Rechercher
Rechercher

Nos Lecteurs ont la Parole

On ne peut vendre les actifs de l’État libanais tant que c’est la logique de la ferme

Depuis le début de la crise financière de 2019, certaines voix s’élèvent pour proposer la vente des actifs de l’État libanais comme solution à la faillite du pays. Une approche qui relève d’un raccourci dangereux et illusoire. Avant de penser à vendre, il est impératif de bâtir un État de droit, rétablir la justice et restructurer en profondeur l’administration et les finances publiques. Sinon, cette liquidation des actifs ne fera qu’enrichir une minorité et enfoncer encore plus le Liban dans l’abîme du clientélisme et de la corruption.

Un État en ruine ne peut brader ses richesses. Avant toute discussion sur la vente des actifs publics, la priorité est de reconstruire un État fonctionnel et crédible. Cela passe par :

1. L’indépendance de la justice et du contrôle financier : la justice doit être libérée de l’influence politique afin de poursuivre efficacement les responsables des détournements et de la corruption ; la Cour des comptes et la Commission de contrôle des banques doivent être autonomes, avec des moyens d’investigation solides.

2. L’application stricte des réformes du FMI : l’objectif principal doit être d’éliminer le déficit budgétaire, l’État ne peut pas continuer à fonctionner sur des déficits chroniques couverts par des emprunts ruineux ; rationaliser les dépenses publiques, supprimer les gaspillages et réformer les administrations obsolètes.

3. Une restructuration administrative fondée sur la compétence et non le clientélisme : une gestion des ressources humaines indépendante doit être mise en place pour garantir des recrutements basés uniquement sur la compétence ; cela mettra fin au système de favoritisme et aux nominations politiques qui gangrènent l’administration.

La dette doit être restructurée avant toute cession d’actifs. Plutôt que de vendre dans l’urgence les actifs publics à des prix bradés, le Liban doit restructurer sa dette de manière intelligente : allonger les maturités des obligations souveraines à 20 ans ; appliquer des taux d’intérêt très bas, ne dépassant pas ceux du Libor à 10 et 20 ans ; mettre en place un moratoire de remboursement le temps de redresser l’économie.

Cette approche permettrait au pays de retrouver une capacité de financement sans hypothéquer ses richesses immédiatement.

Une fois ces réformes mises en place, et seulement alors, la question de la cession d’actifs pourra être posée. Mais cette vente devra être conditionnée à un partage clair des responsabilités dans la crise financière qui pourrait être mis en place par un juge prenant en compte les éléments suivants : 60 % de la responsabilité à l’État et à la Banque du Liban ; échec des réformes ; déficit budgétaire chronique ; corruption et commissions abusives sur les projets publics ; 30 % de la responsabilité aux banques ; faute grave de non-analyse de la solvabilité de l’État ; gestion irresponsable des fonds des déposants ; 10 % aux grands déposants (plus de 10 millions de dollars) puisqu’ils ont bénéficié d’intérêts excessifs sans considération des risques systémiques.

La vente des actifs ne pourra se faire qu’en tenant compte de ces responsabilités et en veillant à une répartition équitable des fonds générés.

Vendre les actifs de l’État sans réformes profondes, c’est condamner définitivement le Liban à l’échec. Un tel scénario ne ferait qu’enrichir une élite prédatrice, tandis que la grande majorité du peuple continuerait à souffrir.

Le pays a besoin d’un nouveau modèle de gouvernance, d’une justice forte et d’une administration compétente. Ce n’est qu’après cette transformation que la question d’une éventuelle cession des actifs pourra être étudiée avec transparence et équité.


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « Courrier » n’engagent que leurs auteurs. Dans cet espace, « L’Orient-Le Jour » offre à ses lecteurs l’opportunité d’exprimer leurs idées, leurs commentaires et leurs réflexions sur divers sujets, à condition que les propos ne soient ni diffamatoires, ni injurieux, ni racistes.

Depuis le début de la crise financière de 2019, certaines voix s’élèvent pour proposer la vente des actifs de l’État libanais comme solution à la faillite du pays. Une approche qui relève d’un raccourci dangereux et illusoire. Avant de penser à vendre, il est impératif de bâtir un État de droit, rétablir la justice et restructurer en profondeur l’administration et les finances publiques. Sinon, cette liquidation des actifs ne fera qu’enrichir une minorité et enfoncer encore plus le Liban dans l’abîme du clientélisme et de la corruption.Un État en ruine ne peut brader ses richesses. Avant toute discussion sur la vente des actifs publics, la priorité est de reconstruire un État fonctionnel et crédible. Cela passe par :1. L’indépendance de la justice et du contrôle financier : la justice doit...
commentaires (0) Commenter

Commentaires (0)

Retour en haut