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Économie - Réformes

Fin de la visite du FMI au Liban, début d'un tout nouveau cycle de discussions

Yassine Jaber assure que le gouvernement va s'employer à nommer un nouveau gouverneur de la Banque du Liban d'ici fin mars.

C’est officiel. Le Liban a formulé une nouvelle demande d’assistance financière au Fonds monétaire international, dont une délégation vient de terminer une visite de quatre jours dans le pays. Cette démarche, effectuée par le gouvernement de Nawaf Salam, réinitialise de facto les négociations entre Beyrouth et le FMI.

« L'équipe a eu des discussions productives avec le président Joseph Aoun, le président du Parlement Nabih Berry, le Premier ministre Nawaf Salam, la Banque du Liban (...) Elle a accueilli favorablement la demande des autorités pour un nouveau programme soutenu par le FMI afin de soutenir leurs efforts », a écrit le chef de mission du FMI pour le Liban, Ernesto Ramirez-Rigo, dans le communiqué de clôture de la visite publié jeudi.

« Le FMI est prêt, avec la communauté internationale, à soutenir les efforts des autorités pour relever les défis », et ses équipes « resteront en contact étroit pour les aider à élaborer un programme complet de réformes économiques », a ajouté le Fonds.

Au menu : assainissement des finances publiques et de la dette, restructuration du secteur financier, relance de la croissance, réforme de la gouvernance et des entreprises publiques, et fluidification de la transmission de données au sein de l’État pour « améliorer la transparence et éclairer l'élaboration des politiques ».

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Il faut désormais s’attendre à de nouveaux rounds de discussions avant qu’un nouvel accord préliminaire (staff level agreement ou SLA) entre le chef de mission et les autorités libanaises ne soit signé. Il faudra ensuite qu’il soit suivi d’effet avec le lancement de réformes préalables et enfin converti en souscription en bonne et due forme à un programme d’assistance financière.

Si l’ancien SLA partait sur une enveloppe de 3 milliards de dollars en quatre ans, le montant du programme et sa durée devront probablement être revus. Le processus pourrait aboutir en moins d’un an dans le scénario le plus optimiste, selon une source au fait du dossier, en considérant, bien entendu, que le cessez-le-feu entre Israël et le Liban se pérennise et qu’il n’y ait pas d’autres mauvaises surprises.

Réunion de clôture

Jeudi, la délégation du FMI a tenu sa réunion technique prévue avec les banques sous le chapeau de l’article VIII de ses statuts, une opération routinière qui a surtout servi à observer le fonctionnement du marché des changes, maintenant que le taux dollar/livre libanaise a été unifié.

La réunion rituelle de clôture a suivi, et la délégation a présenté ses conclusions à des représentants du ministère des Finances, de celui de l’Économie, de la Banque du Liban (BDL), de la Commission de contrôle des banques et de la présidence. Elle avait tenu auparavant d'autres réunions avec des départements du ministère des Finances, avec la BDL, les trois têtes de pont du pouvoir exécutif et législatif, et l’ambassadeur de France Hervé Magro.

« C’est l’optimisme qui prévaut à l’issue de cette visite. Le consensus est que le Liban a besoin d’un programme du FMI dont les termes sont élaborés par la partie libanaise pour optimiser les chances de succès. La délégation repart avec le sentiment qu’elle s’est entretenue avec des responsables qui veulent et peuvent faire avancer le dossier », a déclaré une source ayant participé à l’une de ces réunions.

À l’issue de la réunion de clôture, le ministre des Finances Yassine Jaber a assuré que tout serait fait pour franchir le premier obstacle avant mars : nommer un nouveau gouverneur pour diriger la Banque du Liban, afin de remplacer Wassim Manssouri, qui assure l’intérim depuis le départ sans successeur désigné de Riad Salamé fin juillet 2024. Si cette échéance est respectée, Ernesto Ramirez-Rigo reviendra au Liban début avril. Cette question, comme celle de la visite du FMI en général a également été abordée lors du Conseil des ministres organisé à Baabda le jour même. Le gouvernement y a répété son intention de ne pas perdre de temps.

Tâche colossale

Le Liban officiel peut espérer que le dossier progresse vite, mais la tâche qui l'attend est colossale, comme le rappelle le FMI, qui évoque des « défis majeurs » pour une économie gravement en crise depuis 2019, en plus de « besoins humanitaires et de reconstruction considérables (qui) nécessitent une aide internationale coordonnée ». Sa délégation a pris acte des mesures adoptées par les autorités en place pour « maintenir un certain degré de stabilité économique » malgré le contexte, mais insiste sur le fait que ces palliatifs sont insuffisants.

Les réformes préalables demandées sont à peu près les mêmes que dans le précédent SLA, malgré quelques ajustements. Il faudra, entre autres, adopter une loi de résolution bancaire ou encore des budgets de réformes, en commençant par celui de 2026. Il faudra aussi réformer à nouveau la loi sur le secret bancaire, de manière à ce qu’elle ne fasse pas obstacle à la restructuration du secteur, vu que les modifications votées ces dernières années n’ont pas vraiment fait sauter ce verrou.

Selon la source au fait du dossier, le montant net des pertes à assumer n’est « pas éloigné » des 70 milliards de dollars identifiés sous le mandat du gouvernement de Nagib Mikati. Mais il faudra aussi compter avec le coût de la reconstruction.

Les banques, le gros morceau

De réelles avancées sur ces dossiers avant même qu’un SLA soit conclu pourraient convaincre le FMI que le Liban officiel version Aoun-Salam-Berry se donne les moyens d'aller au bout. Restera ensuite le gros du travail : assainir le passif de la BDL, répartir les dizaines de milliards de pertes accumulées par le système en respectant la hiérarchie des responsabilités et en préservant autant que possible les dépôts, avant de s’attaquer à la réforme de l’administration, du secteur de l’électricité, de la justice, etc.

Débloquer la restructuration des banques et régler la question des dépôts sera un chantier clé. D’une part, parce qu’il faut que leurs actionnaires acceptent d’assumer leur responsabilités vis-à-vis de la majorité des déposants. D’autre part, parce que le Liban ne peut pas retrouver une croissance conséquente sans banques fonctionnelles.

L’Association des banques du Liban, qui campe sur ses positions depuis le début de la crise s’est rendue mercredi au Grand Sérail pour faire passer son message avant la visite du FMI : « demander que les solutions soient élaborées avec la participation de toutes les parties (…) » donc avec les banques. L’État devra aussi contribuer – via la mise sous gestion privée de ses actifs – compte tenu de l’importance des pertes à éponger. Cependant, cette contribution devra être soutenable pour ne pas condamner toute possibilité de redressement durable, en bradant par exemple les actifs de l'État. Une équation qu'il sera sans doute nécessaire de rappeler à l'opinion publique ces prochains mois.

C’est officiel. Le Liban a formulé une nouvelle demande d’assistance financière au Fonds monétaire international, dont une délégation vient de terminer une visite de quatre jours dans le pays. Cette démarche, effectuée par le gouvernement de Nawaf Salam, réinitialise de facto les négociations entre Beyrouth et le FMI.« L'équipe a eu des discussions productives avec le...
commentaires (2)

La nouvelle équipe doit veiller à ne pas tomber dans le piège de ses prédécesseurs en racontant des bo bords au libanais qui pourraient vite se retourner contre eux. Pas d’annonces fallacieuses ni de chiffres approximatifs. Ça n’est pas de votre niveau.

Sissi zayyat

11 h 50, le 14 mars 2025

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Commentaires (2)

  • La nouvelle équipe doit veiller à ne pas tomber dans le piège de ses prédécesseurs en racontant des bo bords au libanais qui pourraient vite se retourner contre eux. Pas d’annonces fallacieuses ni de chiffres approximatifs. Ça n’est pas de votre niveau.

    Sissi zayyat

    11 h 50, le 14 mars 2025

  • M Phillipe Hage-Boutros devrait s'abstenir d'annoner les contre-verites de la canaille de la BDL. L'assertion selon laquelle le taux de change LL / $ est unifie est MENSONGERE. La circulaire BDL 151 qui instaure le taux scelerat de 15000 LL pour un $ pour une CATEGORIE de comptes est toujours en vigueur. Des centaines de milliers de deposants en sont temoins tous les jours. La complicite (?) du FMI quand aux assertions de Mansouri n'y changera rien en l'absence de la signature de l'abrogation de la 151 par la canaille de la BDL. L'OlJ doit s'abstenir d'etre complice de cette tromperie.

    Michel Trad

    00 h 35, le 14 mars 2025

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