Le chef du bureau des médias et porte-parole du Hezbollah, Mohammad Afif Naboulsi, a assuré vendredi que « la bataille avec Israël n’en était qu’à ses débuts » et qu’il était « beaucoup, beaucoup trop tôt pour parler de capitalisation politique », lors d’une conférence de presse organisée dans la banlieue-sud de Beyrouth, non loin de la route de l’Aéroport international de Beyrouth.
« Ne vous précipitez pas, ne vous brûlez pas les doigts, sinon cela veut dire que vous n’avez pas compris les leçons du passé », a-t-il lancé à ceux qui misent sur la défaite du parti, parmi lesquels il inclut « certains politiciens libanais et membres des médias locaux » qui ont tenu des propos « dégoûtants » qu’il a dit ne pas souhaiter répéter lors de son intervention.
« Rappelez-vous que l’ennemi israélien ne travaille pas pour vous, mais uniquement pour ses propres intérêts », a-t-il ajouté. Il a aussi critiqué certains médias locaux qui diffusent des informations qui confortent le narratif israélien, les accusant de « répandre la propagande israélienne dans le cadre d'une guerre psychologique contre la résistance et son peuple ». « Où sont le ministre de la justice, le procureur général, les juges compétents et le bureau de lutte contre la cybercriminalité ? », a encore lancé Mohammad Afif Naboulsi.
Le Hezbollah et Israël échangent des tirs depuis le 8 octobre 2023, au lendemain de la guerre de Gaza, mais ces affrontements ont dégénéré en guerre totale depuis la fin de l’été. Israël a récemment lancé une incursion au Liban-Sud et mené plusieurs bombardements massifs sur la banlieue-sud, tuant plusieurs cadres du parti, dont son emblématique secrétaire général Hassan Nasrallah. Plus de 2 000 civils ont également péri depuis le 8 octobre, la majorité dans des frappes israéliennes effectuées ces dernières semaines. Le Hezbollah, qui ne dispose pas des mêmes moyens militaires aériens, a de son côté multiplié les tirs de roquettes et de missiles sur le territoire israélien, visant notamment des cibles à Tel-Aviv.
Une partie de la classe politique et des médias libanais critique le Hezbollah pour avoir unilatéralement entraîné le pays dans une guerre qui ne le concernait pas, vu que le parti affirme avoir lancé ses attaques en solidarité avec la bande de Gaza. Le parti chiite a récemment déclaré, via son numéro 2 Naïm Kassem, que l’État hébreu avait prévu d’attaquer le Liban depuis le début.
Stock stratégique
Alors qu’Israël semble avoir pris l’avantage depuis l’été avec deux séries d’explosions déclenchées sur des outils de communication du Hezbollah et enchaîne les opérations terrestres depuis fin septembre, Mohammad Afif Naboulsi a cherché à se montrer rassurant quant à l’état des troupes du parti sur le terrain. « Sur le terrain, en particulier sur le front sud, la résistance se porte bien et gère ses ressources en fonction de sa lecture de la situation. Son stock stratégique se porte bien », a-t-il assuré, affirmant que les combattants étaient « à leur plus haut niveau de préparation » et « prêts à se battre férocement ».
Au cours des derniers jours, les forces israéliennes ont annoncé à plusieurs reprises leur infiltration dans plusieurs localités libanaises situées le long de la Ligne bleue, tandis que le Hezbollah a révélé maintes opérations pour les contrer.
Mohammad Afif Naboulsi a affirmé que les forces israéliennes dissimulaient leurs pertes à la suite de ce qu'il a décrit comme une « frappe puissante et réussie à l'intérieur d'Israël », en référence à l'attaque revendiquée par le parti il y a quelques jours sur Tel-Aviv. « J'ai dit lors de la tournée médiatique dans la banlieue-sud (de Beyrouth) il y a dix jours, que frapper Tel-Aviv n'est que le début, et ce qui s'est passé ces derniers jours à Haïfa et dans ses environs confirme que nous en sommes toujours au début. A l'ennemi je dis : vous n'avez encore vu qu'une infime partie de nos frappes », a menacé le porte-parole.
Il a aussi rejeté la position israélienne consistant à justifier ses bombardements au Liban en assurant cibler des dépôts d'armes. « Les prétextes peu convaincants de l'existence de dépôts d'armes ne trompent plus personne, mais il n'y a pas d'institutions internationales qui surveillent ou demandent des comptes, et aucune opinion publique internationale n'a de poids ou d'influence », a regretté Mohammad Afif Naboulsi. Il a en outre accusé Israël d’entraver délibérément les opérations de sauvetage des civils piégés sous les décombres, en particulier à Marjeyoun, et ce « avec la complicité des États-Unis et des pressions malveillantes exercées par l’ambassadeur américain », a-t-il déclaré.
En début de semaine, l’armée israélienne a publié une vidéo de ses forces faisant exploser l’une des mosquées de Yaroun, assurant que les forces du Hezbollah cachaient des armes à l’intérieur de l'édifice. Plusieurs membres des organisations de secours du Hezbollah et d’Amal, mais aussi de la Défense civile et de l’armée libanaise ont parallèlement été tués par des bombes israéliennes, principalement au Liban-Sud.
Dans un message adressé aux personnes déplacées par le conflit, M. Naboulsi a promis un retour rapide dans leurs foyers : « Vous retournerez bientôt dans la banlieue sud, dans vos maisons du sud et de la Békaa, et nous les reconstruirons mieux qu’avant. »
Le Premier ministre sortant Nagib Mikati a déclaré vendredi que des « efforts ont été menés dès le début de la semaine pour réduire les frappes sur la banlieue sud » et que le rythme des bombardements a « relativement diminué ». Il reste que les frappes — sans avertissement — qui ont touché dans la nuit de jeudi à vendredi Basta et Ras el-Nabeh ont fait 22 morts, dont de nombreux civils.
Naboulsi rêve encore à voix haute. Quelle arrogance primaire !
18 h 02, le 12 octobre 2024