jusque-là à la Sainte-Famille et à Kafa’at.

Depuis 2008, LeBAM tend ses instruments aux quatre coins du pays, avec un objectif clair : permettre à tous les enfants, quels que soient leurs moyens, de faire de la musique ensemble. Un projet culturel devenu acte de résistance, relancé avec un concert inaugural ce mercredi 14 mai au Musée national de Beyrouth, après des années de silence imposé par la crise.Une musique fédératrice et citoyenne. Tel est l’objectif affiché du LeBAM (The Lebanese Band Association for the Promotion of Music), qu’il honore depuis sa création en 2008. Mais la crise, le Covid-19, l’explosion du 4-Août, la guerre, le départ des musiciens enseignants ont eu raison des meilleures volontés du monde et ont mis à l’arrêt ses activités, qui commencent tout juste à reprendre avec un concert mercredi au Musée national. « J’ai...
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