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Société - Chute du régime Assad

Des prisonniers syriens à Roumieh, dont des islamistes, entament une grève de la faim et demandent à être rapatriés

Début janvier, Ahmad el-Chareh avait demandé à Nagib Mikati l'extradition de tous les prisonniers syriens au Liban.

Des prisonniers syriens à Roumieh, dont des islamistes, entament une grève de la faim et demandent à être rapatriés

Des prisonniers à Roumieh prennent part à la prière de la fête musulmane du Fitr, le 10 avril 2024. Photo ANI

Des détenus syriens incarcérés au Liban dans la prison de Roumieh, au nord-est de Beyrouth, et dont certains purgent des peines à vie ou sont condamnés à mort, ont entamé mardi une grève de la faim pour demander à être rapatriés en Syrie.

Incarcérés depuis une dizaine d'années pour leur implication dans les événements sanglants qui ont opposé en 2014, à Ersal dans la Békaa, l'armée libanaise à des jihadistes de l'organisation État Islamique et du Front al-Nosra, branche syrienne d'el-Qaëda, les prisonniers réfutent les accusations dont ils sont l'objet et disent espérer une solution à leur dossier. 

Un communiqué publié sur les réseaux sociaux par ces hommes qui se décrivent comme étant des « prisonniers d'opinion », explique qu'ils souhaitent rentrer en Syrie, conformément à la demande formulée par le nouveau président syrien Ahmad el-Chareh début janvier lors d'une rencontre à Damas avec l'ancien Premier ministre libanais Nagib Mikati. Les deux parties s'étaient mises d'accord pour extrader l'ensemble des prisonniers syriens au Liban et mettre en place un comité sécuritaire et militaire conjoint, avait rapporté la presse libanaise. 

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« Nous ne mangerons pas avant de rentrer en Syrie. Nos dossiers ont été fabriqués de toutes pièces », affirme à L'Orient-Le Jour un de ces prisonniers, incarcéré à Roumieh depuis neuf ans et condamné à la perpétuité pour avoir « rejoint des organisations terroristes ». « La raison de notre emprisonnement est, en vérité, liée au fait que nous avons soutenu la révolution syrienne. Nous venons tous de Qousseir, Qalamaoun ou Zabadani. Parmi nous se trouvent d'anciens officiers qui ont fait défection. Lorsque nous nous sommes réfugiés au Liban, nous avons été accusés d'avoir pris part aux combats à Ersal », affirme cet homme qui a requis l'anonymat. Ces régions situées dans l'ouest syrien ont été contrôlées à un moment par le Hezbollah, qui combattait aux côtés du régime déchu de Bachar el-Assad. De nombreux habitants ont alors été obligés de trouver refuge dans la localité libanaise sunnite de Ersal. 

À noter que des islamistes libanais croupissent également dans les prisons libanaises, dont certains qui ont combattu l'armée libanaise aux côtés du cheikh Ahmad el-Assir en 2013. Des appels à une amnistie générale pour ces prisonniers ont été lancés à plusieurs reprises.

Des prisonniers « diabolisés »

L'avocat Mohammad Sablouh, chargé de la défense de plusieurs détenus islamistes, confie pour sa part qu'il y a « des demandes sérieuses de la part des autorités syriennes pour régler ce dossier, mais le Liban ne leur a pas donné suite pour l'instant ». Interrogé sur la participation de ces détenus à des organisations jihadistes, Me Sablouh explique que la plupart d'entre eux « ont été diabolisés et victimes de dossiers fabriqués ». Selon lui, certains ont été condamnés pour avoir soutenu la révolution en Syrie ou pour avoir été en contact avec Hay'at Tahrir el-Cham (HTC) et son leader Ahmad el-Chareh, alias Abou Mohammad el-Joulani à l'époque. Or, « Nagib Mikati a rencontré M. Chareh dernièrement. Doit-on le mettre aussi en prison ? », demande-t-il. « Le Liban était sous l'emprise de forces du fait accompli, telles le Hezbollah, qui étaient proches du régime syrien. Ce qui a fait que chaque Syrien à Ersal était susceptible d'être mis en accusation », a-t-il ajouté.

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En mars 2024, quelques mois avant la chute du régime à Damas, quatre prisonniers syriens de Roumieh avaient tenté de se pendre de peur d'être remis aux autorités de leur pays. La question avait été abordée dans le cadre d'un plan visant à désengorger les centres pénitentiaires au Liban. Le prisonnier interrogé par L'Orient-Le Jour révèle que plusieurs de ses compagnons avaient été remis au régime Assad et ont disparu depuis, une information qui n'a pu être vérifiée de manière indépendante.

Pour tenter de rapatrier les prisonniers syriens impliqués dans des affaires liées aux organisations islamistes, Me Sablouh appelle à revoir la loi d’extradition de 1951 signée entre les deux pays. Cette loi permet d'expulser un prisonnier qui a encore six mois à purger et devra être amendée parce que les détenus syriens en question sont « pour la plupart condamnés à mort ou à la prison à vie ». Parmi eux, 55 % n'ont pas encore été jugés, révèle-t-il. « Le ministère libanais des Affaires étrangères est en contact avec l'ambassade syrienne à Beyrouth », indique-t-il. 

Les prisons et les centres de détention au Liban hébergent actuellement 8402 prisonniers, dont 48 % sont étrangers, notamment syriens (2572) et palestiniens (563), détenus pour diverses accusations. Parmi les détenus, 83 % n’ont pas encore fait l’objet de jugement, un facteur qui, outre la criminalité étrangère, aggrave la surpopulation carcérale, selon des chiffres de la Commission des prisons de l’Ordre des avocats de Beyrouth.

Des détenus syriens incarcérés au Liban dans la prison de Roumieh, au nord-est de Beyrouth, et dont certains purgent des peines à vie ou sont condamnés à mort, ont entamé mardi une grève de la faim pour demander à être rapatriés en Syrie.Incarcérés depuis une dizaine d'années pour leur implication dans les événements sanglants qui ont opposé en 2014, à Ersal dans la Békaa,...
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