Le chef des Kataëb Samy Gemayel a exhorté samedi le Hezbollah, lors d'une commémoration du 50e anniversaire du déclenchement de la guerre civile au Liban, « à rendre ses armes volontairement, comme d’autres l’ont fait », en allusion au parti Kataëb lui-même et aux Forces libanaises à la fin de la guerre en 1990.

« Il faut rectifier nombre de perceptions que nous considérons erronées sur la guerre libanaise, la première étant que c’était une guerre civile », a martelé Samy Gemayel durant son discours. Il a réaffirmé que son parti « s’est défendu contre des étrangers, avec pour seule ambition que les autres Libanais le rejoignent, ce qui n'a malheureusement pas toujours été le cas ».

Pour commémorer le cinquantenaire de la guerre civile, le parti Kataëb a choisi d’organiser une cérémonie à l'intérieur d'un local dans la région même où l’incident fondateur à l'origine de ce long conflit avait éclaté, le 13 avril 1975. Survenu dans la zone de Chiyah-Aïn el-Remmané, l'incident avait impliqué des miliciens chrétiens qui ont mitraillé un bus transportant des Palestiniens. Peu auparavant une fusillade avait fait des tués parmi les Kataëb, notamment la première victime, Joseph Abou Assi.

En présence de son président, le député Samy Gemayel, de l’ancien président de la République Amine Gemayel, des cadres du parti et de multiples représentants d’autres formations, les Kataëb ont inauguré un mémorial portant les noms de 400 de leurs victimes tuées durant la guerre qui a duré de 1975 à 1990. Deux documentaires ont été visionnés durant la cérémonie, mettant en évidence la vision du parti face à la guerre libanaise et figurant ses combats contre les factions palestiniennes puis l’armée syrienne. Les projections ont couvert les décennies qui ont suivi, avec la tutelle syrienne puis l’hégémonie du Hezbollah.

Lire aussi

Face aux appels à son désarmement, le Hezbollah ressort sa carte de choix : le système politique

« L’Etat ne peut prospérer en présence d’armes » illégales

Le chef des Kataëb a affirmé que la démarche du parti cette année, qui était de rouvrir le dossier de la guerre, n’a d’autre objectif que d’en tirer les leçons. « Et la première de ces leçons, c’est que l’Etat ne peut prospérer en présence d’armes hors de son contrôle », a-t-il déclaré. S’adressant nommément au Hezbollah, il a estimé que ce parti armé, qui vient d’entrer en guerre contre Israël pour la deuxième fois depuis la libération du Liban-Sud en 2000, « a vu ce qui en a résulté ». Il l’a exhorté « à rendre ses armes volontairement, comme d’autres l’ont fait », en allusion au parti Kataëb lui-même et aux Forces libanaises à la fin de la guerre en 1990.

« La remise des armes à l’Etat n’est pas un objet de dialogue, cette question est tranchée par la Constitution, la volonté des autres Libanais et les circonstances », a-t-il poursuivi. Selon lui, « c’est au président de la République Joseph Aoun et au gouvernement de discuter avec le Hezbollah de la manière dont ses armes seront remises à l’Etat ». Depuis la dernière guerre avec Israël, qui a causé de grandes destructions au Liban et l'effondrement surprise du Hezbollah, certaines voix s’élèvent pour proposer un dialogue autour des armes de ce parti, alors que les appels de la communauté internationale en faveur de son désarmement mettent la pression sur l’Etat libanais.

Comme lors de son intervention au Parlement le 27 février dernier, dans laquelle il a évoqué une « conférence nationale de vérité et de réconciliation », Samy Gemayel a estimé samedi que les Libanais doivent apprendre à s’écouter et à accepter leurs différences, en vue de raconter un jour leur histoire commune. Il a surtout insisté sur le fait que l’Etat « doit désormais reconnaître tous ceux qui ont combattu pour lui et leur rendre hommage », en référence à ceux qui sont tombés durant la guerre, estimant que sans eux « le Liban n’existerait plus ». « Nous avons une occasion de bâtir un pays, ne la laissons pas passer comme nous avons perdu tant d’autres par le passé », a-t-il plaidé.

Naji Boutros, un cadre des Kataëb, a ensuite prononcé le discours des « anciens résistants », qualifiant la région de Chiyah-Aïn el-Remmané de « terre des héros » qui a selon lui fait tomber tous les complots.

Enfin, l'allocution au nom des blessés de la guerre a été prononcée par Tony el-Fata. Celui qui a de toute évidence perdu la vue dans les combats a assuré que s’il fallait tout recommencer, il n’hésiterait pas à refaire ce sacrifice. « Nous avons donné de notre personne, mais que Dieu ait l’âme des 5 000 jeunes morts pour la cause », a-t-il dit.