Bonjour Salma,

C’est moi, tu te rappelles de moi ?

Je t’avais écrit en 2021, tu te rappelles ?

Un an après l’explosion au port de Beyrouth. En 2021, tu te rappelles ?

En plein milieu d’une crise sanitaire, de la crise économique. Tu te rappelles ?

Quand absolument rien n’allait bien, je t’ai écrit, tu te rappelles ?

Tu me disais qu’il faut absolument se débarrasser des silos du port parce que les mouches envahissent la ville à cause du blé qui en déborde.

Tu avais complètement raison Salma.

Les mouches ont vraiment envahi la ville. Elles l’ont même déchiquetée, rasée, vidée, piquée.

Les mouches ont piqué la ville ya Salma, mais heureusement les silos sont restés.

Les mouches envahissent les cadavres. Elles ont beau tenter de festoyer sur Beyrouth, cela n’a pas fonctionné.

La ville n’est pas morte. Elle plongeait dans un sommeil forcé, mais Beyrouth n’a jamais été un cadavre.

Même étouffée sous les tas de blé, son cœur battait.

Les mouches ont beau bourdonner, insister à se l’approprier, mais l’éveil approchait et les mouches savaient que Beyrouth ne serait jamais leur.

Et voilà Salma. Tu reconnais la ville aujourd’hui ?

Plus de mouche en vue, mais les silos sont toujours là.

Tu me diras qu’elles reviendront lorsqu’il sera temps pour la ville de replonger dans un nouveau sommeil.

Eh bien, peut-être, oui.

Les mouches bourdonnent encore, mais aujourd’hui, la ville rit plus fort.

Le cœur bat, Beyrouth vit, elle se relève.

Les silos éventrés sont toujours debout, mais plus de mouche en vue.

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