
Une illustration de l'artiste Ivan Debs en couverture de l'ouvrage "Dire le Liban". Photo DR
Au sortir de l’inextricable chaos de la guerre, les mots semblent manquer. Les esprits happés par la violence se sont tus et l’encrier asséché gît dans un coin de table. Comment écrire lorsque l’absurdité de la guerre ne cesse de détruire des vies et des espoirs ? Où puiser l’inspiration dans cet interminable cycle de haine qui dure depuis 50 ans ?
Et pourtant, des voix s’élèvent encore. Il faut Dire le Liban. Au-delà d’un simple corpus littéraire, cet ouvrage se veut comme un défi en soi : briser le silence de l’état de choc et trouver le courage de vivre ou de revivre les moments douloureux afin de pouvoir les raconter. Ce devoir de mémoire est un cri du cœur rassemblant 77 auteurs aux horizons pluriels qui racontent, chacun à sa manière, les atrocités de l’automne 2024.
Un acte de résistance
Tenir tête à la violence par la puissance de la plume, s’ancrer comme nos oliviers – qu’Israël déterre et s’approprie sans vergogne au Liban-Sud – dans la terre de nos ancêtres. Dire non. Dans ce tohu-bohu infernal qu’engendrent les grands conflits, Nidal Haddad, à la tête d’Art Liban Calima qui vient d’éditer Dire le Liban, insiste sur l’importance de garder une trace écrite de cette période douloureuse. « Ces textes sont essentiels. Ils rassemblent des mémoires, des récits, des fragments d’histoire. Ils permettent de ne pas oublier, de transmettre, de partager. C’est une forme de résistance, mais aussi d’unité dans la diversité. » Résister, c’est aussi refuser que l’on parle pour nous, c’est prendre la parole pour dénoncer l’injustice quand le monde voudrait nous astreindre au mutisme.
Par-delà les différences
Dans les interstices du quotidien meurtri, l’écriture devient thérapie. Ces voix multiples disent le pays autrement : par l’intime, par la poésie, par les souvenirs d’enfance, par l’exil.
Elles redonnent au Liban un visage humain, pluriel, profondément enraciné. Elles dressent un rempart fragile mais tenace contre l’amnésie collective. Dans l’effondrement, ces textes tiennent debout. Nidal Haddad a ouvert grand les portes de ses pages, avec générosité et dans un élan du cœur, laissant couler le flot de sentiments de ses « compatriotes dispersés entre le Liban et l’ailleurs, ayant en commun un même amour du pays. » C’est ainsi que ces textes s’inscrivent dans une seule et même vision d’un « Liban libre où les droits de l’homme sont respectés et appliqués », souligne-t-elle.
Récit de guerre et hymne à la paix
L’agencement des textes a été conçu comme une traversée sensorielle, un parcours intime guidé par l’émotion. Parmi les multiples signatures, citons Hanane Hajj Ali, Roger Assaf, Nadine Mokdessi, Georges Boustany, Valérie Cachard, Fady Noun, Rami Zein... Chaque contribution fait écho à la précédente, tissant une trame où se mêlent la douleur, la mémoire, l’enfance, la résistance, l’amour, la guerre et les souvenirs, raconte l’éditrice. L’ouvrage se déploie en strates en genres et en styles comme autant de paysages intérieurs à explorer : une partie épistolaire suspendue, presque murmurée ; une section poétique, vibrante et introspective ; une plongée déchirante dans l’éloignement ; un regard porté par les souvenirs d’enfance, puis par la lucidité de l’adulte. Dire le Liban, c’est aussi l’exprimer en plusieurs langues (français, arabe, anglais), reflet de la pluriculturalité du pays qui fait sa particularité. « Je ne crains pas la lassitude, car tant que le pays traverse des épreuves, il y aura besoin de livres pour dire, pour panser les blessures, pour comprendre les maux », confie Nidal Haddad.
À signaler que les revenus générés lors de la signature samedi à Souk el-Kotob (dans le cadre de Souk el-Tayeb) seront reversés à une organisation non gouvernementale (ONG), dont le nom sera dévoilé lors du lancement. Une belle manière de contribuer tout en célébrant la culture et la solidarité.
« (ONG), dont le nom sera dévoilé LORS du lancement.,» Pourquoi pas avant ?est-ce une autre de ces ONG .....
17 h 33, le 25 avril 2025