Un mur entier de la citadelle de Toron, une forteresse bâtie au temps des Croisés à Tebnine (Bint Jbeil) au Liban-Sud, a été détruit cette semaine par des frappes israéliennes, a confirmé vendredi à notre publication Carmen Fawaz, responsable des activités culturelles dans cette localité. « La forteresse risque d’être entièrement détruite. Il y a même des frappes en ce moment non loin de ce site archéologique », a confié Mme Fawaz qui appelle à la protection de ce site patrimonial, touché presque en même temps que la ville de Baalbeck où une frappe israélienne lundi a fait tomber deux murailles historiques.
« On a beaucoup travaillé pour garder cette forteresse en bon état. On y faisait beaucoup d'activités. On y a accueilli des concerts de Wadih Safi, Marcel Khalifé ou encore des frères Chehadé. Si on ne préserve pas notre passé, on ne pourra pas construire le futur », lance Carmen Fawaz, la voix nouée par l'émotion. Elle indique par ailleurs que la localité de Tebnine, située à 110 km de Beyrouth et à 25 km de Tyr, a été entièrement vidée de ses habitants et que le seul l'hôpital gouvernemental de la région continue de fonctionner.
Construite au XIIe siècle sur les ruines d'un château plus ancien, la citadelle de Toron avait été partiellement restaurée en 1990 et inaugurée en 1996 comme centre touristique. Selon Guillaume de Tyr, archevêque et historien des croisades ayant vécu au XIIe siècle, le château de Toron a été fondé en 1104 par le gouverneur de Tibériade, Hugues de Saint-Omer, dans le but de contrôler la ville de Tyr prise en 1124 par les Croisés.
Depuis l'intensification des frappes israéliennes au Liban le 23 septembre, de nombreux sites patrimoniaux sont menacés. A la mi-octobre, l'aviation israélienne a entièrement rasé un souk vieux de 400 ans dans la ville de Nabatiyé, au Liban-Sud, et ses frappes incessantes sur Tyr menacent les ruines romaines de la ville.
« Une autre victime de ce conflit »Recent evacuation orders for the cities of Baalbek and Tyre forced tens of thousands of Lebanese to flee en masse. Worsening an already catastrophic mass displacement situation. Ancient Phoenician cities steeped in history are in deep peril of being left in ruins. Lebanon’s…
— Jeanine Hennis (@JeanineHennis) November 1, 2024
Le comité spécial de l’Unesco chargé de la protection des biens culturels en cas de conflit devrait se réunir le 18 novembre pour une session extraordinaire consacrée au Liban, alors que les craintes de destruction ou dommages sur les sites historiques du pays se multiplient avec la violence des frappes israéliennes.
Face aux risques encourus par le patrimoine, la coordinatrice spéciale de l'ONU au Liban, Jeanine Hennis-Plasschaert, a déploré sur X que « d'anciennes citées phéniciennes, chargées d'histoire, sont en grand danger d'être laissées en ruines ». Mentionnant Tyr et Baalbeck, deux villes abritant des sites classés au patrimoine mondial de l'Unesco, elle a insisté sur le fait que « le patrimoine culturel du Liban ne doit pas être une autre victime de ce conflit dévastateur ».
Lundi, deux murailles d’enceinte juxtaposées situées dans la ville historique de Baalbeck, l’une datant du mandat français et connue sous le nom de Gouraud (en référence au général Henri Gouraud) et l’autre de l’époque ottomane, avaient été détruites par les bombardements israéliens acharnés sur la région.
Le site antique, qui comprend l’un des temples romains les mieux préservés au monde, est classé sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1984.