Le chef de l'agence de sécurité intérieure Shin Bet, Ronen Bar dans le centre d'Israël, le 11 octobre 2021. Photo YOSSI ZELIGER / AFP
Le chef des services de sécurité intérieure israéliens, limogé par le gouvernement, a accusé Benjamin Netanyahu d'avoir exigé de lui une loyauté personnelle, dans une déclaration écrite sous serment à la Cour suprême, que le bureau du Premier ministre a qualifiée de mensongère.
Il s'agit du dernier épisode de la saga juridico-politique qui oppose M. Netanyahu à Ronen Bar, le chef du Shin Bet, dont le limogeage annoncé par le gouvernement a provoqué un tollé dans une grande partie de l'opinion israélienne et provoqué des manifestations de masse.
Sa mise à l'écart est contestée notamment par l'opposition, qui y voit le signe d'une dérive autocratique du pouvoir, et par la procureure générale de l'Etat. Dans sa déclaration --écrite-- sous serment lundi, M. Bar incrimine M. Netanyahu, affirmant notamment que celui-ci lui avait demandé une loyauté personnelle.
Le chef du gouvernement a contre-attaqué dans un communiqué de ses services, en réfutant les affirmations « remplies de mensonges » de M. Bar et en affirmant que le chef de la sécurité intérieure avait « lamentablement échoué » lors de l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023.
Dans sa déclaration, M. Bar écrit que, dans le cas d'une crise constitutionnelle, « il était clair » que M. Netanyahu s'attendait à ce qu'il lui obéisse, plutôt qu'à la Cour suprême. M. Bar y rejette fermement les accusations de M. Netanyahu et de son entourage selon lesquelles le Shin Bet n'a pas alerté le Premier ministre et les autres services de sécurité à temps de l'attaque du 7 octobre 2023.
M. Netanyahu a répété cette accusation lundi, estimant que M. Bar avait « lamentablement échoué » ce jour-là et que « cette raison à elle seule justifie la fin de son mandat ». Vers 03H00 le 7 octobre 2023, toutes les agences de sécurité avaient reçu une alerte concernant « des préparatifs inhabituels et la possibilité d'intentions offensives de la part du Hamas », selon le Shin Bet.
M. Bar explique notamment comment il s'est rendu au siège du Shin Bet à 04H30, soit deux heures avant l'attaque du Hamas sur le sol israélien, et a donné des instructions pour que le conseiller militaire du Premier ministre soit informé des événements. « Cette nuit-là, rien n'a été caché à l'appareil sécuritaire ou au Premier ministre », ajoute-t-il.
Dans sa déclaration, M. Bar indique également que M. Netanyahu lui a dit « à plus d'une reprise » qu'il s'attendait à ce que ses services agissent contre les citoyens israéliens impliqués dans des manifestations contre le gouvernement, « avec un accent particulier sur la surveillance des bailleurs de fonds de la contestation ». Il confirme également des informations publiées dans les médias selon lesquelles M. Netanyahu aurait cherché à obtenir sa signature pour retarder le témoignage du Premier ministre dans son procès pour corruption.
Il accuse aussi le Premier ministre de l'avoir « évincé » des négociations sur la libération des otages, estimant que cette décision a mis en péril la suite des discussions sur un cessez-le-feu avec le Hamas. Le 8 avril, la Cour Suprême a confirmé dans un arrêt sa décision initiale de suspendre le limogeage du chef du Shin Bet, après l'examen des cinq recours dont elle avait été saisie.
Ronen Bar « continuera à exercer ses fonctions jusqu'à une décision ultérieure », a décidé la Cour, autorisant le gouvernement à auditionner des candidats à sa succession mais interdisant toute « annonce de nomination ». « Je vais annoncer prochainement la date de ma démission », conclut M. Bar ce document de 11 pages. Cette déclaration « prouve que Netanyahu est dangereux pour la sécurité d'Israël », a réagi sur X le chef de l'opposition Yaïr Lapid.