
Le président libanais Joseph Aoun. Photo X / @LBPresidency
Le président libanais, Joseph Aoun, a commémoré samedi soir les 50 ans du début de la guerre civile au Liban, appelant à n'avoir recours qu'au « dialogue » pour régler les problèmes internes du pays et insistant sur le fait que seules l'armée libanaise et l' « unité » des Libanais doivent constituer leurs « armes ».
M. Aoun a prononcé son discours à la veille des commémorations du 13 avril, date à laquelle en 1975 un incident a impliqué dans la zone de Chiyah-Aïn el-Remmané, des miliciens chrétiens qui ont mitraillé un bus transportant des Palestiniens. Peu auparavant, une fusillade avait fait des morts parmi les Kataëb, notamment la première victime, Joseph Abou Assi. Sa prise de parole intervient alors que la scène politique libanaise est focalisée, ces dernières semaines, sur la question de la remise à l'État de l'arsenal du Hezbollah, revenue sur la table depuis que le parti chiite est sorti affaibli de sa dernière guerre contre Israël, entre octobre 2023 et fin novembre 2024, et alors que l'armée israélienne continue d'occuper certaines positions dans le sud du Liban et de bombarder quasiment quotidiennement le pays.
« Notre unité est notre arme et notre armée est notre arme »
S'adressant à ses « frères et sœurs libanais », Joseph Aoun a appelé tous les Libanais à déclarer que « seul l’État nous protège — l’État fort, souverain, juste », insistant sur le fait que « toute arme hors du cadre ou de la décision de l’État menace les intérêts du Liban ». Et de poursuivre : « Il est temps pour nous de dire à l’unisson : seuls l’État, son armée et ses forces de sécurité officielles protègent le Liban. Et il est temps de s'engager à respecter cette position, pour que reste le Liban. »
Voulant jurer que « la guerre est enterrée à jamais et qu'il est impossible qu'elle revienne », celui qui a été plusieurs années à la tête de la troupe a juré au nom des victimes et des générations futures que « notre unité est notre arme, et notre armée est notre arme, afin que les cinquante prochaines années soient remplies de paix. »
Le chef de l'État a encore souligné qu'en 50 ans, « deux générations ont vu leurs rêves s’envoler, et leurs vies s’effacer », tandis que le Liban reste « égaré ». Il a appelé à se souvenir des « milliers de martyrs de tout le Liban et toutes ses régions », ainsi que des « disparus et de leurs proches qui resteront à jamais victimes de la guerre », et s'est interrogé : « pourquoi en est-on arrivé là ». « Certes, la guerre a pris fin avec l’Accord de Taëf, qui comprenait d’importants compromis et des amendements constitutionnels essentiels. Mais la question demeure : n’aurions-nous pas pu réaliser ces réformes par le dialogue, sans passer par la guerre, la destruction et les combats ? »
« Seul le dialogue peut résoudre nos crises »
« Nous avons aujourd'hui le devoir de tirer des leçons de ces cinquante dernières années », a-t-il encore appelé. Et la première d'entre elles est que « la violence et la haine ne résolvent aucun problème au Liban. Seul le dialogue peut résoudre nos crises internes et structurelles ». « Notre pays repose sur plusieurs principes, au premier rang desquels le fait qu'aucune composante ne peut en annuler une autre ».
Les différentes parties prônent plusieurs façons de parvenir à une solution au désarmement du Hezbollah. Ce dernier, comme le chef du gouvernement, Nawaf Salam, favorisent un dialogue interne, tandis que d'autres, comme les Forces libanaises, ennemi juré du Hezb, veulent imposer la remise de l'arsenal du parti-milice, selon un calendrier strict.
« Unis sous un même drapeau »
Le chef de l'État a ensuite pointé du doigt, dans son « second enseignement » tiré de la guerre, les ingérence extérieures. « Chaque fois qu’un Libanais s’est appuyé sur l’étranger contre son partenaire national, il a perdu, et ses partenaires dans la nation ont perdu aussi ». « Quel que soit le prix d’un compromis interne, il restera toujours inférieur à celui que nous payons en nous tournant vers l’extérieur », a-t-il lancé. « Le troisième enseignement, c’est que nous n’avons aucun autre refuge que l’État libanais, a déclaré Joseph Aoun. Que nul ne soit oppresseur, que nul ne soit opprimé. Que nul ne lèse, que nul ne soit lésé. Tous, comme je le dis et le répète, sommes unis sous un même drapeau, portant une même identité. »
Le président Aoun a en outre critiqué les tirs de roquettes non-revendiqués lancés ces dernières semaines depuis le Liban-Sud, qui avaient provoqué des ripostes violentes et meurtrières de l'armée israélienne. Commentant ces lancements, le chef de l'État a dénoncé une « conspiration malveillante contre le pays », qui n'ont fait qu'offrir « un prétexte supplémentaire à ceux qui n’en attendaient déjà pas pour nous attaquer, et elles affaiblissent l’État vis-à-vis de ses alliés ». Il a salué le fait que « les Libanais ont unanimement condamné » les tirs, évoquant notamment la plainte déposée à cet effet par le Conseil supérieur chiite, « une initiative saluée et symbolique ».
« Chaque fois qu’un Libanais s’est appuyé sur l’étranger contre son partenaire national, il a perdu ». Mais c’est cet étranger que vous a hissé à à la tête du Pays.
10 h 35, le 14 avril 2025